L’annonce faite par l’opérateur P&O Ferries de laisser vacante la liaison Le Havre/Portsmouth en 2005 avait laissé un goût amer à la population, mais aussi aux responsables du port autonome, tous très attachés à "leur" ligne. Rappel des faits. Le 28 septembre 2004, P&O Ferries annonçait le recentrage de ses activités et la fermeture de ses laisions transmanche dans la Manche Ouest. Pour la ligne Le Havre/Portsmouth, un protocole d’accord est signé par P&O avec l’armateur breton Britanny Ferries. Le 1er mars 2005, la BAI renonce finalement à la reprise de cette liaison.
Toute la communauté havraise, le port autonome, la ville, la CCI, la communuaté de communes, se mobilise autour de ce dossier important pour l’économie locale. À la fin du mois de mai 2005, un appel à projet est lancé. Le compte à rebours est lancé puisque P&O se retire définitivement au mois de septembre. Au Havre, le sauveur se nomme LD Lines, filiale de Louis Dreyfus Armement (LDA). Le Port autonome du Havre accepte d’accompagner significativement LD Lines dans sa montée en puissance notamment durant la première année d’exploitation. Pour ce faire, il engage des travaux pour adapter techniquement les installations du terminal de Grande-Bretagne au Havre aux besoins spécifiques de l’armateur et de son navire.
Une politique de conquête
Et l’armement français, depuis qu’il a repris les choses en main le 3 octobre 2005, affiche ses ambitions sur un secteur déjà très concurrentiel. En 2005, il annonce vouloir atteindre à terme un trafic annuel d’environ 600 000 passagers et de 50 000 camions.
Nouveau concept qui rompt avec les navires surdimensionnés de P&O, une seule rotation quotidienne certes, mais une façon de travailler qui semble porter ses fruits puisque la fréquentation de la ligne est en progression.
En 2006, le trafic transmanche au Havre a représenté 266 000 passagers transportés, 928 000 t de fret pour 36 300 poids lourds et 96 000 véhicules légers. Et la compagnie ne veut pas en rester là puisque depuis plusieurs mois déjà elle veut acquérir un second navire pour renforcer la ligne actuellement assurée par le Norman-Spirit, ex Pride-of-Aquitaine. Objectif, offrir plus de flexibilité en matière d’horaire.
Au printemps prochain, l’armateur affectera également un des deux ferry de la ligne Dieppe/Newhaven, une ligne dont il a depuis peu la charge sous forme d’une délégation de service public, sur une nouvelle liaison quotidienne Le Havre/Newhaven. Sur cette liaison, LDA louera les navires et couvrira à sa charge la totalité des frais liés à l’exploitation de cette ligne supplémentaire. LD Lines renforce ainsi ses positions sur la Manche Ouest.
De nouvelles installations
Afin d’optimiser le confort des passagers, LD Lines a profité de l’arrêt technique du Norman-Spirit (voir encadré) pour aménager une nouvelle fois le ferry. Quatre-vingt dix sièges totalement inclinables ont été installés pour constituer une première classe. Une vingtaine de cabines supplémentaires ont également été installées. "Nous sommes les seuls aujourd’hui à proposer sur ce navire cinq modes d’hébergements différents: les cabines normales, les cabines simples, les sièges inclinables, la classe affaire et une première classe. La clientèle en a pour son argent", précise Pierre Gehanne, le directeur général de LD Lines.
Au mois de janvier 2007, le trafic a repris de plus belle. Sur cette période, LD Lines a enregistré 13 000 passagers contre 7 700 passagers en janvier 2006 soit une augmentation de la fréquentation de 70 %. Avec ses chiffres encourageants, LD Lines croit plus que jamais à l’avenir des traversées maritimes par ferries, que ce soit au Havre ou à Dieppe.
De bonnes perspectives pour LD Lines
En s’attaquant au marché du transmanche, l’armateur français LD Lines semble avoir fait le bon choix. Fort des résultats enregistrés sur la ligne Le Havre/Portsmouth, l’opérateur s’investit désormais à Dieppe pour renforcer sa position en Haute-Normandie. Pierre Gehanne, le directeur général de LD Lines se veut donc confiant pour l’avenir. “En 2006, nous avons enregistré au Havre des chiffres supérieurs à ce que nous avions prévu pour le trafic passagers et fret. C’est donc une année plutôt satisfaisante même si nous avons eu des coûts un peu plus élevés que prévu. Le Norman-Spirit qui assure Le Havre/Portsmouth n’a pas connu de panne. Il a pu assurer normalement son service même avec le mauvais temps de ces dernières semaines. Pour nous, 2007 s’annonce encore mieux que 2006”, confie-t-il.
L’armateur va en effet mettre en service au départ du Havre un second navire au mois de mai pour assurer la haute saison touristique. Cette ligne desservira quotidiennement le port de Newhaven. Pour ce faire, LD Lines utilisera le Côte-d’Albatre ou le Seven-Sisters, les deux ferries qui sont actuellement affectés sur la ligne Dieppe/Newhaven. La compagnie entend donc transporter deux fois plus de passagers par rapport à l’année écoulée. Pierre Gehanne explique que la progression des ventes de billets début 2007 a été particulièrement satisfaisante. Un rapport d’un à trois par rapport à 2006. “Nous sommes toujours à la recherche d’un second navire pour étoffer l’offre au départ du Havre. Nous étions à deux doigts de conclure un accord pour récupérer l’Atlantic-Traveller, une unité norvégienne. Mais finalement, les vendeurs n’ont pas libéré le ferry qui correspondait en matière de taille à nos besoins. Si nous n’en trouvons pas, nous aurons recours à une construction neuve. Mais la livraison ne serait qu’à l’horizon 2010.” Pierre Gehanne explique également que la notoriété de LD Lines commence à être reconnue chez les voisins d’outre-Manche. Quelques actions de promotion menées en Grande-Bretagne avaient eu cet objectif. Des Anglais particulièrement choyés puisqu’ils représentent près de 85 % de la clientèle de LD Lines.
F.H.
Quid du Norman-Spirit
Le Norman-Spirit, précédemment affecté aux liaisons courtes sur le détroit de la Manche, est doté d’une capacité de 1850 passagers et peut transporter 120 camions. Ce ferry a été construit en 1992.
L’année 2006 a notamment été marquée par le changement de pavillon du navire, une revendication des syndicats de marins français qui craignaient une déréglementation sur l’ensemble des trafics transmanche. Précédemment italien, le navire est passé sous pavillon britannique. Autre fait marquant, le Norman-Spirit a dû cesser son service pendant trois semaines au mois de novembre dernier afin de subir une escale technique à Dunkerque. Pour que le service ne soit pas interrompu, la compagnie avait déployé provisoirement le fréteur Lygra.
Ce navire qui pouvait transporter 40 pièces de fret et 12 camions accompagnés battait pavillon norvégien. Il assurait une seule rotation par jour. Une opération qui ne sera pas très rentable de l’avis même de Pierre Gehanne, le directeur général de LD Lines.