Le rebond est prévu pour 2007

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Déjà au mois de juin le groupe AP Møller a publié un "warning" pour 2006. Les résultats financiers des activités conteneurs sont revus à la baisse. Et quand le premier armement en capacité s’alarme de la situation, il paraît logique que les autres armateurs suivent le pas. Dès le mois d’octobre, ce fut au tour d’Hapag Lloyd (HL), filiale conteneurisée du groupe de transport et de tourisme de TUI. Une partie des actionnaires s’inquiétant des faibles résultats dans le monde de la conteneurisation ont demandé une scission entre la division tourisme et celle du conteneur. Or en août, TUI avait prévu un bénéfice pour HL. L’armement est passé d’un bénéfice de 95 M$ entre juillet et septembre 2005 à une perte de 25 M$ un an plus tard. Le coût de l’intégration de l’armement canadien CP Ships, racheté 2 Md$ l’an dernier, devrait entraîner une perte de 106 M$ au maximum pour HL sur l’ensemble de 2006. Déjà sur les pertes du troisième trimestre, 11 M$ sont imputables aux opérations et 14 M$ au coût d’intégration. En outre, les taux de fret ont baissé de 4,2 % en un an.

Toutefois d’après le directeur financier de TUI, Rainer Feuerhake, les recettes de HL en 2007 devraient être nettement supérieures à celles de cette année. De plus, l’intégration de CP Ships avance plus vite que prévu et une provision de 16 M$ est inscrite à cet effet au budget de 2007. La fusion avec HL devrait permettre de réduire les coûts de 184 M$, indique Rainer Feuerhake.

L’armement allemand connaît des difficultés dont une partie sont liées à la reprise de son homologue anglo-canadien CP Ships. "Je ne suis pas satisfait non plus de l’évolution de notre cours de Bourse. Pour autant, la réponse que nous devons apporter ne réside pas dans le démantèlement de l’entreprise et de sa structure orientée sur des activités d’avenir. Une telle direction détruirait nos actifs ainsi que les perspectives de croissance pour nos actionnaires comme nos employés", a déclaré le 17 novembre le président de TUI, Michael Frenzel.

Baisse des taux de fret

"Le battement des ailes d’un papillon en Europe peut créer un cyclone au Japon", rappelle une maxime. Et cela semble s’appliquer parfaitement pour le monde du conteneur. Dès le début du mois de novembre, les trois principaux armateurs nippons, NYK Line, Mitsui OSK Lines et K Line, ont publié leur rapport intérimaire (ces armements clôturent leurs comptes au 31 mars. À fin septembre, ils établissent leurs rapports semestriels de l’année fiscale, NDLR). Ces conglomérats affichent des résultats globaux en hausse. Seules leurs divisions spécialisées dans la conteneurisation plombent les performances réalisées par les branches vracs et conventionnelles. Des trois armateurs du Pays du Soleil Levant, K Line souffre le plus en raison de sa forte dépendance au conteneur.

En Chine, Cosco Container Lines et China Shipping Company Lines sont sur la même longueur d’ondes.

Tous ces armateurs sont unanimes sur la situation actuelle du liner: les volumes sont en nette croissance sur les principales routes Est/Ouest. Avec les fêtes de fin d’année, ils ne devraient pas descendre. Le Père Noël a depuis plusieurs années déménagé depuis le Pôle Nord au centre de la Chine, là où se produisent les jouets. Seule ombre à ce tableau, les volumes s’effritent sur le transatlantique. La demande des Américains en produit européens n’est pas au rendez-vous.

