Le conseil d’administration de l’entreprise publique ferroviaire espagnole Renfe a approuvé, le 29 septembre 2021, le lancement du processus de recherche d’un partenaire pour la filiale de fret, Renfe Mercancías. L’objectif est de transformer cette société en "un opérateur logistique intégral pour s’adapter aux besoins du marché et générer de nouvelles possibilés d'affaires". La filiale de fret est dans une situation difficile depuis plusieurs années, les pertes sont régulières, sauf en 2019 (3,8 M€) en raison d’opérations exceptionnelles (vente de matériel et désinvestissement dans une filiale).
Les pertes avoisinent les 300 M€
En 2020, Renfe Mercancías a subi les conséquences du Covid-19 et de la crise économique avec une perte de 42,7 M€ pour un chiffre d’affaires de 175,2 M€ (- 20,2 %). Depuis 2013, les pertes cumulées avoisinent les 300 M€.
Renfe Mercancías subit le contrecoup du déclin régulier du ferroviaire en Espagne, qui ne représente plus que 3,5 % du trafic total de marchandises (contre 5,1 % en 2015). A cela s’ajoute la concurrence croissante des acteurs privés depuis la libéralisation du fret en 2005, qui assurent 38 % du trafic actuellement. Récemment, cette pression s’est intensifiée avec l’entrée en force des compagnies maritimes comme opérateurs, y compris dans la traction (MSC et CMA CGM). La recherche d’un partenaire pour le fret est d’autant plus importante que l’opérateur public est confronté désormais à la concurrence sur le trafic passagers (LGV Madrid-Barcelone) et à une amende record de 65 M€ imposée par l’autorité espagnole de la concurrence.
Un serpent de mer
Cette recherche ne date pas d’aujourd’hui. En 2011, l’opérateur public avait créé des entreprises par lignes de produits (conteneurs, sidérurgie, automobile, etc.) afin de permettre l’entrée d’acteurs privés. L’opération fut un échec sauf dans l’automobile (entrée du groupe allemand Deutsche Bahn dans Pecovasa pour 14,5 % du capital). En 2013, le fret avait été regroupé dans une entité unique, l’actuelle Renfe Mercancías. En décembre 2017, le ministre des Transports de l’époque, Íñigo de la Serna, annonçait le lancement de la procédure en vue d’identifier un consultant chargé de sélectionner un partenaire, mais celle-ci ne s’était finalement pas matérialisée. En 2019, le directeur général, Abelardo Carrillo, avait reconnu publiquement l’existence de contacts avec plusieurs opérateurs, dont Deutsche Bahn. Depuis lors, la recherche de ce partenaire était réaffirmée régulièrement sans concrétisation.
Cette fois sera-t-elle la bonne ?
Reste à savoir si cette nouvelle tentative sera la bonne et surtout s’il y aura des intéressés. Jusqu’ici, la Renfe a toujours indiqué sa volonté de demeurer au capital comme actionnaire majoritaire.
Parallèlement à l’annonce de la recherche d’un partenaire, l’opérateur a annoncé un plan de réorganisation de Renfe Mercancías et la volonté d’acquérir 12 locomotives de grande puissance pouvant circuler sur écartement UIC, et notamment sur le réseau français. L’ouverture prochaine d’une succursale à Paris est également prévue. La volonté d’internationalisation est claire et la France est désormais dans le viseur de l’opérateur public espagnol, un élément de nature à intéresser les candidats potentiels.