Subir les événements ou bâtir une entreprise capable de s’adapter aux variations de conjoncture ? BGE Transports a choisi la seconde solution. Ici, dans l’Aisne, hors de question de laisser le hasard dicter la ligne de conduite. Au contraire, l’entreprise a adopté, dès ses débuts, un contrôle de gestion très précis avec un plan transport tout aussi rigoureux afin d’avoir une vision sur le long terme. Même si parfois, une telle doctrine s’est traduite par des décisions difficiles et l’abandon de marchés déjà acquis : « Si un flux ne correspondait pas à la stratégie et au plan de développement fixés par l’entreprise, mieux valait ne pas continuer plutôt que de perdre de la rentabilité, résume Dany Gaspard, le gérant. Notre plan de transport est construit et non subi pour anticiper les besoins futurs. Commercialement, nous devons capter et travailler des flux qui ont un intérêt. » BGE Transports, c’est d’abord l’histoire d’une envie, celle de Dany Gaspard. Cet Axonais de 45 ans a repris les rênes de la société il y a treize ans. Auparavant, il occupait le poste de responsable d’exploitation et associé d’une entreprise. Une première expérience suivie pendant deux ans d’un passage de l’autre côté de la barrière en gérant les transports et la logistique d’une coopérative agricole. Avec toujours en tête le projet de créer son propre business. À la fin de l’été 2006, l’occasion se présente à la barre du tribunal de commerce de Laon : la société Danis, une vingtaine d’années d’existence, est au plus mal. Dany Gaspard saute le pas. S’il reprend la dizaine de salariés, le trentenaire, rejoint un an et demi plus tard par sa sœur Magalie Laroche, décide de repartir d’une page quasi blanche.
Exit le nom de Danis remplacé par BGE Transports, mais surtout, l’entrepreneur change complètement de créneau. Alors que Danis réalisait 80 % de son chiffre d’affaires en transport postal, la nouvelle entité s’oriente directement vers les deux secteurs qui l’occupent encore aujourd’hui. D’une part, la grande distribution. Des véhicules dédiés livrent tous les magasins de deux enseignes dans les Hauts-de-France, l’ex-Champagne-Ardennes et la région parisienne, six jours sur sept, en double poste. D’autre part, le vrac solide, mais aussi un peu liquide, avec un parc très diversifié : benne céréalière, benne travaux publics, benne tapis pomme de terre, citerne horizontale ou pulvérulente… Cette large gamme est complétée depuis deux ans par des bennes Ampliroll permettant à l’entreprise de se développer dans un secteur du recyclage-environnement en plein essor.
Particularité de la structuration des activités de BGE Transports : 25 à 30 % du chiffre d’affaires découlent de marchés très spécifiques, précisent les deux associés : « Nous nous sommes spécialisés dans les marchés de niche, nécessitant des investissements lourds sur du matériel spécifique. Ils permettent de n’avoir qu’une concurrence limitée. Les moutons à cinq pattes nous intéressent toujours ! » Ainsi, après avoir démarré avec une vingtaine de prospects il y a treize ans, la société compte plus de 300 clients, essentiellement au nord de la Seine et dans le Benelux.
Aujourd’hui, l’entreprise, par ailleurs membre du réseau France Benne, a même les reins particulièrement solides. En 2017, suite au départ à la retraite du gérant, elle a racheté les Transports Karwicki à Villers-Carbonnel près de Péronne, dans la Somme. Cette opération de croissance externe lui a permis de renforcer ses positions dans un secteur agricole clé, la pomme de terre. « Cette entreprise avait de nombreux points communs avec nous. Il y avait donc un véritable intérêt à se rapprocher dans le cadre de l’organisation de nos flux et de notre schéma de transport. » Deux ans plus tard, cet investissement semble judicieux. Les Gaspard ont recruté cinq personnes supplémentaires et augmenté le parc d’autant de camions sur le site samarien, qui consiste en un parking pour les véhicules et un atelier. « Nous n’avons pas vocation à mettre 100 camions là-bas. » Mais des camions ailleurs ? Toujours très attentif aux grands projets d’infrastructures – le site de Péronne se trouve à proximité immédiate du canal Seine-Nord, dont la mise en service est prévue pour 2027 – le transporteur observe la demande croissante de bennes TP pour les projets du Grand Paris. « Un client nous a fait des appels du pied. Nous aurions tout intérêt à nous installer au cœur du triangle Compiègne-Beauvais-Creil. Nous savons qu’il y a des possibilités, alors nous les étudions. » Ces nouvelles antennes ne remettront pas en cause l’ancrage axonais. Loin de là. Le siège social se trouve dans l’Aisne, il y demeurera. Tout juste pourrait-il prochainement déménager de quelques kilomètres.
Actuellement situé en bordure de la Nationale 2, à Chivy-lès-Étouvelles, aux portes de Laon, le site historique n’est plus adapté aux ambitions. L’objectif est de s’installer dans l’une des zones industrielles de Laon, dont Dany Gaspard loue la situation à 1 h 30 de Bruxelles, 1 h 15 de Roissy et au cœur d’un bassin agricole conséquent. Sur ce nouveau site, le frère et la sœur pourront se lancer dans la logistique, mais aussi continuer à travailler une thématique moins visible, mais autant essentielle à leurs yeux : le bien-être des salariés. Les deux dirigeants estiment en effet que la cohésion des équipes est essentielle et constitue même un atout majeur dans une société de 70 collaborateurs. Cette cohésion passe, par exemple, par l’existence d’une équipe de futsal, à laquelle participe le gérant. « C’est inévitablement bénéfique pour tout le monde et nous aimerions développer des activités de yoga, sophrologie, relaxation ou autres. Ces thématiques nous paraissent de plus en plus importantes. » Dans les futurs locaux, cette philosophie devrait donc se traduire par des équipements adaptés à la détente et aux activités, comme une salle de repos.
Cette volonté de bien-être n’est évidemment pas sans arrière-pensées. Des conditions attractives aident à conserver les salariés en ces périodes de tensions sur l’emploi. Comme rouler avec des véhicules pourvus de boîtes automatiques et des dernières options de confort. Bientôt, certains bénéficieront de moteurs au gaz. Composé à 90 % d’Euro VI, le parc va se doter de trois à cinq camions de ce type cette année, d’abord destinés à l’activité autour de la grande distribution. D’autres devraient rapidement suivre, mais le gaz ne sera pas l’énergie exclusive de BGE Transports : électrique et hybride sont aussi envisagés selon les différentes possibilités et activités. Mais, encore une fois, les associés pèseront bien le pour et le contre : « Aujourd’hui, l’électrique n’est pas encore fait pour le vrac. »
Bon sens et réflexion, deux piliers pour un Dany Gaspard qui se dit finalement assez peu surpris par le déroulement de cette aventure entrepreneuriale démarrée un jour de septembre 2006 : « J’avais beaucoup observé lors de mes précédentes expériences, ce qui m’a permis de voir ce qu’il fallait faire ou ne pas faire. Avec Magalie, nous sommes complémentaires et nous avons su nous entourer d’une équipe compétente. » Où rien n’est décidément laissé au hasard.
• Siège : Chivy-lès-Étouvelles (02)
• CA : 6,2 M€
• Effectif : 70 salariés (et des saisonniers)
• Parc : 130 cartes grises,
• Activités : marchandises générales et vrac