Créée en 1988 et basée à Perth, sur la côte ouest australienne, la société passe aujourd’hui pour être "le" spécialiste de la construction de navires rapides à coque en aluminium, selon une idée de génie développée dès l’origine par son créateur John Rothwell, aujourd’hui encore patron du troisième chantier naval d’Australie. Plus de 200 mono et multicoques sont depuis sortis des hangars d’Austal pour sillonner les mers.
"L’innovation technologique au service de la qualité", résume John Rothwell pour expliquer la réussite de son entreprise. Un concept qui a immédiatement trouvé sa clientèle, puisque dès 1989, Austal réussissait à placer deux ferries destinés à réaliser la navette dans la baie de Hong Kong. Ce premier contrat de 16 millions d’€ (M€) lançait alors la société sur la voie royale, "et installait définitivement Austal dans le paysage de la construction navale australienne", se souvient Richard Williams, directeur des ventes du chantier.
L’ALUMINIUM, "LA SIGNATURE DE NOTRE SOCIETE"
Austal a démarré en se concentrant sur la construction et le design de ferries, de paquebots et de yachts de luxe pour milliardaires. En 1998, le chantier décidait également de s’installer sur le marché des petits pétroliers, tout en commençant à répondre à des appels d’offres militaires. Tous construits en aluminium, "puisque c’est la signature de notre société", reprend Richard Williams. Sept ans plus tard, la répartition du chiffre d’affaires a considérablement évolué. Exit d’abord les yachts de luxe. En 2002, Austal a en effet enregistré le seul exercice négatif de son histoire, plombé par la réalisation d’Aussie-Rules, le navire de plaisance construit pour le célèbre golfeur Greg Norman. "Nous avons perdu de l’argent sur ce dossier et j’ai alors décidé, en accord avec les actionnaires, d’abandonner ce marché certes lucratif mais terriblement exigeant et qui demande beaucoup de temps et d’argent pour réaliser une commande unique", explique John Rothwell. Les dernières commandes livrées, le secteur a définitivement disparu des activités d’Austal en 2004.
LE MILITAIRE, UN NOUVEAU MARCHÉ DÉRIVÉ DU CIVIL
Pour remplacer un marché qui pesait encore 25 % de son chiffre d’affaires en 2003, le chantier s’est alors tourné vers celui de la Défense. Austal avait déjà eu une première expérience en 1999, lorsque la Marine américaine lui avait commandé un roulier transporteur de troupes et de véhicules, très fortement inspiré des ferries civils développés par la société. L’année 2004 va ensuite marquer un tournant "et changer les priorités d’Austal", selon Nicole Vanpraag, responsable de développement de la société. La Royal Navy australienne choisit en effet pour la première fois de travailler avec le chantier de Perth, pour la réalisation de 12 patrouilleurs, dont 5 ont aujourd’hui déjà été livrés. La même année, Austal, adossé au géant américain, General Dynamics, répondait à un appel d’offres de la Marine américaine, pour la conception d’un trimaran multi-tâches: le Littoral Combat Ship ou LCS. Là encore avec succès, puisque la Marine américaine a confirmé en octobre dernier que le dossier General Dynamics/Austal avait été retenu pour la réalisation des deux premiers prototypes de 185 M€ pièce. Le gros lot pour les deux partenaires, qui pourraient avoir à livrer entre 50 et 100 navires, si le projet est confirmé par la suite."C’est un contrat potentiellement énorme pour Austal", confirme Nicole Vanpraag. Pour répondre aux exigences américaines, l’entreprise australienne a ouvert une filiale à Mobile Alabama, dont les installations ont été inaugurées en novembre dernier.
Fidèle aux vieilles recettes, Austal s’est appuyé sur son expérience dans le domaine civil pour convaincre les militaires. Le futur LCS découle ainsi du Benchijigua-Express, trimaran de 127 m de long, livré en 2005 à l’armement norvégien Fred. Olsen, pour travailler dans l’archipel espagnol des Canaries. "Le plus grand ferry jamais construit en aluminium", souligne avec une certaine fierté Richard Williams. Capable de transporter 1 300 passagers et 341 voitures, il a coûté près de 60 M€ à son propriétaire.
Si la montée attendue du secteur de la Défense devrait changer à terme les priorités d’Austal et réorienter son chiffre d’affaires, l’activité civile reste, à ce jour, largement majoritaire. En 2005, elle pèse encore pour plus de 117 M€ sur les 190 millions engrangés par le chantier. En plus du Benchijigua-Express, Austal a également livré l’année passée deux ferries à la société l’Express des Îles, qui opère dans les Antilles françaises. Le Gold-Express (446 passagers) et le Silver-Express (360 passagers) ont pris leur service fin 2005, au côté des Jade-Express et Opale-Express, livrés en 1999 à la filiale du groupe Bourbon, Antilles Trans-Express, rachetée en 2001 par L’Express des Îles. Un contrat d’une vingtaine de millions d’euros pour Austal, qui se félicite de voir revenir d’anciens clients. "C’est toujours une preuve de réussite pour un chantier naval", estime Nicole Vanpraag.