La très lente maturation des systèmes autonomes de conduite met à mal les pionniers de cette technologie. C’est le cas de la société toulousaine EasyMile, créée en 2014, qui développe des navettes passagers et de fret, utilisées notamment dans des parcs industriels.
Malgré une croissance qui l'a menée au statut d'ETI avec 280 employés et une levée de fonds de 55 millions d'euros (M€) en 2021, l'entreprise s'est retrouvée en redressement judiciaire à l'été 2024. Son président fondateur, Gilbert Gagnaire, reconnaît des pertes annuelles de 10 à 12 M€.
Face à ces difficultés, l'entreprise, soutenue par ses actionnaires historiques Continental et Alstom, réoriente sa stratégie vers la logistique industrielle, plutôt que le transport de personnes, signant notamment des contrats avec Bosch et BMW.
Le parcours de Navya n'est guère plus encourageant. Après avoir évité de justesse la faillite, l'entreprise lyonnaise a connu plusieurs restructurations. Reprise au printemps 2023 par une joint-venture entre Macnica et Gaussin, elle a vu ce dernier se retirer en août 2024.
Désormais rebaptisée Navya Mobility et détenue par des actionnaires japonais (Macnica à 70,85 % et NTT West à 29,15 %), l'entreprise recentre ses activités sur les segments logistique et passagers en privilégiant les circuits fermés, plus faciles à maîtriser que les routes ouvertes.
La startup suédoise Einride, spécialisée dans les pods autonomes, n'échappe pas à la tourmente malgré une diversification précoce de ses activités vers le conseil en électromobilité. Après avoir levé près de 260 millions d'euros depuis sa création en 2016, l'entreprise fait face à une crise de liquidités, ayant enregistré plus de 114 M€ de pertes en 2023.
Son PDG Robert Falck vient d’annoncer un plan d'économies incluant des réductions d'effectifs. Cette situation critique n'est pas isolée, comme en témoigne l'abandon début 2024 par ZF de sa production de navettes autonomes, jugeant le marché encore trop immature.
Ces difficultés soulignent les défis majeurs du secteur : des développements technologiques plus longs et coûteux que prévu, un marché qui tarde à se matérialiser, et une concurrence internationale féroce car les startups européennes peinent à rivaliser avec les géants technologiques chinois et américains.
Tesla vient ainsi d'annoncer son entrée sur le marché avec le Robovan, une navette de 20 places, tandis que Waymo (filiale de Google), vient tout juste d’officialiser une nouvelle levée de fonds d’un montant de 5,6 milliards de dollars (5,2 milliards d'euros). Le changement de catégorie est flagrant !