Le régime des sanctions est de retour au pays des Mollah. Le 8 mai 2018, l’Iran a basculé à nouveau sur la liste noire des pays commercialement in- fréquentables. Une décision de Washington a suffi pour ramener le niveaux des sanctions au niveau de celles qui existaient avant la conclusion en 2015 du fameux pacte « historique » de l’Iran avec le groupe 5+1 (Allemagne, Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni et Russie).
Le 14 juillet 2015, un accord multilatéral venait en effet clôturer un contentieux sur le nucléaire vieux de plus de 13 ans. Entré en vigueur le 16 janvier 2016, le JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action), négocié âpre- ment pendant une décennie, devait garantir le caractère civil du programme nucléaire iranien en soumettant le pays, présidé par Hassan Rohani, à un strict contrôle de ses activités en contrepartie de la levée partielle et progressive des sanctions économiques internationales.
Depuis le 6 août, la Maison-Blanche interdit à toute entreprise traitant avec Téhéran de faire du business aux États-Unis, le couperet s’appliquant à une première salve de biens et services (entre autres, l’utilisation du graphite, du charbon, de l’aluminium et de l’acier dans les processus industriels). Le 4 novembre, seront concernés les opérateurs portuaires, le transport maritime, la construction navale et les transactions pétrolières.
CMA CGM et Maersk, qui ont des activités et des établissements Outre-Atlantique, ont rapidement annon- cé qu’ils cessaient leurs activités avec la République islamique. L’armateur français avait signé en 2016 un protocole d’accord avec Irisl (Islamic Republic of Iran Shipping Lines) pour échanger ou louer des espaces de navires, exploiter des lignes maritimes communes et coopérer sur des terminaux portuaires. Le danois n’assure pas de ligne maritime directe mais exploite des navires affrétés de Djebel Ali, aux Émirats arabes, unis vers les ports iraniens de Bandar Abbas et Bushehr, et possède du personnel sur place.
Mi-août, l’International Group of P&I envisageait, pour sa part, de demander à être exempté du statut de blocage de l’UE (permettant aux entreprises et tribunaux européens de ne pas se soumettre à des sanctions prises par des pays tiers), inquiet des responsabilités potentielles découlant du respect des sanctions américaines pour les clubs membres.
L’affaire est plus délicate pour les armateurs iraniens qui semblaient profiter de la parenthèse sans entraves, tels Irisl, NITC ou National Iranian Tanker Co (Nioc). Le transport maritime d’hydrocarbures sera d’ailleurs sans doute le plus impacté au regard de la situation stratégique du pays sur les lignes maritimes des hydrocarbures grâce aux golfes Persique et d’Oman qui forment ses limites méridionales.
L’Europe est de surcroît le premier acheteur du brut iranien (600 000 b/j). L’Iran avait fait passer sa production de 2,7 à 3,8 millions de barils depuis la signature du JCPOA et ses exportations de 1,1 million de barils par jour à 2,9 millions de barils par jour (en avril, selon Bernstein Research).
Plus globalement, grâce à la levée des sanctions, les échanges entre l’UE et l’Iran avaient quasiment triplé entre 2015 et 2017, passant de 7,7 à 21 Md€.
A.D.