La société s’apprête à quitter son site historique

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Fondée il y a près de 90 ans à Strasbourg, dans le quartier du Port-du-Rhin, Chalot Transports se prépare à déménager. Son PDG, Michel Chalot, par ailleurs président de la FNTR Alsace, livre son analyse et ses projets pour l’entreprise.

Dans le bureau de Michel Chalot, un portrait en noir et blanc veille sur lui. Il s’agit d’Emile Chalot, son grand-père, qui créa en 1928, en son nom propre, la société de transport devenue SA en 1954. Aux origines, l’entreprise opérait dans le négoce et le transport de charbon. Aujourd’hui, Chalot Transports est spécialisée dans le transport d’hydrocarbures, qui occupe les deux tiers de son activité. Ici, au 9, rue de la Coopérative, adresse héritée de la proximité immédiate de feu la Coop Alsace, on travaille en famille depuis trois générations et, vivant à l’étage de l’entreprise, on a pris l’habitude de surveiller du coin de l’œil le ballet des véhicules de jour comme de nuit. Mais « on ne pourra pas continuer sur ce site », prévient d’emblée Michel Chalot.

Cohabitation impossible

Depuis quelques années, la ville de Strasbourg s’étend vers le Rhin et le quartier du Port-du-Rhin, autrefois zone industrielle, est le siège d’un vaste programme d’urbanisation, notamment sur cette zone dite de la « Coop ». Or, estime le sexagénaire, « une entreprise de transport ne peut pas cohabiter avec des riverains. On a des camions qui commencent à rouler dès 3h du matin ; si on a des voisins, ça ne peut pas fonctionner ». Pour le Pdg, ces difficultés de cohabitation se sont encore aggravées depuis l’attentat de Nice. « Le site doit être fermé, vidéo surveillé, et les contraintes de sécurité vont aller crescendo », anticipe-t-il. En collaboration avec le Port autonome de Strasbourg, l’entreprise s’est donc mise en quête d’une solution afin de déménager, toujours dans le périmètre du port. « Cela nous laisse quatre ans. Est-ce que l’entreprise pourra s’en remettre, on verra », lâche le patron feignant le détachement. Au fond, cette complication n’est pas de taille à déstabiliser cet acteur historique du transport routier, ni même son PDG, par ailleurs président de la FNTR Alsace. Mais « on ne nous aide pas beaucoup », constate ce dernier. « De manière générale, on prend très peu en considération l’entreprise de transport. On est perçus comme une contrainte, d’autant plus que la création d’emplois est forcément limitée par rapport à la surface exploitée », analyse Michel Chalot qui définit son activité de transporteur routier comme « un mal nécessaire. On peut faire du commerce virtuel, mais à un moment, l’acheminement, lui, il n’est pas virtuel ! » le dirigeant rappelle que « 80 % des marchandises sont transportées à moins de 150 kilomètres », à l’image de sa propre flotte, qui opère en moyenne dans un rayon d’une centaine de kilomètres autour de Strasbourg.

« Pas des collecteurs de fonds »

La raison de cette mise au point n’est autre que le retour sur le devant de la scène de l’idée d’une taxation régionale des poids lourds, depuis la tenue des Assises de la mobilité. Perspective qui hérisse Michel Chalot. « Tout le monde pense, qu’en taxant le camion on en comptera moins, mais chaque mode a sa pertinence. Si on pouvait, comme certains le disent, mettre les camions sur le fer, il y a longtemps que ce serait fait ! », tonne-t-il, rappelant que l’Alsace est une grande région de transit. Et le Pdg aux responsabilités syndicales d’enfoncer le clou : « Nous ne sommes pas collecteurs de fonds ». Le transporteur alsacien rappelle que, lors du précédent débat sur l’Ecotaxe, « nous voulions un texte qui permette de la répercuter sur les coûts du transport. On réclamera pareil ici », prévient-il. Dans l’immédiat, c’est surtout à une congestion de l’infrastructure que doivent faire face, chaque jour, les conducteurs de Chalot Transports, dont l’un des itinéraires classiques consiste à relier le Port au pétrole aux stations services de l’Eurométropole – pour des sociétés de marques comme Total, ses filiales ou des centrales d’achat de la grande distribution –, et d’approvisionner des particuliers du secteur. Alors que la réalisation du Grand Contournement Ouest (GCO) de Strasbourg continue à diviser localement, tant au sein de la société civile que du monde politique, Michel Chalot dresse le constat d’une ville « point noire », et témoigne d’une aggravation. « Avant, on pouvait effectuer trois tours de la ville en 9 heures d’exploitation. Aujourd’hui, vous n’en faites plus que deux. Le trafic continue à se développer et rien n’a été fait », regrette celui qui soutient, faute de mieux, la réalisation de ce contournement de Strasbourg, pensé pour délester l’autoroute A35.

Premiers tracteurs GNV

On l’aura compris, Michel Chalot dresse un portrait inquiet du contexte général dans lequel évolue aujourd’hui son entreprise. Reste qu’il a pour elle de grands projets, qui dépassent le seul déménagement à venir. En octobre dernier, l’entreprise obtenait sa labellisation « Objectif CO2 » au terme d’un audit d’un an. Dans le cadre de cette démarche volontariste, les Transports Chalot prévoient l’achat, dès 2018, de leurs deux premiers tracteurs GNV, soit un investissement évalué à 140 000 euros (l’unité). Pour le patron, il s’agit de promouvoir cette démarche de développement durable et de responsabilité sociétale, tant auprès de ses donneurs d’ordre que de ses salariés. Un moyen, estime Michel Chalot, de « fidéliser le personnel » dont l’ancienneté moyenne au sein de l’entreprise s’élève à 15 ans et 9 mois. Pour limiter le turnover et contrer les difficultés de recrutement au sein de la profession, l’entreprise veille à associer ses salariés dans différentes prises de décision. « Aujourd’hui, l’aspiration des jeunes a changé, il faut leur proposer quelque chose qui tienne la route, être à leur écoute pour qu’ils se sentent bien au sein de l’entreprise », appuie-t-il. Exemple avec l’équipement des camions et notamment de leurs sièges et cabines, « le poste de travail de nos salariés ». Chauffages ou climatiseurs autonomes, sièges chauffants avec ou sans accoudoirs : les options sont pensées avec les conducteurs Chalot. À l’avenir, ces derniers devraient d’ailleurs être au cœur de la stratégie de l’entreprise, laquelle se dirige vers un développement de la fonction commerciale de ces derniers. Typiquement lors de la livraison de fiouls aux particuliers. « C’est comme ça que nous parviendrons à maintenir notre marché », prédit Michel Chalot.

La sécurité prime

Officiant dans le transport d’hydrocarbures en milieu urbain, Chalot Transports porte une attention toute particulière aux questions de sécurité. Détecteurs de distance avant, caméra et radars de recul, détecteurs et radars latéraux : la flotte Chalot est équipée au maximum afin de prévenir les accidents. « Si cela n’en évite qu’un, nous sommes gagnants », juge Michel Chalot qui veille, par ailleurs, à ce que ses conducteurs ne soient pas sollicités par téléphone lorsqu’ils sont au volant, malgré « une communication de plus en plus demandée ». Au total, avec la formation, environ 90 000 euros sont dédiés annuellement à la sécurité.

Repères

• Siège : Strasbourg

• CA (2017) : 7,8 M€

• Effectif : 83 salariés dont 68 conducteurs.

• Parc : 53 moteurs et 40 semi (dont 25 remorques citernes).

• Activité : transports d’hydrocarbures, transport de bungalows, logistique.

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