Pour le port du Havre, l’un des acteurs historiques des liaisons transmanche, l’année 2005 aurait pu être fatale. L’annonce en novembre 2004 par le groupe britannique P & O Ferries de l’arrêt de ses liaisons sur la Manche Ouest ouvrait une période d’incertitude quant à la pérennité de la ligne Le Havre/Porsmouth.
L’année 2005 aura été certainement l’une des plus difficiles dans l’histoire des relations transmanche du port du Havre. Elle s’ouvrait en effet sur la perspective de l’arrêt à l’automne 2005 du service de P & O. Trois fois par jour, la compagnie offrait des départs sur Portsmouth, une ligne assurée par les deux grands ferries Pride-of-Le-Havre et Pride-of-Portsmouth de 1 600 passagers et 575 voitures ou 110 camions de capacité. Mais l’arrêt du service de P & O Ferries était tempérée par la perspective de l’arrivée annoncée de Brittany Ferries. Malheureusement, fin février-début mars, la compagnie faisait part de sa renonciation à ce projet. En mars 2005, le Port autonome du Havre commentait cette annonce en soulignant que "les conditions actuellement difficiles du marché transmanche, ainsi que l’âpre concurrence, ont été mises en avant par les responsables de Brittany Ferries auprès du président du PAH pour expliquer cette décision".
LD Lines sauve la ligne
Compte tenu de la qualité des installations havraises pour le traitement de cette activité, des possibilités de synergie avec d’autres trafics et de la facilité des accès routiers, les havrais se sont mis en quête de trouver alors un nouvel opérateur pour maintenir le lien transmanche. "Le Port autonome du Havre a engagé un véritable plan de bataille en étroite coordination avec la Ville du Havre et la CCI", expliquait le port en juin. Dans ce contexte, un appel à projets est alors lancé pour la reprise de la liaison.
Finalement, c’est à la mi-septembre qu’est confirmée la venue du groupe français Louis Dreyfus au travers de sa filiale LD Lines, compagnie maritime spécialisée dans le transport intra-européen de fret roulier et de passagers. "Avant de nous lancer, nous avons procédé à une analyse du marché", explique Antoine Person, secrétaire général de Louis Dreyfus Armateurs. "Nous avons pensé qu’il y avait une place pour un service présentant un confort acceptable, privilégiant les sièges Pullman." Le service LD Lines propose donc un transport de qualité, permet de maintenir une diversité de l’offre sur le transmanche et conforte l’activité des deux ports terminaux.
Le nouveau service de LD Lines a été inauguré le 3 octobre 2005. Le Norman-Spirit est déployé sur la ligne; cette unité mise en service en 1992 a une capacité de 900 passagers (650 en sièges Pullman et 250 en cabines) et 1 750 mètres-linéaires pour le fret (700 voitures ou 100 camions). Le Norman-Spirit assure une liaison quotidienne avec un départ du Havre en fin d’après-midi (17 h) et un retour dans le port normand à 7 h 30. Ce navire a été choisi parce qu’il correspondait assez bien aux besoins du service. Bien entendu, par rapport aux trois départs quotidiens de P & O Ferries, la liaison LD Lines ne propose qu’un départ chaque jour. Le départ du soir a été retenu, étant celui qui connaissait la meilleure fréquentation. Au Havre, LD Lines emploie une vingtaine de salariés, issus de l’ancienne agence P & O.
Dès sa mise en service sur Le Havre/Portsmouth, le Norman-Spirit a été placé sous pavillon italien, son équipage étant constitué essentiellement de marins italiens, "en accord avec les législations européenne et française", souligne Antoine Person. À la suite d’un blocage du navire au Havre en décembre 2005, l’armement a décidé de transférer au plus tard en septembre 2006 son navire sous pavillon britannique avec un équipage majoritairement britannique. Aujourd’hui, l’objectif de LD Lines est d’être "à l’équilibre pour sa première année d’exercice". Quant à de nouvelles liaisons en dehors du Havre, elles ne sont pas pour le moment à l’ordre du jour.
Ajoutons que pour l’ensemble de l’année 2005, la fréquentation passagers du port du Havre a sensiblement progressé. Au total, il a été dénombré 679 000 passagers contre 630 600 un an plus tôt, soit 7,7 % de progression.