Le Havre: une ville convalescente et en mutation

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Que de chemin parcouru par le port du Havre ces 15 dernières années: la réforme des dockers de 1992, la croissance de l’activité jusqu’en 2004, la construction d’un réseau autoroutier de qualité autour du Pont de Normandie, du nouveau terminal Port 2000. Cette évolution portuaire favorable s’est accompagnée d’une renaissance urbaine sous l’impulsion, depuis 1995, de son maire Antoine Rufenacht.

Mais Le Havre est également confronté à l’exclusion sociale avec des quartiers très difficiles associant les difficultés d’insertion des Français issus de l’immigration et celles des laisser pour compte du secteur industriel. Les attentes de la population en matière d’emploi sont énormes pour améliorer un pouvoir d’achat en dessous de la moyenne nationale et pour offrir une perspective aux quartiers difficiles.

Aucune réponse ne peut être plus adaptée pour ces quartiers que la promotion du modèle de la réussite par le travail et l’effort. Tout échec dans cette voie a valeur de contre-exemple.

Dans ces conditions, la responsabilité des milieux économiques, et notamment du milieu portuaire et logistique qui représente l’essentiel des embauches ces dernières années, est immense.

La ville attend de ses milieux économiques et syndicaux:

1) qu’ils saisissent pleinement les opportunités qui leur sont offertes par la croissance du trafic maritime;

et 2) un engagement social dans la formation professionnelle et la non-discrimination à l’embauche.

Les Havrais sont curieux de leur port, comme en témoigne les 50 000 visiteurs de Port 2000 en deux jours de portes ouvertes en 2005.

Mais la vie de la communauté portuaire reste pourtant trop peu connue de l’opinion publique havraise en dépit des efforts de la presse locale.

Ainsi, en dehors du milieu portuaire, qui a conscience parmi les Havrais de la baisse du trafic du Port en 2005? Ou du nombre d’emplois perdus qui résulte du retard pris dans les négociations sur le statut des portiqueurs sur Port 2000 (un trafic de 400 000 conteneurs/an pendant deux ans soit un retard de création de 300 emplois directs et de 1 500 emplois indirects)?

Traditionnellement les élus havrais n’interviennent pas ou très peu publiquement dans la vie portuaire. Les problèmes se règlent dans le cercle très fermé des personnes autorisées, dont les responsables syndicaux. L’idée communément admise est que toute personne faisant état des difficultés du port auprès de l’opinion publique ternit l’image de la ville et affecte l’attractivité du port.

Si à travers mon blog et mes prises de positions j’ai rompu avec ces usages, c’est parce que je suis persuadé qu’il ne faut pas cacher la vérité aux Havrais et que les clients du port n’ont de toute façon pas besoin de subterfuges pour connaître la réalité.

Par exemple, la suspension de l’agrément de la SNRH, ou les courtes grèves à répétition des portiqueurs l’année dernière, ont gravement terni l’image du Havre auprès des professionnels, mais passent relativement inaperçus dans l’opinion publique.

Lorsque le Port autonome du Havre, une entreprise ou un responsable syndical prend une position qui a des incidences sur le développement du port, et donc sur l’emploi, il se doit de l’expliquer aux Havrais. Pourquoi le rapport assez critique de la Cour des comptes sur le port du Havre a suscité si peu de réactions?

En écoutant et en observant les milieux portuaires depuis quelques années j’ai acquis deux convictions:

La première est que la réussite du développement économique du port du Havre dépend en grande partie de l’opinion de ses clients:

Or que veulent les clients du port? Ils choisissent un port selon trois critères: d’abord la fiabilité, ensuite les conditions économiques et enfin les infrastructures (portuaires et dessertes terrestres). Nous vivons beaucoup trop sur l’idée que les infrastructures de Port 2000 assureront à elles seules le développement économique de notre ville, et qu’elles nous dispensent de réformes sociales, ou de l’amélioration des dessertes fluviales et ferroviaires.

La deuxième, c’est que la ville ne se développera vraiment que si cette réalité économique est partagée par tous les acteurs, entreprises et syndicats. Le dialogue social ne peut être constructif que si tous les partenaires s’accordent à quelques nuances près sur la situation économique et ses perspectives. Il est normal qu’un syndicat ou qu’une entreprise défendent ses intérêts, mais à la condition qu’ils ne mettent pas en péril l’ensemble du développement d’une ville à l’abri des regards de l’opinion publique. À eux de trouver un équilibre et un compromis acceptable. Au port autonome d’arbitrer selon l’intérêt général du port, aux élus de rappeler les attentes des Havrais.

Par le passé, les Havrais ont montré qu’ils étaient capables de faire fi de leurs clivages, je suis convaincu qu’ils sauront se réunir à nouveau. Aujourd’hui il y a urgence.

1) http://www.auhavre.com/blog

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