Le Mistral: un bâtiment militaire et humanitaire

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Construit aux normes civiles et classé au Bureau Veritas, le bâtiment de projection et de commandement (BPC) Mistral a été remis à la Marine nationale le 27 février. Le 9 mars, il a été présenté pour la première fois à la presse en pleine mer au large de Hyères et avec la participation du vice-amiral d’escadre Philippe Sautter, commandant la Force d’action navale.

Le projet BPC, dont DCN a assuré la maîtrise d’œuvre, porte sur les deux bâtiments Mistral et Tonnerre et a coûté 600 M€, développement compris. Les standards civils ont permis de réduire les coûts de 25-30 % par rapport aux transports de chalands de débarquement (TCD) Foudre et Sirocco, mis en service en 1990 et 1998 et presque deux fois plus petits que les BPC. Les études et constructions ont été partagées entre DCN (Brest) et les Chantiers de l’Atlantique (Saint-Nazaire). L’équipementier électronique de défense et de sécurité Thales a réalisé le système de communication et DCN l’intégration des systèmes de combat. Aujourd’hui, le Mistral a terminé ses essais industriels et entreprend un stage de six mois de vérification de ses caractéristiques militaires pour ses diverses missions: aéromobilité, amphibie, hôpital et accueil d’un poste de commandement interarmées et interalliés.

AÉROMOBILITÉ ET AMPHIBIE

Le Mistral se présente d’abord comme un porte-hélicoptères. Le 9 mars, un NH 90 (10,6 t à pleine charge), futur aéronef des forces navales européennes, s’est pour la première fois posé trois minutes sur le bâtiment, placé face au vent et en positionnement dynamique. Le hangar aviation de 1 800 m2, sous le pont d’envol, peut accueillir 10 NH 90 et 6 Tigres de l’Armée de terre. C’est en effet pour elle qu’a été conçu le BPC. Une équipe de pont d’envol issue de ses rangs est en cours de formation. L’ascenseur arrière peut sortir un hélicoptère rotor déployé et non plus replié comme sur les bâtiments des générations précédentes. Chacun des six spots correspond aux caractéristiques des divers hélicoptères en service dans l’OTAN. Le spot No 1 à l’avant a été renforcé pour recevoir le Super Stallion (33,3 t) et le futur aéronef combiné V 22 Osprey (24,9 t) américains. En cas de chute d’un aéronef en mer à proximité, des drômes (canots pneumatiques) sont mis à l’eau en 30 secondes pour lui porter secours. Sous le hangar aviation, celui des camions, chars et véhicules blindés ressemble au pont garage d’un roulier civil avec marques au sol (ligne axiale blanche et stop). Les véhicules peuvent embarquer ou débarquer par mer à bord de quatre chalands de transport de matériel (CTM) de 100 t de fret en moyenne. Ceux-ci entrent dans le radier immergé ou, s’il faut aller vite, abaissent leur porte avant à la hauteur du radier à sec. Le flux des troupes avec leurs matériels est ainsi réduit à 1 h 30 et s’accompagne d’une noria d’hélicoptères (trois en l’air en même temps). Une opération amphibie utilise la mer comme espace de transport et de manœuvre. Le BPC permet ainsi de prépositionner des troupes en mer dans des zones de crise pendant trois mois. Pour durer à la mer, il faut donc des logements confortables (postes à 6 et chambres doubles et individuelles avec sanitaires), un espace de détente (jeux de réseaux internet) et un salle de sports équipée pour éviter que les troupes ne perdent leur entraînement physique. Leur zone vie est même configurée en "quartiers", comme dans les cantonnements de l’Armée de terre. D’ordinaire sur un bâtiment, les armes portatives sont entreposées dans l’armurerie. Mais comme un fantassin ne doit pas se séparer de son arme individuelle, celle-ci est verrouillée sous son lit. "C’est le bateau interarmées par excellence", précise l’amiral Sautter.

CENTRE HOSPITALIER

Le Mistral est un véritable hôpital de campagne pluridisciplinaire. Il doit être capable d’intervenir lors d’une catastrophe naturelle, (tsunami en Asie du Sud) ou pour évacuer des réfugiés (crises de Timor et de Sierra Leone). Une vingtaine de locaux hospitaliers s’étendent sur 850 m2 avec 69 lits "médicalisés", soit la capacité de la ville de Briançon. Cette surface peut être agrandie en installant des moyens médico-chirugicaux modulables (shelters) dans le hangar aviation, soit 100 personnels médicaux et 100 lits de patients de plus. Les deux blocs opératoires sont équipés pour la télémédecine. Une caméra placée dans le cyalitique (éclairage au-dessus de la table d’opérations) permet à un chirurgien spécialisé de conseiller, depuis la terre, le chirurgien généraliste du bord.

Le personnel de santé, composé en permanence d’un médecin et de deux infirmiers, peut monter à une dizaine de personnes selon les missions avec l’embarquement de deux chirurgiens anesthésistes et leurs aides. Un cabinet dentaire et un laboratoire de biologie médicale complètent l’équipement du BPC.

Le traitement de déchets hospitaliers se fait à bord. Il est possible d’embarquer un scanner. La salle de tri des blessés et de "déchocage", et celle des grands brûlés (3 lits) donnent sur le hangar aviation, dont les portes étanches de séparation peuvent résister de 30 à 60 minutes au feu. Dans toutes les coursives, un système de détection de fumée déclenche automatiquement une pluie d’eau. Les câbles sont apparents pour faciliter les réparations techniques. Le personnel est équipé de combinaisons avec des bandes réfléchissantes au niveau des épaules et des mollets ainsi que d’une étiquette avec le nom de la personne et… son groupe sanguin!

PC FLOTTANT

Le Mistral a été conçu dès le départ avec une zone de poste de commandement modulable de plus de 850 m2. Pour la mise en œuvre de systèmes d’information et de commandement complexes (liaison pour données tactiques L16), plus de 150 prises pour postes informatiques sont destinées à trois types d’état-major: conduite d’opérations amphibies; commandement de composante maritime; commandement interarmées. "C’est un bateau-base pour commander une grande opération interalliée à la mer, a déclaré l’amiral Sautter, ça va de pair avec le retour de la France dans l’OTAN pour les opérations de réaction rapide. (…) C’est un PC en mer comme à Paris. C’est aussi une base aérienne et il n’y a pas de problèmes diplomatiques car il se trouve dans les eaux internationales." Toutefois, une projection amphibie composée des TCD Foudre et Sirocco et des BPC Mistral et Tonnerre ne serait envisagée que dans le cas d’une crise limitée. Cela ne remet donc pas en cause le principe de forces prépositionnées hors du territoire national. Sur le Mistral, le système de direction de combat est dérivé du Senit 8 du porte-avions Charles-de-Gaulle, mais son PC est plus grand. Il y a même une salle de presse de 9 postes à bord!

Bien entendu, ce bâtiment ne se déplace jamais sans l’escorte d’un sous-marin et d’une frégate de défense aérienne.

ÉQUIPAGE RÉDUIT

Le Mistral sera armé par 160 personnes, contre 218 sur les TCD. Actuellement pendant le stage de validation, il n’y en a que 130 dont 14 femmes. La passerelle panoramique aux normes civiles permet de réduire le personnel de permanence à quatre personnes: le chef de quart, son adjoint et deux veilleurs. Le commandant dispose de son siège réservé à bâbord. Enfin, le Mistral doit être opérationnel 350 jours par an.

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