États-Unis: touche pas à mes terminaux

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Un Britannique, un Danois, des Japonais, des Chinois, d’accord; mais pas Dubaï semblent vouloir signifier certains élus américains dans l’affaire de l’OPA amicale sur P & O par DP World.

Le rachat de Sea-Land et de ses terminaux par Mærsk avait fait quelques lignes dans les grands média américains. L’OPA sur P & O qui exploite des terminaux à New York, New Jersey, Baltimore, la Nouvelle-Orléans, Miami et à Philadelphie, a les honneurs de CNN, des chaînes de radio et des grands quotidiens.

Le 16, des sénateurs et députés des États de New York, du New Jersey et du Connecticut écrivaient au Secrétaire d’État au Trésor pour lui demander que le Comité sur les investissements étrangers aux États-Unis instruise complètement le dossier durant les 45 j. dont il dispose pour le faire. Rappelons que ce comité n’a pas émis d’objection à l’OPA (JMM de 17/2; p. 15) et a fait l’économie d’un examen détaillé de ses possibles conséquences sur la sûreté des biens et des personnes sur le sol américain.

Les élus américains rappellent le droit applicable en matière, notent qu’un conteneur sur 20 est physiquement inspecté sur le sol américain et souligne que Dubaï a été plusieurs cité fois dans des affaires de terrorisme. Le gouvernement américain pourrait s’opposer au transfert si ce dernier portait atteinte à la sûreté du pays.

Ils terminaient en rappelant que l’une des principales conclusions de la Commission nationale sur les attentats du 11 septembre 2001 était que "le most important failure was one of imagination".

Des élus de Californie ont rejoint leurs homologues de la Cote Est. Notons pour mémoire que Cosco, China Shipping et Yang Ming disposent de leur propre terminal à Los Angeles-Long Beach et sont contrôlées par des capitaux publics.

ASSOURDISSANT SILENCE EUROPÉEN

Dans la vieille Europe, ce débat ne semble pas exister. Faut-il ou non s’en réjouir? Il est vrai que depuis quelques années rien n’émeut l’Union européenne en matière portuaire, mis à part le projet de directive: Rotterdam a pour principal manutentionnaire de conteneurs le chinois Hutchison lequel contrôle les ports britanniques de Felixstowe, Harwich et Thamesport. Anvers a pour principal manutentionnaire de conteneurs PSA, société appartement au gouvernement de Singapour. En outre Antwerp Gateway Consortium était formé par P & O Ports, P & O Nedlloyd, CMA CGM, Duisport et Cosco Pacific.

En Gaule, c’est CMA CGM qui a fait entrer P & O Ports au Havre et à Marseille, un jour ou l’autre.

Un village portuaire important résiste victorieusement à "l’invasion extra-européenne" venue de l’Est, la Teutonie. Là-bas, on s’arrange entre Teutons; au pire entre gens du même monde: APM Terminals, par ex. Pour des raisons historiques, l’américain CSX World Terminals détenait entre autres un terminal en Allemagne. En décembre 2004, CSX World Terminals était vendu à DP World (1).

Bref, si les Européens ont gagné la bataille du transport maritime conteneurisé, ils semblent avoir perdu celle des terminaux portuaires, à l’exception notable du groupe AP Møller et dans un moindre mesure, de MSC, voire du couple Eurogate-Contship Italia qui allie le Nord et Sud-Europe pour le meilleur.

1) Quelques années avant, le même actionnaire américain cédait Sea-Land et la majorité des terminaux américains ou non utilisés par cette compagnie à Mærsk.

Pas de risque pour la sûreté en Grande-Bretagne

Le rachat de P & O par DP World (Dubai) ne met pas en péril la sûreté maritime de la Grande-Bretagne.

C’est qu’a déclaré le 17 février une porte-parole de TRANSEC, organisme chargé de la sûreté au sein du ministère des Transports. P & O possède des terminaux à Southampton et Tilbury.

D’autre part, un communiqué a annoncé le départ en retraite le 30 avril de Russ Peters, directeur général de P & O Ferries et membre du Conseil d’administration du groupe. Il sera remplacé par Helen Deeble, directrice des opérations de P & O Ferries depuis 2004.

Wanna Buy a Port

"We’re selling our harbours to an Arab government. Our biggest Internet companies are complicit in the Chinese governement’s censorship of information and suppression of dissidents. Welcome to American capitalism in the age of globalization". Ainsi commence l’article de Harold Meyerson paru dans le Washington Post du 22 février.

Il poursuit sur un ton qui rappelle celui du Monde Diplomatique… opposant la sûreté nationale et la liberté d’expression à la plus haute valeur nationale (purpose), la maximisation de la valeur pour l’actionnaire. Incroyable!

Les États-Unis en ébullition

Les gouverneurs, républicains, des États de NY et du Maryland (Baltimore) ont fait savoir qu’ils avaient demandé à leurs autorités portuaires d’étudier dans quelles conditions les baux de 30 ans dont bénéficient les terminaux exploités par P & O pourraient être révoqués à la suite du rachat par DP World. Cependant, le président de l’autorité portuaire de New York-New Jersey (NY-NJ, qui contrôle non seulement les ports mais aussi les aéroports, tunnels et ponts de la métropole) a indiqué qu’il lui semblait que ces baux ne pourraient être remis en cause que s’il y avait manquement factuel aux règlements de sûreté. Notons qu’à NY-NJ, P & O Ports exploite non seulement le Port Newark Container Terminal mais aussi un terminal de grands paquebots sur la rive Ouest de l’Hudson River, à Manhattan.

