Le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur de la réglementation qui a cadré la teneur en soufre des carburants marins à moins de 0,5 % contre 3,5 % auparavant, et pour tous les navires sur toutes les mers et océans. À l'intérieur des zones spécifiques d’émissions contrôlées ECA*, les limites étaient déjà plus strictes, à 0,1 %. Depuis, les émissions d'oxyde de soufre des navires ont diminué de 77 %, a souligné l’OMI à l’occasion de la « Journée internationale de l'air pur pour des ciels bleus » organisé cette année le 7 septembre sur le thème : « l’air que nous partageons ».
La modification de l'annexe VI de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (Marpol) avait alimenté bien des débats tout au long de l’année 2019, en amont de l’introduction, notamment sur sa pertinence et efficacité, anticipant une déroute totale qui n’a pas eu lieu. La flambée des combustibles de soute s’est produite par à-coups mais rien en comparaison des niveaux de volatilité atteints depuis l’invasion de la guerre en Ukraine. La disponibilité du fuel à très faible teneur en soufre (VLSFO) pour respecter la nouvelle limite n’a pas posé de problèmes particuliers et représente aujourd’hui les ¾ des ventes mondiales de carburants.
Des scrubbers, objets de discorde
La qualité était une autre préoccupation sachant que les raffineries sont autorisées à mélanger du fuel à forte teneur en soufre (non conforme) et à basse teneur en soufre tandis que des additifs peuvent être ajoutés pour améliorer d'autres propriétés, comme le pouvoir lubrifiant. Les exploitants de navires ont notamment exprimé des inquiétudes quant aux dommages sur les moteurs ou sur les performances du navire. L'OMI indique n'avoir reçu aucun rapport sur des problèmes de sécurité liés au VLSFO en 2020 et 2021.
Le scrubber a été un autre sujet de tension. Le dispositif qui permet d’épurer les gaz d’échappement des moteurs reste un sujet. La règle 4 de l'annexe VI de la convention Marpol autorise l’usage d’un fuel lourd à condition que les navires en soient équipés. Or, quand ils sont utilisés en boucle dite ouverte, ils ajoutent de l'eau aux gaz d'échappement, ce qui transforme les oxydes de soufre en sulfates/acide sulfurique, rejetés en mer. Le sujet dit du « rejet des eaux de lavage » continue d’animer les débats à l’OMI, qui recommande les dispositifs à boucle fermée. Ces derniers garantissent le stockage des résidus à bord et un traitement à terre dans des filières de valorisation. Mais ils sont plus complexes à opérer pour les exploitants de navires.
Certains États membres de l'OMI les ont interdit dans leurs eaux territoriales.
Création d’une ECA en Méditerranée
En juin, le 78e Comité de la protection du milieu marin de l'OMI (MEPC 78) a validé la création d’une zone ECA en Méditerranée à partir de 2025 pour les émissions d'oxyde de soufre (SOx) ainsi que les amendements proposés à l'annexe VI de Marpol, en vue de leur adoption par le MEPC 79, qui désigneront la Grande Bleue, dans son ensemble, comme une ECA pour les oxydes de soufre et les particules.
Une étude sur les impacts pour la santé humaine des émissions de SOx générées par les navires, soumise au Comité de protection du milieu marin (MEPC) de l'OMI en 2016 par la Finlande, a estimé qu'en ne réduisant pas la limite du soufre partir de 2020, elles provoqueraient quelque 570 000 décès prématurés supplémentaires dans le monde entre 2020 et 2025.
Pour rappel, le contrôle de la conformité et l'application de la nouvelle limite relèvent de la compétence des États du pavillon (l'État d'immatriculation d'un navire) et les États du port.
A.D.
* Les quatre ECA sont : la mer Baltique, la mer du Nord, l'Amérique du Nord (couvrant des zones côtières désignées au large des États-Unis et du Canada) et les Caraïbes (autour de Porto Rico et des îles Vierges américaines).