Le prix du fuel à très faible teneur en soufre (VLSFO) a franchi la barre des 600 $ la tonne pour la seconde fois depuis la mise en œuvre en janvier 2020 de la réglementation plafonnant la teneur en soufre des carburants marins. Le premier dépassement avait été enregistré en février 2020 en réaction au passage réglementaire.
Les prix du brut viennent d’enregistrer huit semaines de hausse consécutive. Le Brent s’échange à 85,68 $ le baril sur le contrat de décembre. Le baril américain West Texas Intermediate (WTI) est fixé à 83,40 $ sur le marché Nymex de novembre, son plus haut observé depuis 2014. Les effets sont déjà tangibles.
À Rotterdam, le prix du VLSFO (inférieur à 0,5 % de teneur en soufre) s’établit à 606 $/t et à Singapour, à 622 $. Le prix du fuel à haute teneur de soufre (HFO, 3,5 %) évoluant moins vite, l’écart se creuse. À Fujairah, il est de plus de 100 $/t. L’intérêt des armateurs et propriétaires de navires pour le scrubber (EGCS, Exhaust Gas Cleaning Systems) va s’en trouver renforcé. Pour rappel, il qui permet à un navire de consumer du HFO tout en étant dans les clous de la réglementation.
L’écart de prix entre les deux combustibles de soute, baptisé Hi5, est l’un des facteurs clefs conditionnant l’intérêt pour cette technologie car du différentiel dépend la pertinence de l’investissement (et de son retour sur investissement) sachant que ces pots catalytiques géants coûtent autour de 6,5 M$ en boucle ouverte (il y a différentes techniques, celle-ci étant la plus opérationnelle, mais ses rejets dans l’eau sont dans le collimateur des régulateurs) pour un navire de 15 000 à 16 000 EVP. Plus l’écart de prix est important entre les deux fuels plus le retour sur investissement est court.
24 % de la flotte équipée
Un VLCC équipé et qui consomme environ 60 t de brut par jour peut ainsi économiser jusqu’à 6 000 $/j, indiquent les courtiers de Lorentzen & Stemoco. À Singapour, premier centre d’avitaillement mondial des navires, la demande en HFO reste forte puisqu’il représente encore un quart des ventes de combustible de soute pour 60 à 65 % de la demande mondiale en faveur de son homologue bas carbone, selon une information communiquée à l’occasion de la 37e conférence pétrolière Asie-Pacifique (APPEC 2021) organisée par S&P Global Platts du 27 au 29 septembre. Le diesel marin apporte le solde.
Entre le 1er janvier 2020 et le 1er mars 2021, le nombre de navires équipés de scrubbers est passé de 2 011 à 3 935, tous segments confondus. Les EGCS équipaient alors 15,9 % des porte-conteneurs (28,7 % en EVP), 11,4 % des vraquiers (22,7 % en tpl), 24,5 % des transporteurs de pétrole brut (29,9 % en tpl) et 4,2 % des transporteurs de produits pétroliers (13,4 % en tpl). Clarksons estiment aujourd’hui à 23,9 % la part de la flotte mondiale équipée (en tonnages), carnet de commandes compris.
A.D.
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