L’arrivée de CMA sur le marché algérien remonte à une dizaine d’années. En 2005, la compagnie y a déchargé près de 120 000 EVP; 45 000 EVP en sortie d’Europe et 75 000 EVP via la plate-forme de transbordement de Malte.
Environ 65 % des volumes passant par Malte, proviennent d’Asie. D’un certain point de vue, ce trafic évite ainsi les transbordements dans les ports ouest-méditerranéens, plus chers et pas nécessairement plus efficients.
À l’export d’Algérie, les résultats sont plus modestes avec 2 500 EVP; ce qui constitue une constante durable, depuis une bonne trentaine d’années.
Toujours est-il qu’ainsi, CMA CGM estime être le premier transporteur maritime conteneurisé de l’Algérie, note avec une certaine fierté Philippe Borel, ancien officier de marine marchande, et surtout directeur des services Nord-Afrique chez CMA CGM.
Depuis la libéralisation de l’économie algérienne, les centres de décisions d’achat se sont atomisés: finis les grands appels d’offres pourtant sur des milliers de tonnes de poudre de lait, de butter-oil et autres œufs arrivant par wagons en voies des quais de Marseille. Depuis au moins cinq ans, de multiples acheteurs privés achètent de petites quantités conteneurisables, qui plus est en 40’; un équipement qui était presque inconnu en Algérie.
À tel point qu’environ la moitié des 120 000 EVP est constituée de 40’.
La compagnie marseillaise a fait ce qu’il fallait pour développer le marché européen, notamment en "offrant" un délai de transport très court via Marseille au prix de dessertes longues en sortie de Hambourg, Rotterdam, Anvers ou Le Havre. En effet, depuis 2000, des navettes ferroviaires descendent du Nord vers le Sud pour alimenter l’escale de Marseille. Le client, en général un commissionnaire de transport, payant le fret et le positionnement sur la base d’un embarquement au Nord. La répartition des boîtes venant des différents hinterlands est "confidentielle", répond Philippe Borel.
Autre constante: l’engorgement du port d’Alger. En attendant une éventuelle réorganisation du port, structurellement saturé pour diverses raisons, CMA CGM a construit un port sec il y a quatre ans qui s’étend aujourd’hui sur 8 ha, ceinturés d’un mur de 8 m de haut. Près de $ 6 millions y ont été investis en terrains, bureaux, restaurant d’entreprise, système de protection vidéo, scanner de conteneurs, etc. Situé à environ 38 km du port d’Alger, ce terminal sec est placé sous la responsabilité des Douanes algériennes qui y ont délégué 25 agents; la compagnie employant environ 35 personnes.
Pour faire bonne mesure, elle dispose également depuis deux ans, de sa propre société de camionnage dotée d’environ 45 châssis squelette et 40 tracteurs. Ce transporteur achemine, par convoi de 25 remorques, les conteneurs entre les quais d’Alger et le port sec, et, selon le choix du réceptionnaire, assure le post-acheminement. Elle devrait doubler son parc d’ici à deux ans.
Last but not least, à l’occasion de la venue en France du ministre algérien des transports, CMA CGM et la Société nationale algérienne des transports ferroviaires ont signé un protocole (1) d’accord pour créer une structure commune chargée d’assurer la distribution des conteneurs par voie ferrée entre les grandes villes du pays (voir encadré p. 20). Deux trains complets de conteneurs vides ont servi de test positif, notamment entre Alger et Bejaia. L’accord définitif devrait être signé avant cet été. Le trafic devrait porter sur environ 10 000 EVP d’ici à deux ans.
Tunisie: 1er transporteur
Avec une population représentant le tiers de celle d’Algérie (2), la Tunisie constitue le 2e marché de CMA CGM au Maghreb: 21 000 EVP déchargés; 6 000 EVP pleins chargés. Grosso modo, la compagnie a "saturé" le marché, en y occupant la 1re place.
Maroc: de grandes marges de progression
En 2005, CMA CGM a débarqué au Maroc, près de 37 000 EVP dont 16 000 venaient d’Europe. Les 40’ y sont majoritaires. À l’export, la compagnie a chargé de l’ordre de 5 500 EVP pleins. Elle estime occuper la 3e place des compagnies desservant le Royaume chérifien et ses 30 à 31 millions d’habitants. Ce qui laisse une certaine marge de progression.
Libye: booming
Redevenue fréquentable depuis quelques années, la Lybie et ses six millions d’habitants bénéficient d’une attention certaine de la part de la compagnie, entre autres: via Malte, elle y a déchargé près de 22 000 EVP.
Tous les ports libyens, ou presque, sont touchés chaque semaine: Benghazi, Misurata, Holms et Tripoli. CMA CGM estime occuper la 2e place des transporteurs maritimes.
Sudcargos pour compléter l’offre
Avec la fin des conférences fermées qui liaient la France à l’Afrique du Nord et la percée de CMA localement, quel était donc l’intérêt de racheter Sudcargos, devenu un opérateur de navires affrétés?
Avec ses 39 000 EVP déchargés au Maroc, en Tunisie et en Algérie, ses 18 000 remorques et ses 51 000 t de marchandises diverses conventionnelles, Sudcargos est un acteur important de la zone, répond, enthousiaste, Philippe Borel, présentant un réel savoir-faire, notamment en ro-ro. "Nous proposons ainsi une palette complète de services maritimes à nos clients." La marche vers le roulier avait commencé avec le rachat de Delom, armement qui vient d’être fusionné avec Sudcargos. La prise de participation dans le terminal public de Tanger Med s’explique par la nécessité de trouver à l’Ouest le pendant de la plate-forme de transbordement de Malte. À Tanger, les services de Delmas et ceux Est-Ouest de CMA CGM pourront être connectés, ajoute Philippe Borrel. Il reste alors à expliquer la prise de participation dans le terminal d’Almeria, dans le Sud-Espagne (JMM 10-3-2006, p. 11).
1) Toujours impatient, le service de presse du cabinet de Dominique Perben n’avait pas fait la distinction entre un protocole et un accord (JMM du 17-2-2006, p. 4).
2) En gros, un peu plus de 10 millions contre environ 33 millions.