Presque deux ans après les engagements publics de ses deux concurrentes directes, les numéros un et trois mondiaux Maersk et CMA CGM, le numéro deux mondial a inscrit une date à son agenda climatique en prenant l’engagement d’une décarbonation complète de sa flotte d'ici 2050. En l’occurrence, la date butoir assignée par l’OMI… et celle sur laquelle se sont également fixés Maersk et CMA CGM.
« Pour décarboner le secteur, nous devons développer de nouvelles technologies, de nouveaux carburants, de nouvelles infrastructures à un rythme jamais vu auparavant », a déclaré Søren Toft, qui s’exprimait dans le cadre de la London International Shipping Week.
GNL et biocarburants
Depuis son arrivée à la tête de MSC en début d’année, le dirigeant est sorti à de rares occasions de sa période d’observation. C’est lui qui a cependant annoncé une commande de onze navires de 15 300 EVP au GNL mi-mai. Un choix pragmatique. La compagnie de la famille Aponte reconnaît au carburant un statut imparfait pour traiter toutes les émissions mais lui accorde la vertu d’être la seule alternative éprouvée sur le plan opérationnel, commercialement viable et susceptible d’être mise à l'échelle immédiatement.
Toutefois l’armateur de porte-conteneurs y va, avec un risque mesuré et maîtrisé, via des contrats d'affrètement à long terme et avec une motorisation « LNG ready ».
Volte-face
Dans une de ses interventions, l’ex-cadre dirigeant de Maersk avait pu se montrer sceptique sur la date butoir de décarbonation à 2050 et sur « les objectifs » pour parvenir à rendre neutre en carbone la flotte mondiale.
Søren Toft fait partie, comme Søren Skou, le PDG de Maersk, dont il a été un des membres de son directoire, des partisans d'un fonds de R&D avec un statut d’ONG supervisée par les États membres de l'OMI. Alimenté par une contribution obligatoire sur la tonne de carburant, il estime même que « le montant initial de ce fonds destiné à accélérer les ruptures technologiques pourrait être porté à 10 Md$ voire plus. »
Dans un entretien accordé au Financial Times publié le 22 juin, il n’avait pas mâché ses mots à l’égard des « plans de l'UE » pour réduire les émissions de carbone, estimant qu’ils auraient un effet contreproductif si les carburants à faible teneur en carbone n'étaient pas facilement disponibles. À savoir, augmenter les émissions globales du secteur. Le service de presse avait dû rétropédaler pour éteindre le départ de feu médiatique.
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Partisan d’une taxation carbone
Il s’était jusqu’alors bien gardé depuis d’évoquer la taxe carbone. Cette fois, Søren Toft défend plus clairement l'introduction de mécanismes basés sur le marché, et notamment une taxation sur le carbone mais sans mettre le curseur sur le prix à la tonne de CO2 nécessaire pour être suffisamment dissuasif.
Outre le GNL, qui fait l’objet d’un partenariat avec la grande compagnie pétrolière Shell, MSC déclare avoir « consommé 850 000 t de biocarburant l’an dernier » et compte pousser cette démarche, sans donner davantage de précisions sur la nature des biocarburants.
Selon la base de données réactualisée des entreprises les plus émettrices de CO2, MSC ressort en tête, devant Maersk. La documentation de MSC en matière d’objectifs climatiques fait notamment part d’un objectif de réduction de 70 % de l'intensité de carbone d'ici 2045 par rapport à 2008 et de la mise en service d’un premier navire zéro émission d'ici 2030.
Le groupe revendique une réduction en 2020 de 44,3 % de ses émissions de CO2 par rapport à 2008.
Adeline Descamps