Le 31 janvier, vers 3 h, peu avant l’entrée du rail montant des Casquets, le minéralier maltais General-Grot-Rowecki (1985; 21 navigants) rattrapant, et le chimiquier des Îles Marshall Ece (1988) sont entrés en collision. Ce dernier a immédiatement signalé une voie d’eau. A 7 h, sa gîte était de 15o bâbord; puis de 25o stabilisée au moment de l’évacuation de son équipage. Les 22 navigants arrivaient sains et saufs à Guernesey: 16 par hélicoptères britanniques; les autres par un canot de sauvetage de Guernesey. Avec une brèche de 5 m de haut sur 2 de large au milieu de sa coque, il a finit par couler par 70 m de fond le 1er février à 3 h 37 par 49 o43.7 N et 3o15.4 W, à environ 16 nautiques à l’Ouest de l’entrée de la voie montante du dispositif de séparation du trafic des Casquets. La pêche, la plongée sous-marine et les activités nautiques ont été interdites dans un rayon d’un mille autour de cette position, où reposent maintenant 10 000 t d’acide phosphorique marocain.
Selon le Cedre (1), ce produit plus dense que l’eau, y est parfaitement soluble. Il ne présente pas de risque pour l’environnement sauf en cas de forte concentration (ce qui sera probablement le cas si se produisait une rupture massive de cuves). L’acide n’est pas bio-accumulable par les organismes vivants.
Après inspection par un expert français, le minéralier maltais chargé de 26 000 t. de phosphate marocain a été autorisé à poursuivre sa route vers Police, en Pologne.
Le plan d’urgence franco-britannique qui associe également la Belgique et l’Irlande, a été déclenché afin de faciliter l’organisation de l’action en cas de sinistre majeur.
L’ampleur de ce dernier va fort probablement se jouer en fonction du débit des futures fuites de cargaison: jusqu’à 25 m3/h, l’acide sera rapidement neutralisé d’autant que les courants sont forts dans cette zone, estime le Cedre. Au delà, c’est "à voir".
24 H. D’ACTIVITÉ SOUTENUE
Le 31, vers 7 h., l’Abeille-Liberté était sur la zone de la collision. Une équipe d’évaluation française était hélitreuillée vers 9 h 30: une personne déposée sur le vraquier pour constater les dégâts; trois autres à bord de l’A-Liberté pour s’occuper du chimiquier en route vers Gand.
Plusieurs bâtiments des administrations françaises étaient également sur zone, notamment pour éviter les suraccidents. Le pétrolier Nordic-Freedom était prêt à porter assistance.
Après deux plongées d’inspection qui ne constataient aucune pollution, le chimiquier était pris en remorque vers 15 h 30 en direction de la baie de Somme; l’idée étant de le mettre à l’abri au Havre.
Sa gîte s’accentuant, il coulait quelques heures plus tard.
Les raisons de la collision ne sont, bien sûr, pas encore déterminées mais la probabilité d’une erreur humaine est forte: venant tous deux du Maroc en direction de la mer du Nord, donc naviguant dans le même sens, les deux navires avaient une taille "significative": 198 m pour le rattrapant; 126 m pour le chimiquier; la visibilité était supérieure à 10 km, indique la préfecture maritime; et la mer "agitée" avec des creux de maximum 2,5 m et un vent de 20 nœuds. Des conditions a priori facilement "gérables".
Autre sujet d’intérêt: la séquence du naufrage. L’absence de déversement d’acide laisse supposer que ce sont les ballasts qui ont été envahis. Peut-on écrire que le double fond est donc d’une piètre utilité en cas de collision. Et la double coque?
1) Centre de documentation, d’expérimentation et de recherches sur les pollutions accidentelles des eaux.
La sécurité maritime: "une priorité pour le gouvernement".
Dans un communiqué semble-t-il hâtivement rédigé, D. Perben, ministre précisait qu’il avait demandé au BEAmer "de se rendre sur place". Où exactement Cherbourg? Guernesey? Police port de destination du probable navire abordeur?
De mauvaises langues suggèrent que l’administration maritime maltaise loue quelques m2 dans les vastes bureaux parisiens du BEAmer
Toujours à la demande du ministre, "un plan de modernisation des CROSS pour la période 2007-2009 est en cours d’élaboration pour poursuivre l’amélioration de la sécurité des gens de mer et de la navigation maritime". Avec son financement, bien sûr?