Avec 128 escales et 119 000 passagers en 2006, la croisière chute inexorablement. Elle a perdu 7 % de son volume en un an et 44 % depuis 2004. La crise est bel et bien présente. Les chiffres, à remonter plus en avant, sont encore plus alarmants. En 1993, le port de Fort-de-France a accueilli 678 escales de navires de croisière pour 420 000 passagers. En 1985, la Martinique se plaçait à la 5e place des ports de croisière dans le Monde. En 2006, elle occupe la 33e position. Et pourtant, la Martinique n’a rien à envier aux autres îles antillaises. Les infrastructures d’accueil existent, les sites et la culture sont attrayants.
Un "monsieur croisière"?
Claude de Jehamme, gérant de Marship, agent consignataire réalisant une part importante de son activité dans la croisière, analyse la situation sereinement. "Des efforts ont été entrepris, mais il manque toujours une coordination." La multiplicité des intervenants dans les décisions aux navires de croisières constitue un handicap majeur. La CCI, l’État et la DDE gèrent les questions de police sur le port. Dans la ville, la sécurité est assurée conjointement par la collectivité, la mairie et l’État. "Il faudrait un guichet unique qui puisse être un lieu d’écoute et une courroie de transmission entre les demandes des compagnies maritimes et les autorités du département." Ainsi, il plaide en faveur d’un "monsieur croisière" qui fédérera les demandes et agira en toute indépendance. Toute la difficulté vient alors de savoir qui payera cette personne. Le Groupement de la croisière, organisme local chargé de ces questions, pourrait en prendre une partie. La région ne semble pas opposée à participer. Mais qui aura autorité sur ce salarié? Les payeurs veulent être les bénéficiaires, mais les intérêts des uns ne sont pas forcément ceux des autres. Ensuite, Claude de Jehamme préconise une sensibilisation de la population sur l’importance économique du tourisme. Enfin, l’accent doit être mis sur l’amélioration des produits touristiques, entendant par là une sécurisation des sites fréquentés, comme leur aménagement et leur nettoyage régulier.
Cette analyse est partagée par Frantz Thodiard, directeur des concessions à la CCI. Il plaide pour un port bipolaire avec d’une part le commerce, mais aussi la croisière. "J’espère que nous avons touché le fond. L’avenir ne peut être que meilleur", souligne-t-il. Cet avenir, Claude de Jehamme le voit difficilement. L’espoir d’une croissance de ce secteur passe surtout par une refonte totale de l’approche. "Il faut rejoindre les demandes des compagnies maritimes", indique le patron de Marship. Et reprenant à son actif une phrase du poète martiniquais Aimé Césaire: "La meilleure voie pour améliorer l’avenir est la compréhension du passé." Comprendre le passé, sur le secteur de la croisière en Martinique, c’est aborder lucidement les problèmes.
Marship et Camarship
Le groupe est formé par Marship et Camarship. Le premier est actif en Martinique. Le second étend son activité sur la Guadeloupe, les Saintes, Marie-Galante, Saint-Barthélémy et la Dominique. Plus récemment, cette entité a créé la Somara, société martiniquaise de remorquage, pour assurer les prestations de remorquage dans le port. Elle dispose de trois remorqueurs. Le groupe a réalisé en 2006 un chiffre d’affaires de 5 M€, dont les deux tiers proviennent de Marship, le solde de Camarship. La consignation de navires représente environ un tiers des revenus, la logistique le solde. Ce dernier poste est surtout composé de transport de marchandises sur l’île, dédouanement, d’opération de manutention comme le branchement des tuyaux pour les pétroliers et d’opérations diverses.