Éolien en mer, SNSM, sécurité maritime... Quelques sujets ont dominé l'édition 2019 des Assises de l'Économie de la mer, grand rendez-vous annuel de la filière maritime, organisé par le groupe Ouest France et Le Marin, en partenariat avec le Cluster maritime français. Et en présence cette année à Montpellier du président de la République Emmanuel Macron.
Éolien en mer : « Le fait que la France ne soit pas en pointe est incompréhensible »
Le fait que la France, « avec ses 20 000 km de côtes et un des potentiels plus important au monde sur l’éolien en mer, ne soit pas en pointe sur ce dossier est incompréhensible », a tancé Emmanuel Macron. « Il est urgent de mettre fin à des années de procédures administratives trop lentes, d’hésitations, de ralentissement d’embourbement. Nous allons y rémedier. Nous avons débloqué certains projets. Le premier parc français éolien en mer a été lancé à Saint Nazaire. C’est une étape importante ». Les contrats-cadres ont été signés et le financement bouclé en septembre dernier pour le projet d’EDF Énergies renouvelables et le Canadien Enbridge d'un coût de 2 Md€.
Ce parc comptera 80 éoliennes (480 MW) installées à 12 km des côtes, pour une production effective au printemps 2022. « Le gouvernement va poursuivre : d'ici 2024, l’état attribuera chaque année 1 GW supplémentaire, soit l'équivalent de un à deux parcs chaque année. Tout un travail sera fait pour régler les conflits d’usages avant que les parcs ne soient déployés. Il ne se s’agit pas de combler le retard mais de prendre le leadership. Je suis pour le développement de cette filière mais pas n'importe comment, en payant des prix déraisonnables à un ou deux opérateurs car c’est le contribuable qui les paie ».
Les professionnels du secteur vont donc scruter la programmation pluriannuelle de l’énergie, à venir, pour confirmation de cette intention...
Société Nationale de Sauvetage en Mer : « La SNSM est le ciment d'une organisation exceptionnelle »
Emmanuel Macron aura réussi à faire se lever la salle comble du Corum alors qu’il était en train de saluer le « courage » et l'« abnégation » des sauveteurs de la Société Nationale de Sauvetage en Mer (SNSM) en rappelant qu’ils étaient « au cœur du dispositif de sauvetage en mer français ». La SNSM et ses 8 000 bénévoles ont payé un lourd tribut à cette « abnégation ». Ils ont perdu trois des leurs en juin aux Sables-d'Olonne lors d'une opération de sauvetage.
La question du financement de cette association de bénévoles, qui a réalisé près de 4 000 interventions en mer et secouru plus de 7 000 personnes, a pris une tournure tragique depuis cet accident, en agissant comme une loupe grossissante. Ses finances sont fragiles car extrêmement dépendantes de la solidarité et du mécénat. Or, elle a un besoin de financement urgent pour le renouvellement de sa flotte : 25 M€ dans les cinq ans à venir pour remplacer 35 bateaux, déjà commandés, et au moins autant dans les cinq années suivantes.
le Président a rappelé ce qui avait déjà été annoncé, suivant en cela les recommandations de la mission sénatoriale : « l'aide annuelle accordée a été portée à 11 M€. Elle aura triplé en quatre ans ». L'autre mesure annoncée concerne les enfants des sauveteurs décédés en opération de secours : « Ils pourront être adoptés par la Nation et devenir pupille. Elle s'appliquera de manière rétroactive aux cinq enfants des sauveteurs morts en juin dernier ».
La SNSM est aussi confrontée à une crise des vocations et à un grand besoin de formation, à peine plus d’un quart des bénévoles étant issus de professions. Emmanuel Macron a promis un effort sur ce plan sans précisions.
Capacités stratégiques : « Nous sommes en train de créer une capacité maritime européenne dont nous avons tant besoin »
« La France a fait le choix de se tourner vers la mer pour bâtir son avenir mais doit faire face ainsi à des incertitudes (piraterie, actes criminels, NDLR). Si on veut tirer profit de l’économie maritime et protéger les espaces, il nous faut veiller à garantir la sécurité et la sureté maritime. Dans notre économie mondialisée et numérisée, portée par la maritimisation des flux et les réseaux de câbles sous-marins, il ne saurait y avoir de prospérité sans sécurité en mer et de sécurité en mer sans un engagement permanent. C’est l’une de mes grandes convictions géopolitiques : si on veut affaiblir la mondialisation et la fracturer, c’est par la mer qu’il faut le faire, par ses détroits ». Et de rappeler que la France a pris le leadership d’une initiative de protection par une frégate positionnée de façon permanente sur le détroit d’Ormuz, points de passage stratégiques pour le transit du pétrole, et ce, pour « mieux protéger les bâtiments de commerce, mieux appréhender les risques de la zone, organiser une protection européenne, structurer notre autonomie stratégique ».
C’est pour cela également, indique-t-il, que dès 2008, la France est « fortement engagée dans la première opération navale européenne qui a permis d’endiguer la piraterie maritime dans le bassin d’Aden ». La coopération opérationnelle de la France a des finalités stratégique : « nos approvisionnements, notre défense économique, la prospérité du pays. C’est pour cette raison que nous avons renouvelé les capacités navales de nos armées. La Loi de programmation militaire va enfin combler nos trous capacitaires ».
Depuis 2017, la Marine a reçu deux bâtiments de soutien et d’assistance en Outre-mer et 4 en métropole ainsi que trois patrouilleurs légers. La commande de six autres patrouilleurs a été officiellement passée la semaine dernière par la ministre des armées ». Il notamment indiqué que le Cimer examinera pour la première fois un schéma directeur de la fonction garde-côtes « pour s’assurer de la cohérence des équipements avec les besoins ». « J’ai également souhaité que soit renforcé le segment des frégates, sentinelles de mers qui garantissent la liberté de navigation ». La cérémonie de découpe de la première tôle d'une frégate de défense et d'intervention (FDI), premier d'une série de cinq unités qui entreront en service dans la Marine à partir de 2025, s’est déroulée lieu le 24 octobre à Lorient. « Nous sommes en train de créer une capacité maritime européenne. Cela participe à cette construction d’autonomie stratégique européenne dont nous avons tant besoin ».
Propos recueillis par Adeline Descamps
Photos : ©jfrançoisAEM2019
Assises de l'Économie de la Mer : Emmanuel Macron les a compris...