Il y a quelques jours, le second opérateur, alliance entre Terminaux de Normandie et AP Terminals (filiale d’AP Møller-Mærsk), a signé avec le PAH pour exploiter le futur Terminal Porte Océane (TPO). Premier coup de pioche d’ici quelques jours et premières escales avant la fin 2007. La signature de cette convention ne peut que lever les doutes quant à l’avenir de Port 2000.
Un bon "hub" multimodal
Le pari se gagnera maintenant à terre, dans les infrastructures de pré et de post-acheminement des conteneurs, et surtout dans la capacité du Havre à se forger une capacité logistique internationalement reconnue. L’affaire est en bonne voie depuis quelques années déjà avec des implantations de taille, comme le programme de plus de 100 000 m2 d’entrepôts, construit et loué à des logisticiens comme Gefco par Prologis, au parc du Hode. Après trois premières tranches de 32 000 m2 chacune, une quatrième, de la même surface, va sortir de terre.
De nombreuses autres opérations se multiplient ici ou là, à l’image de Katoen Natie, des 174 000 m2 d’entrepôts de Gazeley, de la mise en location, ces jours-ci, des anciens locaux de TC-Val (30 000 m2 sur un terrain de 140 000 m2), près de l’usine Renault-Sandouville, ou encore de l’aménagement de Normandie-Entrepôts, Parc logistique du pont de Normandie. C’est ici, dans le "PLPN", qu’un nouveau programme de taille "XXL" s’érigera dans les prochains jours. "C’est l’effet Port 2000", souligne un professionnel de la place.
Le promoteur Adim, spécialisé dans ce type d’opérations, lance un programme de 135 000 m2 (en lieu et place de l’ancien programme de 100 000 m2 d’Eiffage). Adim réalisera son parc par tranches de 20 000 à 25 000 m2. La commercialisation et la gestion seront ensuite assurées par une filiale de la Caisse d’Épargne spécialisée dans les activités logistiques internationales. Soixante-dix millions d’euros sont engagés dans cette opération qui veut être "l’offre la plus performante" dans le traitement des conteneurs. "Premier port pour le commerce extérieur et les conteneurs, Le Havre offre tous les avantages indispensables à la performance de toute supply-chain d’un hub multimodal de pointe. Le choix du Havre pour la réalisation sur près de 134 000 m2 de notre parc logistique locatif de classe A particulièrement adapté à la logistique conteneurs était par conséquent une évidence", explique Jean-Christophe Courné, le président du groupe Adim.
La première tranche de ce nouveau programme sera mise en service avant la fin de l’année. Pour le promoteur, il s’agit de prendre pied dans une place promise à une expansion certaine, dopée par la progression du transport maritime et les relations commerciales internationales. C’est également ce qui conduit le groupe Condigel à poursuivre ses investissements. Dans les prochains mois, l’entreprise, qui regroupe des filiales comme EFBS (Entrepôts frigorifiques de la Basse-Seine), Seafrigo ou Packgel, construira une nouvelle chambre froide avec une capacité de 16 000 palettes stockées à une température de − 20o. Le froid est une filière à part entière et Le Havre y tient aujourd’hui les avant-postes. Condigel, à lui seul, dispose de 220 000 m2 d’entrepôts froids.
Des coûts inférieurs aux concurrents
Il reste une difficulté de taille. Le Havre manquera rapidement de surfaces disponibles. Certes, le domaine portuaire peut encore accueillir des activités, mais les professionnels doivent maintenant réfléchir à s’éloigner du noyau portuaire pour implanter leurs activités. C’est ainsi que se développent de nouvelles zones, comme à Ethainhus (bientôt 42 000 m2 pour un trafic entre la Chine et l’Europe), à Saint-Jean-de-Folleville… Une récente étude du cabinet DTZ Consulting & Research pour Le Havre-Développement montre que 250 hectares sont disponibles à l’horizon 2008 dans un rayon de trente kilomètres. Soit dix fois plus qu’à Anvers, mais un peu moins qu’à Rotterdam, selon la même étude de benchmarking.
L’essentiel, à chaque fois, est d’être à proximité d’un axe routier, comme l’A 29. Le port mise aussi sur des projets envisagés à dix ou quinze ans, comme l’allongement du canal du Havre jusqu’au canal Le Havre-Tancarville. Il permettrait de drainer de nouveaux espaces connectés à la route et au fluvial. Être près d’un point de rupture de charges est aussi l’une des conditions pour réussir.
Quant au prix d’installation, Le Havre doit maintenant briser les idées reçues. Toujours selon DTZ, les terrains sont moins chers en Normandie que dans les deux grands ports nord-européens, principaux concurrents. En outre, pour dix mille mètres carrés d’entrepôts avec trente emplois, le coût d’exploitation serait, au Havre, inférieur de 17 % à celui d’Anvers et de 34 % à celui de Rotterdam.
Des effets sur l’emploi
Cinq mille emplois: c’est ce que devrait générer dans les quatre prochaines années le monde de la logistique grâce au développement des terminaux, notamment Port 2000. Le chiffre est cité par Jean-Louis Le Yondre, le président du syndicat des transitaires havrais. De tels objectifs sont évidemment significatifs dans un bassin d’emploi comme celui du Havre, dont le taux de chômage est traditionnellement deux à trois points au-dessus la moyenne nationale. “Dans la région, explique Jean-Pierre Lecomte, c’est dans la sphère de la logistique que la croissance d’emplois est la plus importante. Globalement, il faut savoir que les emplois portuaires ont progressé de 8 % entre 2000 et 2003 alors que l’ensemble de l’emploi grimpait de 2,2 % dans l’agglomération durant la même période. Il se confirme donc que l’économie portuaire, quand elle se porte bien, produit des richesses pour toute la région.”