L’industrie pétrolière, dans son grand ensemble, vit une époque formidable. Depuis quelques années, le marché pétrolier est sur le qui-vive, dagues plantées les unes après les autres au cœur de ses marchés. Sans surprise, 2018 aura été une année pénible pour les transporteurs de produits pétroliers, qualifiée comme étant la pire de la dernière décennie par l’une des plus importantes « corporations » d’armateurs et propriétaires de flotte, la Baltic and International Maritime Conference (Bimco). La compagnie italienne de transport de produits pétroliers Amico International Shipping, est, à elle seule, tout un symbole, ayant enregistré un déficit de 55,1 M$ l’an dernier. Et le début 2019 a commencé sans réconfort. L’indice Baltic Dirty Tanker Index (BDTI), qui englobe 17 routes de transport de pétrole brut et de fioul lourd, n’a cessé de dégringoler, frôlant actuellement les abîmes à 617 points, son point le plus bas depuis août 2017.
Le transport maritime de pétrole brut doit en effet composer avec de nombreux vents contraires, matérialisés par des interrogations sur la robustesse de la demande de pétrole, les réductions de production de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), les livraisons attendues de pétroliers (dans la mesure où celles de 2018 avaient été reportées), les sanctions et embargos américains contre l’Iran et le Venezuela…
Malice
Néanmoins, les nouvelles règles de l’OMI régissant la qualité des combustibles de soute en 2020 ouvrent des perspectives, claironnent les analystes.
Morgan Stanley souligne que « cela commence à vraiment stimuler le marché des transporteurs de produits pétroliers, entraînant une hausse des taux et de la valeur des actifs des navires ».
Des esprits malicieux voient même dans la nouvelle réglementation une volonté de créer un débouché sur-mesure aux huiles de schiste américaines, qui ont en effet renversé la table en inondant de pétrole léger un monde jusqu’à présent régi par des pétroles lourds à faible coût.
Quoi qu’il en soit, les États-Unis s’apprêtent à franchir une nouvelle étape dans leur course à la puissance pétrolière. Dans deux ans, en 2021, ils deviendront exportateurs nets de pétrole et ils talonneront l’Arabie saoudite sur les marchés mondiaux, indique l’AIE.
La production américaine est à son sommet (12,1 Mb/j). Les observateurs voient dans le niveau de leurs exportations (3,60 Mb/j en février) le signe fort d’une demande en pétrole léger élevée dans le monde.
Une vague de rapports (Cleaves Securities, Drewry, Poten…) sortis en ce début d’année estiment en outre que les mutations en cours dans le commerce du brut pourraient profiter aux « trajets long-courrier » et aux VLCC, les plus récents pourraient voir leur prix augmenter de 44 % d’ici la fin de l’année selon Cleaves Securities. Les mega tankers, qui ont longtemps encombré les routes entre l’Extrême-Orient et le Moyen-Orient ou l’Afrique de l’Ouest, sont devenus les nouvelles mascottes du marché du brut.
Drewry estime que l’augmentation de la production américaine se traduira par une augmentation des exportations vers l’Asie, ce qui stimulera la demande en tonnes-milles pour les grands transporteurs de brut, et que les sanctions contre les grands producteurs de l’OPEP, soutiendront a fortiori la demande en tonnes-milles des grands transporteurs de brut.
Retrouvez l’intégralité de l’enquête sur
860 000
C’est l’estimation en barils/jour (bj) de la demande de combustible de soute non conforme en 2020, émanant des zones où le carburant conforme ne serait pas facilement disponible ou sous faible surveillance, selon Rystad Energy. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) l’evalue, elle, à 710 000 bj.