L’Institut européen d’archéologie sous-marine (IEASM) et la Fondation Hilti organisent, au Grand Palais à Paris jusqu’au 16 mars, une exposition sur les statues et objets récupérés dans l’ancien grand port d’Alexandrie et la baie d’Aboukir, sur les sites des cités d’Héracléion et de Canope.
Depuis dix ans, l’IEASM effectue des prospections électroniques dans cette région au moyen de techniques sophistiquées de géophysique, dont un magnétomètre à résonance magnétique nucléaire développé par le Commissariat à l’énergie atomique et mille fois plus sensible que les appareils usuels. Les pièces retrouvées vont du VIIe siècle av. J.-C. au VIIIe siècle après. Depuis, les sites gisent à environ 8 m sous la mer à la suite d’une combinaison de divers facteurs: affaissement de cette partie de la côte; montée du niveau de la mer; effondrements et glissements de terrain à la suite de tremblements de terre. Enfin, une crue énorme du Nil ou un raz de marée aurait déclenché la liquéfaction des argiles où se trouvaient de lourds monuments. "Les temples ont été happés par le substrat", indique Franck Goddio, fondateur de l’IEASM. Vu leurs dimensions et leurs poids, certaines statues ont été expédiées d’Égypte par l’avion-cargo Airbus A300-600ST Beluga utilisé pour le transport de fret hors gabarit.
Pour la première fois, 489 objets, dont seulement deux n’ont pas été retrouvés sous la mer, sont exposés sous l’immense verrière du Grand Palais. Le cheminement de l‘exposition débute par de vastes panneaux de prises de vues sous-marines et se termine par l’évocation des catastrophes naturelles. Les explications sont en français et en anglais. Un petit film de sept minutes fait revivre la découverte des principales statues sous la mer.
DEUX LIVRES COMPLÉMENTAIRES
Cette exposition se complète par deux livres: "2 000 ans sous les mers" et "Trésors engloutis d’Égypte". Le premier explique, dessins à l’appui, les méthodes, la complexité, la minutie et le travail pluridisciplinaire de l’archéologie sous-marine. Le second va beaucoup plus loin dans la description historique et culturelle. La richesse du delta du Nil a attiré les conquérants grecs, romains et arabes. Mais cette fois-ci, la civilisation hellénistique est à l’honneur. Les photographies sur fond noir font ressortir les particularités des pièces exposées avec des légendes abondamment documentées. Au cours de son développement, Alexandrie, la "fiancée de la Méditerranée", va supplanter Héracléion, la ville aux deux noms (Thônis en égyptien) et Canope, lieu de pèlerinages et de… plaisirs La dynastie ptolémaïque régnante se disait descendante d’Héraclès, fils de Zeus, du côté paternel et, du côté maternel, de Dionysos, également fils de Zeus. Or, les inscriptions retrouvées évoquent la fonction du pharaon, intermédiaire entre les hommes et les dieux, et sa double nature, humaine et divine. Pharaons d’origine étrangère, les Ptolémées ont donc légitimé leur pouvoir dans le lien mystique entre les cités de cette région et le jeu des interprétations grecque et égyptienne qui avaient assimilé Zeus à Amon, Héraclès à Khonsou (fils d’Amon) et Dionysos à Osiris. La bataille navale d’Actium (31 av. J.-C.) met fin à l’indépendance de l’Égypte. Désormais après Alexandre le Grand et ses successeurs grecs, les empereurs de Rome seront considérés comme les héritiers d’Osiris et incarneront la stabilité et la prospérité du pays.
Le livre "Trésors engloutis d’Égypte" immerge dans quinze siècles de civilisation antique. L’exposition prend une autre dimension en nocturne: elle envoûte!
Trésors engloutis d’Égypte
Paris, jusqu’au 16 mars
Fondation Hilti
Tél: 0892 701 892
2000 ans sous les mers Isalme Aubin et Clément Devaux
Seuil Jeunesse – 50 pages/15 €
ISBN: 2 02091645 2
Trésors engloutis d’Égypte ouvrage collectif
Coédition Le Seuil/5 continents
360 pages/400 photos couleurs/45 €
ISBN: 2-02-091265-1