"Aujourd’hui, il existe 37 terminaux à conteneurs rhénans, entre Baie et la frontière germano-néerlandaise, affirme Jean-Marc Uhrweiller, directeur commercial du Port autonome de Strasbourg, dont la zone Sud est équipée depuis 1969. Cette forte concurrence nous tient éveillés. Nous faisons face par nos actions de développement tant sur le plan commercial que dans le domaine des investissements." En octobre 2004, un second terminal à conteneurs a donc été construit à Lauterbourg, à 60 km au nord de Strasbourg, non loin de Karlsruhe. Fort de son succès, il sera pourvu dès 2007 d’un second portique. "Cet équipement se situe en aval du pont de l’Europe (reliant Strasbourg et Kehl) qui n’est pas au gabarit. Nous pouvons charger quatre couches de boîtes, au lieu de trois, soit 25 % de cargaison supplémentaire", explique Jean-Marc Uhrweiller. Et le port autonome pourrait créer un troisième terminal "à l’horizon 2010 si l’activité continue de progresser", prévient le directeur. Car malgré la compétition, Strasbourg a enregistré une croissance de 10 % du trafic fluvial de conteneurs sur les 10 premiers mois de 2006, après plusieurs années de fortes hausses. Son essor s’appuie sur le dynamisme des PME du Haut-Rhin qui ont une vocation à l’international (chimie, mécanique, brasserie, tisseur…). "Cette foultitude de petites sociétés nous confie un nombre assez faible de conteneurs chaque année, mais nous sont fidèles", indique Jean-Marc Uhrweiller. À l’import, le port travaille notamment pour des négociants et des fabricants d’articles de sport. Depuis peu, les importations équilibrent presque les exportations. "Sur les deux dernières années, nous profitons de la hausse du trafic de marchandises en provenance d’Asie via Rotterdam et Anvers", poursuit le directeur.
Colmar, dépôt pour OCCL
Le port rhénan de Colmar Centre Alsace bénéficie également de l’augmentation des importations venant des marchés émergents (Chine, Inde, Brésil…). "En France, nous allons de plus en plus importer. Par exemple, Peugeot s’approvisionne davantage en dehors de l’Europe", estime Yannick Casteur, directeur général. Le port mixte de Colmar jouit de la proximité d’une importante zone industrielle. "Un de nos gros clients est passé du conventionnel à la conteneurisation pure et a ainsi réduit ses coûts logistiques. D’autres pourraient sauter le pas", avance le directeur général. Le terminal compte parmi ses clients des chargeurs qui exportent vers la Chine et l’Inde des produits plastiques. "Nous sommes également dépôt pour l’armement OCCL (Orient Overseas Container Line), signale Yannick Casteur. Nous faisons de l’acheminement direct: nous dépotons les conteneurs pleins puis ils repartent à l’export." Colmar effectue aussi le transbordement de boîtes qui sont redistribuées par tous les modes de transport, par la route pour environ la moitié. Résultat: les mouvements ont doublé tous les ans depuis 2000 pour atteindre 7 000 conteneurs cette année, selon les prévisions. "Pourtant, la concurrence se durcit, car tous les ports ont un terminal (Baie, Karlsruhe, Cologne, Duisburg…). La compétition existe aussi avec les équipements français, assure Yannick Casteur. Nous sommes situés entre Strasbourg et Ottmarsheim. Tous ont leur place à partir du moment où chacun trouve un opérateur rhénan. Un armement ou un important chargeur." Mais pour le directeur, le principal concurrent reste la route qui capte 70 % de l’activité conteneurs de la région. De Rotterdam ou Anvers vers Colmar, un camion a besoin d’une seule journée tandis qu’une barge met trois à quatre jours. "L’avantage du fluvial, c’est d’être beaucoup plus économique", ajoute Yannick Casteur.
Ottmarsheim à l’export
Le terminal d’Ottmarsheim (ports de Mulhouse-Rhin) se porte moins bien que ses voisins, car il est essentiellement dédié à l’export et pâtit des difficultés de l’économie du Sud de l’Alsace (fermetures d’entreprises notamment des sous-traitants de PSA). "Nous travaillons pour des producteurs locaux de produits chimiques et agricoles, objets manufacturés, denrées alimentaires. Nous assurons leurs exportations pour que les conteneurs rejoignent les navettes intercontinentales et atteignent leur correspondance maritime", déclare Bernard Fessier, directeur des ports. Ottmarsheim a aussi connu plusieurs périodes pendant lesquelles la navigation n’était pas optimale à cause du niveau des eaux. Bilan: les flux de conteneurs ont baissé de plus de 25 % l’an dernier "et ils continuent de diminuer depuis le début de l’année", déplore Bernard Fessier. Situé entre Strasbourg et Baie, le terminal se heurte à une forte compétition. "Nous nous efforçons donc d’offrir aux acteurs du transport combiné un temps d’escale allégé et une amplitude d’ouverture de nos installations assez large", soutient le directeur. Pour ce faire, le port s’est doté d’un second portique au printemps 2006, "le plus grand de France". "Cet équipement nous permet d’augmenter la longueur de quai. C’est impératif, car la taille des bateaux s’allonge", complète Bernard Fessier. Mais la concurrence reste difficile. "Les organisations des terminaux proches du nôtre sont différentes. À Bâle, les installations terminales sont exploitées, par des armements fluviaux, ce qui permet une meilleure maîtrise des flux", poursuit le directeur. Bernard Fessier demeure optimiste: "Avec l’augmentation du coût de l’énergie, les embarquements et débarquements se font davantage via les terminaux qui offrent la meilleure proximité par rapport au lieu de livraison ou d’enlèvement du conteneur. En outre, la voie d’eau a de l’avenir et deviendra incontournable en raison de la saturation des routes, de la hausse du coût du transport routier et du respect de l’environnement."