La présentation le 29 juin des chiffres de l’assurance transport par le président de la commission des assurances transports de la FFSA (Fédération française des sociétés d’assurance), Patrick de la Morinerie, montre que le secteur des assurances transports suit une tendance positive. En 2005, l’assurance transports a totalisé un chiffre d’affaires de 2,11 Mde, en hausse de 11,8 %. Le secteur des transports entre pour 1,2 % des primes collectées par l’ensemble des secteurs de l’assurance en France.
Tous les secteurs du transport progressent avec une mention particulière pour l’aviation et le spatial, qui augmentent respectivement de 12 % et 23 %, tandis que les corps maritimes voient leur chiffre progresser de 10 % et les marchandises transportées de 5 %.
Sur les facultés, qui intègrent l’ensemble des marchandises transportées quelque soit le mode de transport, la progression du chiffre d’affaires est en ligne avec celle du PNB mondial. "Nous sommes satisfaits de cette progression", indique Patrick de la Morinerie. Cette hausse des résultats financiers est liée à une parité entre le dollar et l’euro favorable aux sociétés françaises, mais aussi aux affaires réalisées par les sociétés françaises sur le marché asiatique et américain. Le président de la commission des assurances transports de la FFSA nuance néanmoins cette performance. Il estime qu’une grande partie des affaires ne sont pas assurées sur le marché français en raison des pratiques des exportateurs "qui privilégient les ventes FOB (free on board) ou départ usine aux dépens de ventes CIF (coût assurances et fret). En France, 40 % des exportations sont assurées en CIF contre 60 % en Allemagne". Une réalité bien dommageable pour les assureurs français qui tient principalement au poids de l’exportateur face au réceptionnaire. De plus, la rentabilité de cette branche d’activité doit s’apprécier sur une période de cinq ans en raison du temps nécessaire à clore les dossiers de sinistres. Ainsi, en 2005, le coût des cyclones qui ont ravagé le sud des États-Unis à l’automne, l’augmentation des valeurs assurées liée aux augmentations de capacité des navires et l’accumulation de marchandises dans les ports incitent les assureurs à la plus grande prudence. "Le ratio sinistre sur primes démarre positivement à 79 % (à chaque fois qu’un assureur perçoit 100 de prime, il en verse 79 au titre des sinistres, NDLR) mais compte tenu des sommes engagées à chaque événement, nous devons disposer de réserves financières importantes", continue Patrick de la Morinerie.
DE NOUVEAUX DÉFIS
Quant à l’assurance des corps de navires, elle atteint le chiffre de 264,8 M€, en hausse de 8 %. "Le marché français se place au troisième rang mondial derrière les Lloyd’s de Londres et le marché norvégien. Le marché japonais, qui rassemble 10,4 % de l’assurance corps dans le monde, traite principalement des navires sous son pavillon", explique président de la commission des assurances transports.
Fort de sa place, le marché français veut tirer profit de cette croissance avec une capacité de $150 millions, une sécurité financière et un paiement centralisé des sinistres par le Cesam (Comité d’études des sociétés d’assurances maritimes). Pour continuer sur cette tendance, les assureurs maritimes français doivent relever plusieurs défis pour l’avenir. En premier lieu, ils craignent un retour à une sinistralité fréquente en raison du manque d’équipage qualifié face au développement rapide des navires et à leur sophistication. "Nous souhaitons que les armateurs mettent en place de bons niveaux de formation des équipages pour éviter cet écueil", développe Patrick de la Morinerie. En outre, l’augmentation de la valeur des navires se traduit sur le montant des sinistres. L’année 2005 traduit cette tendance avec deux événements majeurs: l’incendie à bord duStar-Princess, navire de croisière de Carnival Cruise Line et l’incendie sur le Hyundai-Fortune. À eux deux, ces sinistres ont totalisé $ 100 millions. Enfin, la multiplication des catastrophes naturelles peut faire craindre une augmentation des coûts de réassurance.
DÉSACCORDS AVEC L’EUROPE
Lors de la présentation des résultats de la commission transports de la FFSA, le président de la commission a rappelé les positions de la fédération sur les nouvelles propositions liées à la sécurité maritime. Le troisième paquet de mesures, présenté par la Commission européenne, n’a pas l’entière approbation des assureurs français. Ces derniers acceptent sans réserve les dispositions touchant au contrôle du respect des normes internationales par l’État du pavillon, la responsabilisation des sociétés de classification, le renforcement du rôle de l’État du port et l’amélioration du suivi du trafic. La proposition sur les garanties financières est plus difficile à admettre. Les assureurs de la FFSA sont en désaccord avec la disposition du projet de directive qui prévoit le doublement du plafond fixé par la convention de 1996 (LLMC (Limitation of liability for maritime claims). Cette disposition européenne prévoit que le propriétaire du navire doit constituer une réserve supplémentaire lorsqu’il se voit refuser le principe de la limitation de responsabilité, à savoir dès qu’il a commis une faute intentionnelle ou inexcusable. Ces fautes sont exclues des contrats d’assurance commerciaux et des P & I Clubs."Dans cette hypothèse la garantie est délivrée par un organisme financier, à l’image de ce qui se pratique aux États-Unis dans le cadre de l’Oil pollution Act. Ne serait-ce pas encourager une certaine déresponsabilisation des propriétaires de navires "sous normes" qui obtiendraient une telle garantie?", s’interroge Patrick de la Morinerie.
L’assurance française se porte bien, mais pourrait facilement basculer vers les fonds abyssaux si une telle mesure venait à entrer en vigueur en Europe.