Cette croissance des volumes ne s’est pas pour autant accompagnée d’une augmentation des taux de fret. Depuis le début de l’année, les taux se sont repliés sur eux-mêmes. D’Asie en Europe, les taux de fret ont plongé de 15 %, selon certains analystes cités par l’agence de presse Reuters, depuis le début de l’année. En sens retour, les taux se stabilisent à des niveaux extrêmement bas, quelque 800 $ par EVP pour acheminer un conteneur chargé du vieux continent vers l’Empire du Milieu. Cette faiblesse des taux de fret des conteneurs, conjugués avec un maintien à des prix élevés de l’offre de vraquiers, incite aujourd’hui les porte-conteneurs à étendre leur métier à des produits encore moins cher, comme les céréales. Tant en Europe qu’aux États-Unis, les contrats céréaliers passent en partie par les porte-conteneurs. "Pourquoi ne pas utiliser ces conteneurs qui partent vers l’Asie à vide pour les charger de céréales?", s’interroge un courtier américain en céréales installé sur la côte Ouest. Les indices des taux de fret des vraquiers opérant en Europe et en Asie se situent toujours à des niveaux élevés par rapport à l’an passé, "le volume des céréales passées par conteneurs vers l’Asie va aller progressant", continue un second courtier américain.

Les comptes plombés par le prix des soutes…

Autre élément qui plombe sérieusement les comptes des armateurs de lignes, le coût élevé des soutes. La hausse du prix du baril depuis le début de l’année a touché de plein fouet les résultats financiers de ces armateurs. Depuis quelques semaines, le prix des soutes revient à des niveaux décents. La folle envolée des derniers mois de 2005 semble s’achever. Entre décembre 2005 et mai, les prix du cst 380 ont perdu 21 %. Certains armements se "couvrent" jusqu’en 2008 en négociant le prix avec les ports et peuvent ainsi faire des arbitrages pour réduire l’impact d’une nouvelle augmentation. Il n’en demeure pas moins que le prix du carburant se maintient à un niveau élevé.

… et l’arrivée de navires "géants"

Enfin, dernier élément entrant en ligne de compte, selon les armements, de cette situation difficile, l’arrivée de nouveaux navires de grande capacité sur le marché a créé une surcapacité. Au premier plan de ces nouvelles arrivées, celle de l’Emma-Mærsk, premier navire à franchir la barre des 11 000 EVP de capacité (le courtier parisien BRS dans une étude minutieuse des plans du navire parle plutôt de 13 500 EVP de capacité, NDLR). En quelques mois, des unités importantes sont venues prendre part aux trafics, sans que ce mouvement ne s’accompagne d’un ferraillage des navires les plus anciens. Selon un rapport publié en septembre par la banque suisse, UBS, à chaque navire en activité actuellement, deux sont en construction. Cette croissance de l’offre de transport ne devrait pas se ralentir 2007. "Même si le marché du transport de conteneurs affiche des augmentations à deux chiffres, elles ne compenseront pas l’arrivée des nouvelles unités", a rappelé Thomas Preben-Hansen, directeur de Clarckson Asia dans un entretien avec l’agence de presse Reuters.

Quant à ces chiffres peu encourageants, les perspectives sont nuancées. Selon certains armements, 2007 verra un retournement de situation. Une idée que Michael Frenzel, président de TUI, développe face à son actionnariat. "Nous sommes au fond, nous allons rebondir en 2007", dit-il pour rassurer ses actionnaires et justifier en partie sa décision de ne pas vouloir scinder les divisions tourisme et transport. Une philosophie partagée par le président de Mitsui lors de la présentation de ses résultats financiers arrêtés fin septembre. Le directeur de Clarckson se veut plus pragmatique. "La perte du pouvoir d’achat aux États-Unis aura un effet sur le marché du conteneur". Et les analystes estiment que la croissance américaine pourrait perdre 0,7 point à 2,7 %. Evergreen est plus optimiste. Le porte-parole du groupe taïwanais indique que la demande reste importante surtout avant la fête de Noël, une raison pour laquelle les navires affichent encore des taux de remplissage intéressants en sortie d’Asie vers les États-Unis ou l’Europe. En fait, c’est encore vers l’Asie qu’il convient de regarder pour prendre le pouls de l’avenir du marché du conteneur. Les prévisions ne sont pas alarmantes et devraient permettre au marché de revenir à des niveaux élevés comme il existait dans les premières années du siècle. Après trois ans à surfer sur une vague de croissance, le liner semble s’essouffler pour revenir à des niveaux de rentabilité inférieurs. Dans ses rapports annuels des dernières années, le courtier parisien BRS s’étonnait de la durée de la bulle dans laquelle vivaient les armateurs aux conteneurs. Il semble que cette bulle se dégonfle petit à petit, mais n’explose pas.

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