C’est une course contre la montre que s’apprêtent à engager La Méridionale et CMA CGM sur une nouvelle ligne fret et passagers entre Marseille et le port de Tanger. Les deux compagnies basées à Arenc entendent barrer la route à Grandi Navi Veloci qui a déposé un dossier d’amodiation pour exploiter la future gare internationale du Cap Janet à Marseille.
Nouvelles joutes en Méditerranée autour de la desserte du Maroc au départ de Marseille où la bataille se gagne également à terre. En jeu, le terminal du Cap Janet, au nord du port, en cours d’aménagement et où seront transférées, aux postes 4 et 5, l’ensemble des activités internationales historiquement exercées à La Joliette.
L’armateur italien Grandi Navi Veloci (GNV), qui opère Sète-Tanger-Nador, aurait déposé un dossier d’amodiation de cette future gare phocéenne dont la mise en service est annoncée pour 2021. Les candidats ont jusqu’à la fin du mois de septembre pour déposer leurs dossiers.
La Méridionale, boutée hors de Bastia et d’Ajaccio, cherche depuis fin 2019 de nouveaux contrats pour exploiter deux des quatre ropax de sa flotte. Ainsi, le Girolata, affrété jusque fin septembre à GNV sur l’Italie, devrait revenir à Marseille tout comme le Pelagos dont La Méridionale vient de prendre livraison (cf. notre news quotidienne du 9 septembre). Le ex-Liverpool Seaways de DFDS, précédemment exploité en Baltique, est un ropax construit en 1997 par les chantiers italiens Visentini. Long de 186 m et large de 25 m, il affiche une capacité de 2 460 mètres linéaires pour les véhicules et le fret et de 350 passagers. Il est actuellement au Havre où des travaux sont en cours sur son réseau électrique.
Accueil mitigé
Les deux navires assureront trois rotations entre Marseille et Tanger avec une capacité de 300 à 400 passagers et 100 à 120 remorques par voyage. Si le choix d’une liaison mixte permet de limiter la prise de risque, la Méridionale se serait associée à CMA CGM (qui ne confirme pas pour l’heure) en vue de commercialiser les mètres linéaires par le biais d’un accord de partage d’espaces (Vessel Share Agreement). Et ainsi éviter de prendre le bouillon dès le départ comme ce fut le cas avec le lancement du service « Marocco Express » (Marseille - Gênes, Tanger - Casablanca) en 2017 par CMA CGM avec seulement dix remorques par traversée. L’armateur voulait, avec ses deux grands rouliers de plus de 180 remorques et deux à trois départs hebdomadaires, se positionner en alternative du trafic routier.
Pour les transporteurs internationaux réunis au sein de l’Association française du transport routier international (Aftri), la pertinence de cette ligne dépendra à la fois de son prix et des jours de départ. « Nous entendons parler d’un départ le lundi, or les remorques quittent le Maroc le samedi pour être à Paris le mardi. Actuellement, seul le tout-route via Algesiras est fiable, il faut donc faire aussi bien », commente Marc Grolleau qui préside l’Aftri. L’ouverture de ligne s’avère périlleuse, y compris pour les voyageurs, en cette période de restrictions dans les voyages. En interne, la nouvelle est accueillie de manière mitigée, les navigants corses préférant rester sur leur ligne historique. Un comité d’entreprise extraordinaire se tiendra le 14 septembre à La Méridionale pour présenter les détails de ce projet dont le dessein vise à compenser les évictions corses et à retrouver le chemin de la rentabilité.
Nathalie Bureau du Colombier