Le naufrage, sans victimes humaines mais non sans un impact environnemental certain (45 conteneurs contenant des matières dangereuses), du Grande America de l’armateur italien Grimaldi aurait-il été la goutte d’eau de trop ? Ou est-ce la concomitance des faits, avec ce début d’année au-dessus de la moyenne historique en termes d’avaries, et alors que les détails sur l’explosion du MSC Flaminia en juillet 2012 viennent d’être délivrés et que l’enquête est en cours sur l’incendie du Maersk Honan ?
Depuis quelques jours, ONG, experts et consorts se pressent à la tribune pour raviver les questions et les tensions qui émergent chroniquement à chaque incident : la perte de conteneurs en mer et les incendies restent deux problématiques engendrant chroniquement des accès de fièvre et des questions sur le traitement (incorrect) des marchandises dangereuses. La confusion des données nuit à une perception réaliste des risques et à « une attitude responsable en matière de responsabilité », entend-on. Les réglementations existent pourtant bel et bien. Les solutions aussi, mais le problème n’est jamais réellement traité.
« Un incendie majeur de porte-conteneurs en mer se produit en moyenne tous les 60 jours ». C’est avec cette phrase-choc que le TT Club, l’un des premiers assureurs mondiaux de l’industrie du transport et de la logistique, lance une campagne, que pilote Peregrine Storrs-Fox, directeur de la gestion des risques au sein de la mutuelle, visant ce qu’il appelle « l’intégrité du fret ».
Le TT Club vient par ailleurs de publier, en partenariat avec le Cargo Incident Notification System (CINS) et les 13 associations de souscripteurs qui composent l’International Group des P& I Clubs, un guide pour le transport du divinylbenzène (DVB) en conteneurs (notamment dans la perspective de l’entrée en vigueur des exigences modifiées du code IMDG).
Pour l’assureur international, 66 % des incidents liés à des dommages au fret peuvent être attribués à de mauvaises pratiques, certes dans l’arrimage, mais aussi et surtout, dans l’identification, la déclaration, la documentation et le partage d’informations. Le traitement des marchandises dangereuses (DG) serait un point particulièrement critique : « mal classées, étiquetées, emballées ou simplement mal identifiées ». ICHCA, l’association internationale des opérateurs de manutention, a calculé que sur les 60 millions de conteneurs transportés chaque année, 10 % sont déclarés DG. Et selon les inspections, 20 % seraient mal emballés ou mal identifiés, soit 1,3 million de conteneurs potentiellement instables transitant par les mers chaque année.
500 M$ par an
Le coût calculé de ces sinistres dans le secteur de l’assurance Marine Aviation & Transport (MAT) est estimé à plus de 500 M$ par an.
Selon les données de Cargo Patrol, un algorithme de profilage développé par Hapag Lloyd pour déceler dans son système de réservation les défauts de déclaration des marchandises, et extrapolées à toutes les lignes, il y aurait plus de 150 000 conteneurs chaque année entrant dans cette catégorie.
Le système de notification des incidents de cargaison (CINS), une initiative des compagnies maritimes lancée en 2011, aurait permis d’identifier un certain nombre de produits « qui posent souvent des problèmes pendant le transport et pas toujours limités à ceux qui sont officiellement considérés comme dangereux ».
« Il reste encore beaucoup à faire pour atteindre une véritable intégrité du fret. Notre campagne vise un changement culturel et comportemental important », ajoute Peregrine Storrs-Fox, qui estime que des mesures législatives et des inspections accrues seront nécessaires.
3 000 EVP
Les porte-conteneurs au tonnage inférieur aux 3 000 EVP sont les vedettes actuelles du marché de l’affrètement, tant et si bien que ce niveau d’activité a permis de réduire la surcapacité dans ces tailles, en particulier entre 1 500 et 2 900 EVP.