Véritable poids lourd du fret ferroviaire puisqu’assurant à lui seul près de 30 % du fret ferroviaire de granulats en France, le groupe Carrières du Boulonnais (CB) peut se féliciter d’avoir pris des mesures préventives pour contrecarrer les effets de la grève des cheminots.
Il avait, en effet, largement anticipé le mouvement en massifiant les envois vers les quatre plateformes parisiennes au cours des deux derniers mois. Tant et si bien que ce ne sont pas moins de 150 000 tonnes de matériaux qui sont disponibles pour les chantiers du Grand Paris, là où habituellement il n’y en a que 90 000 tonnes.
Plus grave blocus à ce jour
Mais ces réserves sont appelées à décroître rapidement car depuis l’arrêt de la circulation des trains de fret intervenu le 4 décembre , pas un des vingt-cinq trains sortant de l’immense carrière de Ferques, dans le Pas-de-Calais, n’a pu être acheminé vers la Région Parisienne et Dunkerque.
"S’agissant de nos expéditions par le rail, c’est le plus grave blocus que nous ayons subi à ce jour. En trois à quatre mois de perturbations au printemps 2018, nous avions pu sauver l’équivalent de 44 trains chargés à 1 500 tonnes. Là, rien", se désole Vincent Amossé, directeur général adjoint de la filière granulats du groupe CB. Avant d’ajouter que ce blocus, pour lequel la cellule mise en place par SNCF ne peut rien, "est provoqué par l’encombrement des voies par des rames voyageurs ou fret vides bloquées et par le nombre insuffisant d’agents au sol présents à leur poste."
Pour l’heure, cet arrêt des expéditions par le rail n’a aucune incidence sur le niveau de production de la carrière de Ferques de 7 millions de tonnes par an. Cette installation sera d’ailleurs arrêtée la dernière semaine de 2019 et la première de 2020 pour maintenance.
L’échéance du 6 janvier 2020
Mais c’est finalement à partir du 6 janvier 2020 que la situation deviendra critique pour le groupe CB. C’est en effet à partir de cette date que le recours aux camions deviendra indispensable pour alimenter à la fois les plateformes parisiennes, soit l’équivalent de 6 trains par jour, et Arcelor Dunkerque, 2 trains quotidiens chargés à 2 800 tonnes. Cela représentera un surcoût de 10 000 euros environ par train remplacé, lequel montant sera entièrement à la charge du groupe. "Nous ne sommes pas sûrs, en outre, de trouver les camions de 30 tonnes de charge utile qu’il nous faudra alors compte tenu de l’absence d’un flux retour", poursuit Vincent Amossé.
Sans surprise donc, ce dernier est "tout à fait favorable, dès maintenant, à l’instauration d’un service minimum pour le fret à l’instar de ce qui est déjà en place pour le secteur voyageurs." Cette position est, d’ailleurs, défendue par le Groupement national des transports combinés (GNTC).
Des conséquences d’un report modal à l’envers
Ce report modal à l’envers, s’il se produit, aura des conséquences majeures. Il faudra, alors, au moins quatre mois au groupe CB pour reconstituer les stocks. Certaines centrales à béton alimentant les chantiers du Grand Paris pourraient, en outre, se retrouver à court de matériaux.
La situation du groupe CB, partagée avec celle des coopératives - pour ne citer que ce seul exemple - illustre malheureusement une fois de plus le peu de cas qui est fait des conséquences résultant des mouvements sociaux sur le fret ferroviaire.