Le terminal ferry du port de Bloscon à Roscoff dessert trois lignes que se partagent deux compagnies maritimes. À sa ligne historique Roscoff/Plymouth, la BAI ajoute Roscoff/Cork alors qu’Irish Ferries dessert en saison d’été Rosslare en Irlande. Selon les statistiques de la CCI de Morlaix, les trois lignes réunies ont totalisé 626 493 passagers et 201 761 véhicules en 2005 pour 474 escales de ferries. Soit une baisse de 1 % en terme de passagers, de 2 % en véhicules et de 9 % en nombre d’escales. "On est dans des niveaux classiques et, en clair, Roscoff est un marché mature qui n’évolue plus de manière significative", résume-t-on à la direction de Brittany Ferries.
Un commentaire qui s’applique au trafic global. Car, les analyses ligne par ligne révèlent d’autres faits plus troublants. La liaison Roscoff/Plymouth est effectivement stable avec 477 188 passagers (− 1 %) et 158 488 véhicules (+ 1 %) En revanche, le tonnage fret a connu une augmentation de 17 % avec 9 400 camions transportés. L’explication avancée tient en deux noms: les Bretagne et Pont-Aven ont offert plus de capacités que celles offertes en 2004 par le Duc-de-Normandie et le Pont-Aven sur ce même terminal roscovite. "Les plus grandes capacités du Bretagne ont permis de répondre à la demande en fret", commente-t-on siège de l’armement breton.
Toujours l’effet Pont-Aven
Faisant longtemps quasiment jeu égal, les deux lignes sur l’Irlande confirment en revanche la tendance amorcée en 2004. Sur un total stable frôlant les 150 000 passagers et les 43 000 véhicules en 2005 (assuré par 66 rotations contre 60 en 2004), la BAI se détache en effet de manière très significative: 86 682 passagers et 24 044 véhicules sur Cork pour Brittany Ferries contre 62 623 passagers et 19 257 véhicules pour Irish Ferries. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: Irish Ferries perd du terrain depuis deux ans dans un paysage global lui-même changeant.
D’abord, force est de constater un inversement des flux. "Autrefois, on comptait 55 passagers irlandais pour 45 passagers français sur Roscoff/Cork, explique-t-on à la BAI, aujourd’hui, la proportion d’Irlandais s’est nettement renforcée et a fait passé le ratio à 65-35." Révélateur de la forte évolution économique et sociale irlandaise, ce constat n’explique pas pour autant la relative désaffection de la ligne desservie par Irish Ferries. À première vue, elle pourrait venir du Pont-Aven à lui seul qui a été mis en ligne plus tôt et n’a pas connu les défaillances techniques rencontrées en 2004. Mais pour de fins analystes, le problème est d’une autre nature. "Le marché global des ferries reliant l’Irlande à la France se tasse, explique l’un d’eux, et dans ce marché global en déclin – c’est quand même la patrie du low cost aérien Ryan Air – Irish Ferries a cassé ses prix de 30 % après avoir remplacé ses marins irlandais par des marins des pays de l’Est. De plus, avec son Normandy, la compagnie irlandaise a un navire décalé par rapport au Pont-Aven.
D’où la réflexion cruciale: si la compagnie irlandaise n’avait pas autant cassé ses prix, elle aurait sans doute encore davantage souffert."
En résumé, dans un marché tassé et fragilisé par la concurrence du trafic aérien à bas prix, Brittany Ferries tire très bien son épingle du jeu dans les liaisons France/Irlande.