Le musée de la Marine organise, à Paris jusqu’au 2 octobre, une exposition de photos prises en mer Rouge par Henry de Monfreid, célèbre aventurier et écrivain des années trente.
L’exposition en sous-sol dans la salle Nemo est émaillée de citations de Monfreid. La première situe le personnage: "J’ai toujours voulu aller vers l’inconnu, faire une chose qui me plaît dans la vie libre, que seule on trouve à la mer". Fasciné par elle dès l’enfance, il rêve de devenir capitaine au long cours. Il obtient son brevet en 1917… à 38 ans! Mais il navigue déjà depuis six ans sur les boutres de mer Rouge et a tâté divers métiers: négociant en café, vendeur de vin, de perles et de peaux de bêtes et même trafiquant d’armes. Il vit avec les indigènes, se convertit à l’Islam et se fait appeler "Abd-el-Haï" (l’esclave du vivant). Il ne coupe pourtant pas les ponts avec l’Europe et, en 1913, épouse une grande bourgeoise prussienne, fille du gouverneur de l’Alsace-Lorraine alors allemande. Pendant la première guerre mondiale, il passe quelques mois en prison à Djibouti pour trafic d’armes et infraction au code des Douanes. Dispensé du service armé, il est chargé de faire de l’espionnage contre les Turcs et en profite pour transporter des travailleurs et vendre en Egypte le haschish qu’il achète en Inde. Il connaît tous les recoins de la mer Rouge: Massawa, Assab, Rakhamat, les îles du Farsan et du Dahalak, Seguid, Tadjourah, Mukallah et Djibouti. Pour faire partager aux autres ses expériences, il utilise un procédé nouveau: la photographie stéréoscopique (images en relief), très en vogue à l’époque. Il développe ses clichés sur place et les envoie à son père, rentier et peintre à ses heures qui vit les aventures de son fils par procuration. La famille Monfreid détient aujourd’hui plus de 700 clichés, dont 25 numérisés, agrandis et datant de 1910-1920 figurent dans l’exposition avec divers objets personnels.
En 1930, Henry de Monfreid rencontre Joseph Kessel, qui l’incite à écrire. Il aura passé en tout 32 ans de sa vie dans la Corne de l’Afrique sans avoir fait fortune mais son livre, "Les secrets de la mer Rouge" (1931), le rend célèbre. Il en écrira beaucoup d’autres mais n’entrera jamais à l’Académie française, malgré l’appui de Jean Cocteau… qu’il fournissait en opium!
L’aventurier, à qui un astrologue avait prédit en 1936 une mort violente, mourra dans son lit à 95 ans. Nul ne pouvait mieux le définir que lui-même: "N’ayez pas peur de la vie, n’ayez pas peur de l’aventure. Faites confiance au hasard, à la chance, à la destinée. Partez, allez conquérir d’autres espaces, d’autres espérances, le reste vous sera donné de surcroît."
Cent ans après Henry de Monfreid, son petit-fils Guillaume, architecte, expose également quelques croquis de la mer Rouge d’aujourd’hui. Enfin, la photographe Anne de Henning, elle aussi partie sur ses traces, présente 25 photographies noir et blanc.
En mer Rouge, Henry de Monfreid photographe
Paris, jusqu’au 2 octobre
Musée national de la Marine
Tél: 01 53 65 69 –