Costamare a vendu un porte-conteneurs de 7 403 EVP vieux de 23 ans pour démantèlement. Il bat en taille le JPS Debussy et ses 6 627 EVP vendu en décembre 2016. Mais au-delà des records insignifiants, le Kokura a une singulière histoire. Et il ne sera pas enterré avec ses secrets...
C’est un géant des mers des années 90 qui est envoyé à la casse. La branche américaine du propriétaire grec Costamare Shipping a cédé le Kokura, un porte-conteneurs de 7 403 EVP. Il détient le « triste » record du plus grand porte-conteneurs envoyé à la ferraille, détrônant le JPS Debussy. Un total de 15 navires de 6 000 à 6 500 EVP ont été vendus à la casse jusqu'à présent.
Le Kokura a une singulière histoire. Il faisait partie d'une série de six navires commandés par A.P. Möller-Maersk à son propre chantier naval d'Odense au Danemark. Ils étaient de loin les plus grands porte-conteneurs du monde à l'époque, indique Alphaliner, qui a repéré la vente. « Leur capacité pendant la construction avait été largement sous-estimée », souligne le consultant maritime pour la petite histoire. « Maersk avait dévoilé une commande de six navires de 4 800 EVP à l'été 1993. » Quelques mois plus tard, l’armateur faisait état d’une capacité de 5 500 EVP, ce qui correspondait alors aux plus grands navires commandés par les petits exploitants.
Cachez ces dimensions que l’on ne saurait apprécier
La première de ces six unités, le Regina Maersk, a été livrée en janvier 1996, Maersk ayant indiqué une capacité de 6 000 EVP, avec une largeur permettant 17 rangées sur le pont. « Cependant, l'observation du navire lors de ses premières escales a montré non seulement que cette capacité était sous-estimée, mais aussi que Maersk avait présenté en images un rendu d'artiste montrant un navire avec un nombre de cellules inférieur à celui du navire réel ! », poursuit Alphaliner. La capacité réelle est plus proche de 7 048 EVP.
À l’époque, en 1997, le très discret Maersk avait prévu la livraison d'un navire de 8 000 EVP, pensé comme une version allongée du Regina Maersk, alors qu'une telle capacité n'était envisagée qu’à une lointaine échéance par tous les autres acteurs du transport maritime, armateurs et exploitants, mais aussi les gestionnaires de port et de terminaux et surtout les chantiers navals. Et c’est ainsi que le leader mondial a pris une avance de cinq ans dans la course aux géants des mers, dont on connaît aujourd’hui les effets pervers…
Adeline Descamps