Selon une étude commandée par l'organisation internationale représentant armateurs et propriétaires de navires Bimco, seuls neuf chantiers navals, sur les 26 qui figurent sur la liste des installations de recyclage agréées de l'UE, sont opérationnels pour le recyclage des navires. Et seulement trois pourraient intervenir sur des navires de taille Panamax.
« La liste de l'UE est difficile à prendre au sérieux. J'ai appelé un de ces chantiers de recyclage il y a quelques mois, et ils n'avaient même pas encore commencé à construire le chantier, a déclaré Angus Frew, secrétaire général de l'une des plus représentatives associations internationales du shipping. La liste ressemble un peu au protectionnisme et désavantage clairement les armateurs européens ». Par là, l'organisation sous-entend une préférence européenne aux chantiers installés au sein des États membres.
Le règlement (UE) 1257/2013 du Parlement européen et du Conseil sur le recyclage des navires est entré en vigueur le 1er janvier 2019. Elle exige que les navires battant pavillon de l'UE soient recyclés dans les chantiers agréés figurant sur la liste de l'UE. Bimco soutient que les chantiers navals de l'UE seraient autorisés à figurer sur la liste sans remplir de critères uniformes, alors que les chantiers non communautaires doivent être inspectés par des auditeurs désignés par la Commission européenne selon des critères stricts.
8 chantiers ajoutés
Jusqu'à présent, hors CE, seuls deux chantiers turcs et un chantier américain ont été inclus. La Commission européenne vient d'annoncer son intention d'ajouter huit chantiers navals supplémentaires opérant au Danemark, en Norvège et en Turquie. Bimco a toujours plaidé pour les installations en Asie soient intégrées sous réserve qu'elles respectent les régles en matière de sécurité des travailleurs et de protection de l'environnement. Pour rappel, l'Inde, le Bangladesh, la Chine, le Pakistan et la Turquie assurent le démantèlement de 98 % du tonnage mondial, selon l'Organisation maritime internationale (OMI). Bimco voit une solution dans l'entrée en vigueur rapide de la Convention de Hong Kong, laquelle vise à garantir que les navires sont recyclés avec tous les égards pour les conditions de travail des employés et la perservation de l'environnement.
Selon l'ONG spécialiste des données sur le démantèlement des navires Shipbreaking Platform, 181 navires (principalement, des armateurs américains, saoudiens et singapouriens) ont été démantelés au premier trimestre de 2010 dont 142 vendus aux chantiers d'Asie du Sud-est. Entre janvier et mars, trois travailleurs ont perdu la vie et quatre ont été grièvement blessés, notamment au Bangladesh. Le démantèlement des unités pétrolières et gazières dominent. Au moins 12 actifs offshore ont atteint la fin de leur vie utile au cours des trois premiers mois de cette année. Transocean Ltd, basée en Suisse, est dans ce secteur l'entreprise qui a envoyé à la ferraille le plus grand nombre d'unités au cours de la dernière décennie.
Changement de pavillon
Plus de la moitié des navires vendus à l'Asie du Sud ce trimestre ont changé de pavillon au cours de leur dernier voyage vers le chantier de démantèlement afin de contourner la législation. Ce qui devrait alerter les autorités sur l'inefficacité de la législation, y compris celle de l'UE sur le recyclage des navires, indique l'association. Au moins cinq navires ont été démolis conformément aux nouvelles exigences.
« Le cas du porte-conteneurs Boxy Lady, propriété de la Greek Aims Shipping Corporation, illustre comment les armateurs contournent la loi ». En novembre 2018, Shipbreaking Platform a alerté les autorités espagnoles de l'exportation illégale imminente (au regard de la réglementation des déchets) d'un navire battant pavillon maltais du port de Vigo. En vain, le navire a été envoyé au Bangladesh, relate l'ONG. Aims Shipping Corp. aurait également réussi à contourner le règlement de l'UE sur le recyclage des navires, en changeant le pavillon du navire en Bahamas en décembre 2018, juste avant son échouage à Chittagong en mars.
« Le secteur des transports maritimes affirme qu'il est contraint de changer de pavillon en raison d'un manque de capacité sur la liste de l'UE. Un rapport publié en septembre 2018 a démontré que la capacité était plus que suffisante, tant en termes de tonnage qu'en taille des navires », réplique l'association pour laquelle « des efforts pour détecter les infractions à la législation européenne en matière de déchets et des incitations plus fortes sont nécessaires pour garantir une application correcte de la législation actuelle sur le recyclage des navires ».
La rédaction