Banane: le pétrole antillais

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La banane constitue un pilier de l’économie antillaise. À l’origine, le fruit oblong était cultivé par les esclaves dans leur jardin pour leur consommation personnelle. Ce n’est qu’au lendemain de la Première Guerre mondiale qu’il a été commercialisé. Une entreprise qui a pris de l’essor à la fin de la Seconde Guerre mondiale. En Europe, le premier marché mondial, les consommateurs en avalent quelque 5 Mt par an.

La banane a trois provenances: les pays membres de l’UE qui fournissent 16 % du marché; les pays ACP (Afrique Caraïbes et Pacifique) pour 17 %; et les pays d’Amérique latine avec 67 %. Ainsi, la grande majorité des bananes consommées sur les tables européennes provient d’Amérique latine et centrale. Produites dans des fermes appartenant pour une large part à des multinationales américaines, elles sont appelées "bananes dollars". Deux grandes sociétés ont su se faire un nom autour de la banane, Chiquita et Dole. Les fruits jaunes provenant des pays ACP sont essentiellement produits au Cameroun, en Côte d’Ivoire et dans quelques pays des Caraïbes. Ceux des pays membres de l’UE proviennent surtout des Canaries, de Madère, de Martinique et de Guadeloupe. Une quantité infinitésimale, à peine 2 % selon la Commission européenne, vient de Chypre et de Grèce. Dans les Antilles françaises, la production de banane totalise quelque 260 000 t, avec 220 000 t en Martinique et 45 000 t en Guadeloupe. En Martinique, 60 % de la main-d’œuvre agricole est employée dans le secteur de la banane.

Retour sur un marché très encadré

En 1993, l’Union européenne (UE) a mis en place l’Organisation commune de marché de la banane (OCMB) pour harmoniser les politiques d’importation de bananes et préserver les intérêts des producteurs communautaires. Un système de licences, de contingents tarifaires et de droits de douane favorise ainsi les "bananes communautaires et ACP" au détriment des "bananes dollars" qui continuent malgré tout d’approvisionner pour près de 60 % le marché communautaire. Le système est contesté dès le début par les États-Unis qui portent le conflit devant l’Organisation mondiale de commerce (OMC) en 1994.

À l’issue de négociations, en avril 2001, un accord entre Européens et Américains a été signé. Et depuis le 1er janvier 2007, un nouveau régime est en place. "Lors de la condamnation par l’OMC, l’Europe ne pouvait plus gérer avec des mesures compensatoires le marché de la banane. Elle se trouvait donc face à quatre alternatives: laisser le statu quo, au risque de se voir condamner de nouveau; ferme la filière avec les risques sociaux que cela engageait; intégrer la banane dans la politique agricole commune; ou, enfin, fournir une aide fixe aux producteurs de bananes. Cette dernière solution a été retenue", rappelle le directeur général du groupement bananier martiniquais Banamart, Bernard Monteux. À la différence du régime précédent s’appuyant sur une compensation financière en cas de chute des prix, le nouveau système prévoit d’attribuer une enveloppe communautaire globale dont le montant est fixé à 279 M€. Puis, une subvention est versée à chaque pays. Ainsi, la France perçoit chaque année 129 M€. L’ensemble de cette enveloppe est reversé aux producteurs (à la différence de l’Espagne qui utilise cet argent pour favoriser la diversification de la production agricole des Canaries).

Un marché qui intéresse le maritime

Outre l’aspect social et économique, la production de banane assure la pérennité de lignes maritimes régulières vers ces régions productrices, souvent ultrapériphériques. Aux Antilles françaises, les producteurs négocient des contrats pluriannuels avec les armements. Deux contrats liaient les organisations de producteur avec deux armements: CMA CGM et Mærsk Line. La répartition prévue contractuellement attribuait 75 % des conteneurs à CMA CGM et 25 % à Mærsk Line. Avec le premier, le contrat a pris fin en décembre 2005 et a été renouvelé. Celui avec l’armement danois, qui a pris fin en juin 2006, n’a pas été renouvelé. L’armateur demandait une augmentation du taux de fret d’une part, et 35 % des boîtes d’autre part. Ainsi, lors de sa décision de se retirer de la desserte des Antilles, Mærsk a demandé aux producteurs de retourner les boîtes vers le port. Et même si elles étaient chargées, il a fallu les décharger pour les ramener. "CMA CGM a su répondre immédiatement à nos besoins en alignant les conteneurs dont nous avions besoin dans le meilleur temps. Aujourd’hui, il reste le seul à exporter nos produits", explique le directeur général de Banamart. Cette situation pourrait changer dans les prochains mois. "Le service de CMA CGM est satisfaisant. Celui de Mærsk l’était tout autant. Nous restons vigilants." L’organisation de producteur martiniquais ne se contente pas de n’avoir qu’un seul armement qui achemine leur production.

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