Rappelons qu’il y a un contexte politique spécifique au port de NY-NJ où les élus font face depuis les attentats du « 9/11 » à diverses associations de défense des intérêts des victimes et de promotion d’une meilleure sûreté dans les moyens de transport publics (aérien, métro, ferries, etc.) et de fret. L’ancien président Jimmy Carter a déclaré estimer qu’il n’y a pas lieu de s’opposer a ce rachat dès lors que les autorités fédérales (Trésor et Sûreté intérieure) ont conduit de façon satisfaisante les enquêtes nécessaires. D’autres poids lourds de la politique ont réclamé plus de transparence de la part du gouvernement fédéral auquel ils demandent d’expliciter publiquement les raisons qui l’ont conduit à considérer que le contrôle de divers terminaux portuaires par une société d’État du golfe Persique ne constituait pas un danger pour la sûreté publique.

Parallèlement, on attend toujours le dépôt de divers projets de lois visant à empêcher ce rachat, dont l’un serait soutenu par la sénatrice de l’État de NY et probable candidate à la présidence, Hillary Clinton…

Il reste à démêler ce qui relève de l’agitation politique de ce qu’il est réellement pertinent de faire.

Des responsables de DP World auraient "déclaré anonymement" à certains journaux qu’ils ne comprenaient pas tout cette agitation sachant que les mesures de sûreté sont en fait conçues et aussi mises en œuvre par les agences fédérales (Customs & Border Patrol, Coast Guards, FBI) et locales (police) de façon identique pour tous les opérateurs de terminaux.

L’ambassade des UEA à Washington semble également s’activer discrètement, usant, sans doute, du bénéfice de ses relations anciennes avec la famille Bush et le vice-président D. Cheney (ex- président de la société de forages et services pétroliers Halliburton).

Le 21, le président Bush faisait savoir officiellement qu’il pourrait imposer son veto à toute tentative législative visant à empêcher DP World de prendre le contrôle de terminaux américains.

Notons également qu’à la mi-janvier David Sanborn, cadre dirigeant de DP World, fut nommé à la tête de la MarAd, Maritime Administration.

(Correspondance)

Dubaï: US $ 15 milliards dans le leasing aérien

L’émirat de Dubaï a annoncé le 19 février son projet de créer Dubaï Aerospace Enterprise (DAE) entreprise spécialisée dans le leasing d’avions civils ainsi que dans la construction et l’exploitation d’aéroports. Elle devrait y consacrer environ $15 milliards et répondre aux besoins des États voisins ainsi que ceux de l’Inde et de la Chine. Ces derniers ont en projet la construction de plus de 145 aéroports dans les dix prochaines années.

D’ici à quatre ans, une cinquantaine de gros porteurs devraient être achetés à Boeing et Airbus, précisait Rashid al-Malik, le directeur du projet.

Sans doute, n’y a-t-il pas de relations de cause à effet, mais il ferait bon voir des élus américains continuer à s’interroger sur la pertinence de l’arrivée de DP World dans les terminaux américains et se féliciter de l’augmentation du chiffre d’affaires réalisé par Boeing avec DAE; les deux groupes appartenant à l’Émirat de Dubaï.

Faisons un "rêve": DAE remporte l’appel d’offres internationales pour la privatisation d’Aéroports de Paris. Le Premier ministre en charge se félicite de l’excellent choix réalisée par la commission de privatisation? Il appelle à la mobilisation nationale qui commence par le yaourt français et passe par l’acier européen? Il se rend en grande hâte au chevet du canard sauvage tombé au champ d’honneur sur une piste de Roissy?

M.N.

France: un décret relatif à la sécurité des activités "d’importance vitale".

Présenté au conseil des ministres du 22 février, ce décret réforme le régime de vigilance et de protection des installations les plus sensibles pour la défense de la Nation et la sécurité de l’État.

Les opérateurs publics ou privés exploitant des établissements ou utilisant des installations et ouvrages dont l’indisponibilité risquerait de diminuer d’une façon importante le potentiel industriel militaire ou économique, la sécurité ou la capacité de survie de la Nation, ou dont la destruction ou l’avarie pourrait présenter un danger grave pour la population, sont tenus de coopérer à la protection de leurs établissements, installations ou ouvrages contre toute menace, notamment à caractère terroriste.

Le décret précise la notion d’opérateur d’importance vitale et identifie les secteurs d’activité d’importance vitale. Pour chaque secteur défini par le Premier ministre, une directive nationale de sécurité sera élaborée sous la responsabilité d’un ministre coordonnateur. Dans le cadre de cette directive, les opérateurs majeurs du secteur élaboreront des plans de sécurité couvrant leurs activités, puis des plans particuliers de protection de chacun de leurs points d’importance vitale.

Ce dispositif s’inscrit dans la logique du plan Vigipirate et des plans d’intervention associés. Il permet à l’État de s’assurer que l’ensemble des opérateurs désignés d’importance vitale prendront des dispositions cohérentes avec celles que le gouvernement aura lui-même arrêtées ou recommandées au niveau national. La réforme met l’accent sur une indispensable concertation entre l’État, les élus locaux et les opérateurs; à cet effet, est créé un comité national des secteurs d’activités d’importance vitale auquel participent des représentants des collectivités territoriales et des opérateurs d’importance vitale.

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