Actu-transport-logistique : Comment s’est portée votre activité en 2020 ?
Éric Champeyrol : Nous avons connu un exercice très contrasté en 2020. Aux grèves portuaires qui ont impacté l’activité en janvier ont succédé les effets de la crise sanitaire au cours du deuxième trimestre. Le troisième trimestre de l’année a en revanche été marqué par une reprise progressive du trafic, celle-ci se transformant en croissance au cours des trois derniers mois de l’année. Le chiffre d’affaires de Naviland Cargo s’est au global contracté de 7 %, à 117 millions d’euros. C’est une première depuis 2017.
Pour faire face au recul du trafic, nous avons pris un ensemble de mesures incluant la réduction provisoire des fréquences, de notre parc locomotives et wagons et la mise en place de remises tarifaires sur les axes en déficit. Ces dernières étaient d’autant plus indispensables qu’elles devaient compenser, pour partie, l’effondrement des taux de chargement à l’import.
ATL : Quelles sont vos perspectives 2021 ?
É. C. : Nous ciblons clairement un rattrapage en 2021 en nous fixant pour objectif de retrouver notre niveau d’activité de 2019. Nous allons donc augmenter les fréquences, à commencer par Lyon/Fos-sur-Mer. Sur cet axe, nous passerons ainsi de 9 à 10 fréquences hebdomadaires à douze au cours du premier semestre. Nous ferons de même sur Bordeaux/Le Havre un peu plus tard dans l’année. Ces augmentations de fréquences seront couvertes par le retour de locomotives électriques que nous avions provisoirement restituées. Nous allons parallèlement poursuivre nos efforts au plan de la digitalisation de la relation client. Car c’est en dispensant le même niveau de service qu’offre déjà le transport routier que nous allons convaincre ces mêmes transporteurs routiers d’opter en faveur du report modal.
ATL : Quels sont les principaux points à atteindre pour parvenir à un triplement de l’activité combiné rail-route à l’horizon 2030 ?
É. C. : Nous voyons bien un doublement de l’activité rail-route avec les infrastructures actuelles, mais pas forcément un triplement. Le maillage des terminaux est en effet insuffisant. Nous en voulons pour preuve les difficultés que nous rencontrons pour obtenir, enfin, le chantier de transport combiné que nous appelons de nos vœux à Orléans. Car c’est au nord de cette ville que se situe l’épicentre logistique français. C’est un dossier déjà ancien puisqu’il date d’une dizaine d’années. Nous avons besoin d’une installation de deux à quatre hectares comportant deux voies de 750 mètres de long. Nous serions prêts à y participer financièrement mais, pour l’heure, c’est plus une volonté politique importante qui empêche ce dossier d’aboutir. Pourtant, nous avons déjà les clients pour cette triangulaire qui pourrait relier Le Havre à Orléans et Bordeaux. À raison de cinq fréquences hebdomadaires, cela représenteriat 20 à 25 000 camions en moins sur les routes chaque année.
Il y a d’autres verrous à faire sauter pour que nous puissions créer également des relations transversales entre l’Est et l’Ouest (Lyon/Rennes et Lyon/Le Havre via Bourges et Vierzon). Il conviendra aussi de réaliser des investissements significatifs pour passer aux wagons de 80 pieds, lesquels succéderont le moment venu aux wagons de 60 pieds. L’aide de l’État dans le cadre du plan 4F [Fret Ferroviaire Français du Futur] sera particulièrement précieuse pour tenter d’atteindre ces objectifs particulièrement ambitieux de triplement de l’activité au début de la prochaine décennie.