Le code du travail universel pour les gens de mer est adopté par l’OIT

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L’Organisation internationale du Travail (OIT) a adopté par 314 voix pour, aucun vote contre et seulement 4 abstentions la Convention sur les normes du travail maritime qui représente un instrument juridique mondial intéressant les 1,2 millions de marins dans le monde, les armateurs et les nations maritimes du monde entier. Cette adoption est intervenue à l’issue de la dixième session maritime de la Conférence internationale du Travail qui s’est tenue du 7 au 23 février 2006 à Genève. La Commission européenne a appuyé le processus depuis l’origine. Elle compte désormais soutenir la mise en œuvre effective de la Convention dans l’Union européenne.

"La Convention permettra d’éliminer les situations scandaleuses que connaissent trop de marins dans leurs conditions de travail. Elle rendra plus équitables les conditions de concurrence pour nos entreprises de transport maritime", a déclaré Jacques Barrot, vice-président en charge des transports, à la clôture de la Conférence. "Il est essentiel qu’elle entre en vigueur le plus rapidement possible, sachant aussi que de meilleures conditions de travail à bord sont susceptibles d’attirer plus de jeunes gens et de réduire significativement les sources d’accidents maritimes", a-t-il ajouté.

Quelque 1 135 délégués, représentant les gouvernements de 106 pays, les employeurs et les travailleurs de 100 des 178 États membres de l’OIT, ont participé aux négociations engagées depuis 2001. Cette "Convention du travail maritime consolidée" rassemble et met à jour plus de 65 normes internationales du travail maritime adoptées depuis la fondation de l’OIT en 1919.

La Convention, qui s’appliquera au transport maritime international, régit des sujets essentiels tels que les conditions d’emploi et de travail des marins englobant la santé, la sécurité, l’âge minimum, le recrutement, les horaires de travail, le logement à bord, la protection sociale, ce afin de garantir des conditions de travail et de vie décente à bord des navires.

Pour sa mise en œuvre, elle requiert des États du pavillon qu’ils mettent en place un régime d’application solide, s’appuyant sur un système de certification et sur des inspections périodiques. Les États délivreront un certificat aux navires qui arborent leur pavillon, une fois que les autorités compétentes auront vérifié que les conditions de travail à bord respectent les lois nationales et les réglementations découlant de la Convention.

La Convention a également pour but de prévenir la concurrence déloyale par le biais d’une clause "de traitement pas plus favorable" empêchant que les navires d’un État n’ayant pas ratifié la Convention soient mieux traités que ceux qui battent pavillon d’un État qui l’aurait ratifiée.

Les navires des pays qui ratifient et qui offrent des conditions de travail décentes à leurs marins seront ainsi protégés contre une concurrence déloyale de navires sous normes grâce au système de certification qui en outre réduira les risques de longs délais liés à des inspections dans les ports étrangers.

LE "QUATRIÈME PILIER" DE LA RÉGLEMENTATION INTERNATIONALE

Cette Convention est considérée comme le "quatrième pilier" de la réglementation internationale pour un secteur maritime de qualité, complémentaire des conventions de l’Organisation maritime internationale telles que la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (Convention Solas), la Convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (Convention STCW) et la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (Convention Marpol).

La nouvelle Convention a été conçue de manière à éviter l’écueil d’un faible niveau de ratification qu’ont parfois les Conventions existantes sur le travail maritime. Les conditions consensuelles de son élaboration et son caractère universel devraient favoriser une entrée en vigueur relativement rapide. Pour cela, la ratification de la Convention par 30 États représentant 33 % du tonnage mondial est nécessaire.

Consciente des enjeux importants de la Convention pour l’avenir du secteur maritime européen, la Commission a d’ores et déjà prévu dans son programme de travail 2006 d’explorer dans une communication la possibilité d’intégrer cette Convention en droit communautaire, y compris sous forme d’un accord entre partenaires sociaux dans le cadre du dialogue social.

En France, c’est Nicole Ameline, ambassadrice en mission chargée des questions sociales, déléguée du Gouvernement français au BIT, qui a commenté ce texte.

La CGT réservée

Dans un communiqué publié le lendemain de l’annonce des nouvelles règles sociales présentées par le BIT, la CGT des marins de Brest fait preuve de plus de circonspection: “Pense-t-on faire rêver 1 200 000 marins en leur annonçant qu’ils pourront travailler 14 h sur 24 pour un salaire mensuel de 418 €?” Elle se demande parallèlement, comment seront appliquées ces nouvelles règles “quand les contrôleurs dans les ports n’arrivent déjà pas, par manque de moyens et de pouvoir, à contrôler tous les navires suspects”. Selon la CGT, “pour que de véritables lois sociales soient appliquées pour tous les marins de toutes nationalités, il faudra l’imposer par la loi en responsabilisant l’État du pavillon des navires, les sociétés de manning, les armateurs et les affréteurs. Il faudra donc un certaine volonté…

Par ailleurs, le syndicat des marins trouve un peu naïve la position de Jacques Barrot, commissaire européen aux transports, quand il annonce l’application de ces mesures dans deux ans “alors que les conditions de vie des marins n’ont cessé de se dégrader en 30 ans…” Il constate en effet que le coût social des marins issus de l’Union européenne a baissé de 30 % pendant cette période alors que, dans le même temps, le trafic maritime progressait de 430 % en volume.

Un texte salué par Armateurs de France

Les armateurs français ont “salué avec enthousiasme” l’adoption de la convention du travail maritime de l’OIT.

“Le pari, lancé il y a quatre ans, de mettre sur pied un ensemble cohérent, consolidé et contraignant pour tous est gagné”, notent les armateurs français.

“Cette convention qui regroupe en un seul instrument l’ensemble des conventions et recommandations maritimes existantes a été adoptée à une écrasante majorité. Cette convention entre dans l’Histoire et devient un événement pour le monde maritime et pour l’Organisation internationale du Travail. Une fois encore, le secteur maritime montre la voie en matière sociale, conscient que son rôle majeur dans la mondialisation de l’économie ne peut rester sans règles de protection pour ses marins”.

En outre, Armateurs de France considère que cette convention “constitue une arme efficace pour lutter contre les navires sous-normes en apportant à tous les gens de mer l’assurance de conditions de travail décentes et notamment la possibilité pour l’État du port d’immobiliser un navire en raison de manquement de l’armateur à ses obligations sociales”.

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