Devant un auditoire assez "pauvre" en chargeurs et d’une manière générale en entreprises privées, Pierre Karsenti, président du Comité des chargeurs maritimes français présenta le 14 décembre les vœux à court et moyen terme de ses mandants, lors des 1res assises de l’économie de l’eau salée (voir encadré).
Ainsi pour 2006 et au delà, Pierre Karsenti souhaitait-il que se poursuive la bonne organisation du transport maritime mais que l’on investisse à nouveau dans les services techniques des compagnies, dans la construction de navires, le suivi technique et l’entretien de ces navires. Le renforcement des investissements techniques comprend aussi les navigants. En début de son propos, Pierre Karsenti, par ailleurs directeur adjoint des transports maritimes chez Total (1), ne l’oublions pas, refusait que les futurs navires immatriculés au RIF soient armés par seulement deux ou trois navigants européens: "il faut maintenir les effectifs officiers", soulignait-il (2).
Dans une autre perspective, P. Karsenti, "plus vrac que ligne", demandait également la révision à la hausse de la limitation de responsabilité dont bénéficie le navire. Un vœu durable.
La bonne santé financière des armateurs et la bonne organisation du transport maritime devraient amener les transporteurs à renoncer au bénéfice du règlement 4056 sur l’exemption de groupe accordée aux conférences maritimes.
Relevant que le président de CMA CGM avait expliqué en public que sa compagnie bénéficiait d’une couverture à terme pour ses achats de combustible jusqu’en 2011 (JMM 23-12-2005, p. 4), P. Karsenti en concluait que ce transporteur comme les autres pouvait abandonner l’usage de la surcharge "bunker".
Une judicieuse modernisation des pratiques maritimes passerait également par l’abandon du recours au dispositif de l’avarie commune. En effet, dans la perspective (incertaine; N.D.L.R.) du développement des autoroutes de la mer (utilisant les rouliers), comment expliquer au transporteur routier, déjà perturbé par ce changement de mode d’exploitation, qu’il pourrait être appelé à contribuer au prorata de la valeur des marchandises qui lui ont été confiées, aux efforts consentis pour sauver le navire et ses marchandises?
Cela dit, le "patron" des chargeurs maritimes français se félicitait que les armateurs aient retrouvé les moyens financiers de proposer des services de qualité, après "vingt ans de souffrances". Tout le monde est content, l’armateur, ses actionnaires enfin correctement rémunérés, et ses clients. Cela devrait durer jusqu’en 2010 pour le pétrole brut; un peu moins longtemps pour les porte-conteneurs.
D’où l’urgence de ne rien faire en attendant, pourrait-on craindre…
1) Chargé des opérations maritimes, affaires portuaires et surestaries.
2) Il y a quelques mois, un transporteur de pétrole brut sous pavillon national avait le sentiment que Total développait une conception minimaliste du RIF: deux ou trois officiers, pas plus. Quelle heureuse erreur! Un groupe citoyen comme Total ne saurait se satisfaire d’une telle vision étroite; les autres non plus d’ailleurs, si on les "motive"…
Économie maritime et du littoral: un nouveau machin très tendance
Organisées par Les Échos Conférences et Le Marin et semble-t-il bien subventionnées par le contribuable (1) et par quelques entreprises largement dépendantes des pouvoirs publics et autres collectivités territoriales, les 1res assises de l’Économie maritime et du littoral se sont tenues à Paris le 14 décembre. Renonçant à définir lui-même le périmètre de l’économie maritime, le journaliste "introducteur de problématique" cita les paroles d’un élu du littoral: cette économie est celle qui disparaîtrait si la mer se retirait. C’est dire si le sujet est vaste et… homogène. Tout ce qui touche à l’eau salée (colonne d’eau, fond marin et sous-sol compris) formerait donc un tout cohérent qui gagnerait à agir en commun; on a du mal à s’en persuader mais tant de hauts fonctionnaires d’excellence, de hauts gradés et de p.-d.g. de groupes leaders sur leur marché, ne peuvent pas se tromper.
Les "déjà bien amortis" se souviendront peut-être qu’en mai 1994 le Conseil supérieur de la marine marchande présidé par Yves Marchand et le défunt Conseil national des Communautés portuaires animé par Jacques Dupuydauby organisèrent les 1res assises de la marine marchande et des ports maritimes sur un ferry de la BAI. Des grandes choses furent exprimées (JMM 20-5-1994, p. 1317 et suivantes; JMM du 27-5-1994, p. 1337). Qu’en reste-t-il?
Mais comme il n’est pas nécessaire de réussir pour continuer à entreprendre, que vivent les assises de l’économie de l’eau salée…
1) "Merci de bien vouloir me confirmer que le ministère des Transports participe à hauteur de 50 000 € aux frais des 1res assises de l’Économie maritime et du littoral qui se tiendront le 14 décembre. 45 000 € auraient déjà été versés". Cette question envoyée par courriel a bien été reçue, confirmait le secrétariat du service de communication du cabinet de D. Perben. Pas la réponse, pouvons-nous confirmer.