Les trois paramètres qui vont influencer le vrac sec en 2022

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La Chine et l’Inde restent les jokers des principales matières premières transportées par les vraquiers. Les prévisions sont aigres-douces pour le minerai de fer, généreuses pour le charbon et en consolidation pour les céréales.
Au cours des onze premiers mois de l'année, la Chine a importé un total de 1,04 milliard de tonnes de minerai de fer. Bien qu’en baisse de 3,2 % par rapport à la même période l'année dernière, il a soutenu les taux d’affrètement des capesize, ces bêtes de somme du transport de vrac sec, jusqu’à ce que la belle machine s’enraye brutalement au cours des derniers mois de l’année, la Chine ayant réduit ses investissements dans les infrastructures et imposant le rationnement à la production nationale d'acier.
 
Cette politique, motivée par la nécessité de contrôler les prix affolés, d’atteindre ses objectifs annuels de réduction des émissions avant les JO de Pékin en février et de maîtriser la demande dans un contexte de pénurie aigüe, a fait plonger le prix de l'alliage rouge à son niveau le plus bas en 18 mois (environ 90 $/t début décembre), même s’il a repris depuis de la vigueur (110 $/t).

Par ailleurs, le secteur immobilier chinois lourdement endetté (Evergrande officiellement en défaut de paiement) fait peser une menace sur l'activité de construction, qui consomme environ un tiers de la production nationale d'acier en temps normal. Les prévisions concernant les importations de minerai de fer de la Chine pour 2022 restent positives, à 3 %, mais des facteurs à haut risque planent sur les fondamentaux de l'offre et de la demande.

Crise de l'énergie : les vrais gagnants 

Le charbon a le vent en poupe

C’est l’incroyable grand gagnant fossile de la situation actuelle. Et même la France y a recours, envisageant d'assouplir les limites d'utilisation de ses centrales à charbon en janvier et février pour assurer l'approvisionnement en électricité, très tendu cet hiver.

La reprise économique mondiale et un hiver froid dans l'hémisphère nord, combinés à des prix du gaz élevés, une capacité limitée en matière d'énergies renouvelables, ont tous joué en faveur du combustible. Les pénuries d'électricité en Chine et en Inde, les deux plus grands consommateurs de charbon thermique au monde, ont déclenché une demande d'importations plus importante l’an dernier, ce qui a eu pour effet d'augmenter les taux de fret des navires opérant dans la région.

Si le rythme de croissance de la demande mondiale de charbon devrait ralentir du fait de la croissance extraordinaire de 2021, l'Agence internationale de l'énergie estime qu'elle atteindra un niveau record d'ici 2024 et la Chine sera déterminante dans cette trajectoire.

La concurrence entre charbon et gaz naturel influence l'emploi des navires

Situation durable

Les prix à terme du gaz relativement élevés jusqu'en 2024, le charbon pourrait conserver une part du lion dans le mix énergétique mondial. En dehors des objectifs de réduction des émissions et de décarbonation, l'augmentation de la demande de production d'électricité à partir du charbon est une bonne nouvelle pour les vraquiers, qui dépendent encore assez largement du volume transporté. Selon les estimations pour 2022, les importations de charbon thermique de la Chine resteront stables par rapport à l'année précédente (environ 258 Mt), tandis que les importations de l'Inde devraient augmenter de 8,5 % l'année prochaine pour atteindre 164 Mt.

Et la situation pourrait perdurer au vu des investissements dans le charbon en Asie. Malgré la promesse du président Xi Jinping d'atteindre la neutralité carbone en Chine en 2060, Pékin continue d'investir dans de nouvelles centrales au charbon, sur son territoire et à l'étranger. D’après un rapport de Carbon Tracker paru en juillet, la Chine a 368 centrales en cours de construction avec une capacité de 187 GW en électricité. L'Inde, deuxième plus gros consommateur de charbon au monde, prévoit quant à elle 92 centrales, soit 60 GW. L'Indonésie a en outre 107 nouvelles centrales au charbon en projet, le Vietnam 41 et le Japon 14.

La Chine et les États-Unis, jokers des pétroliers et des vraquiers

Céréales en consolidation

En matière de céréales, la demande chinoise est aussi prééminente. Elle s'est quelque peu consolidée au cours des dernières années, notamment après avoir traité la fièvre porcine et renouvelé son cheptel. Les projections pour les importations de céréales de la saison prochaine restent optimistes. Pour autant, le rythme des exportations de céréales américaines au quatrième trimestre de l'année dernière a ralenti en raison des perturbations logistiques causées par l'ouragan Ida. Et les expéditions de céréales au départ de la mer Noire ont diminué, en raison de la taxe russe sur le blé d'exportation.

Le commerce des céréales sur de longues distances gonfle les tonnes-milles pour les panamax et supramax. Les prévisions d'importations/exportations de soja en 2023 sur la route clé Chine-Brésil pourraient donc donner de l’emploi aux vraquiers de taille moyenne. Les exportations brésiliennes de soja au cours de la campagne 2021/22 devraient augmenter de 15 % sur une base annuelle pour atteindre 94 Mt, alors que les celles des États-Unis seraient en baisse de près de 10 %, à 56 Mt.

Le transport de céréales demeure la première victime du déréglement climatique. Ces dernières années, ses manifestations se font de plus en plus violentes : incendies, ouragans, tsunamis, grêles

Volatilité inoxydable

La volatilité inhérente au vrac sec, rompu aux mouvements de roulis, ajoute au cocktail de perturbations que connaît actuellement l’approvisionnement mondial : congestion portuaire, pénurie de navires, de matières premières et d’intrants, tensions commerciales…

Mais pour autant, les économistes se disent confiants du fait de l’équilibre entre les fondamentaux du secteur : un faible carnet de commandes (environ 7 % de la flotte existante en termes de port en lourd) et une croissance maîtrisée de la flotte mondiale de vrac sec prévue en 2022 (+ 3 % en tonnage brut) supposent que la demande sera supérieure à l'offre, à plus forte raison si le variant Omicron prend en otage les vraquiers…

Adeline Descamps

 

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