Cette transmission pourrait avoir valeur de symbole. Le 9 mai dernier, Jérémy Grandouiller, gérant de TDS Transports de Savigneux, près de Montbrison (42), a signé un protocole d’accord avec Serge Peronnet pour la reprise de Tec Services, TPE de six salariés et six véhicules. Les deux structures, qui génèrent ensemble quelque 2,6 M€ de chiffre, fusionneront en septembre… « Tec nous transmet une activité de locatiers que nous avons peu développée, remarque Jérémy Grandouiller. C’est une nouvelle voie pour nous qui opérons surtout dans le transport à la demande pour l’industrie et la grande distribution. Cette croissance nous aide à mutualiser nos achats et notre outil de production, apporte de la souplesse dans la gestion du parc, qui comprendra 25 unités contre 19 aujourd’hui. » L’opération de croissance externe confère aussi une envergure à TDS Transports de Savigneux. « La taille devient un argument commercial décisif pour être mieux référencé sur certains dossiers, chez certains clients, reconnaît le dirigeant. Elle favorise encore notre réactivité, jusqu’à un certain point tout de même… Notre idée n’est pas de devenir trop gros, mais de fiabiliser notre outil de travail… pour mieux survivre. » Survivre ? Le jeune chef d’entreprise a créé TDS Transports de Savigneux au printemps 2008 – au cœur de la crise. Dans le même temps, il ouvrait une activité de négoce de granulat de bois, TDS-Environnement. « Beaucoup de gens achetaient alors une chaudière, mais le réseau de distribution n’existait pas encore, explique-t-il. S’installer à Montbrison nous positionnait à l’épicentre du département… » Bonne intuition, mais les grandes surfaces avaient aussi investi le marché, qui offrait trop peu de marges pour être rentable.
C’est pourquoi en dix ans, l’activité « granulés »s’est maintenue, mais modestement (jusqu’à atteindre 500 000 euros de CA l’an dernier). Au contraire, l’autre TPE, créée pour « transporter les granulés »a connu un développement non-stop, une croissance à deux chiffres, pour passer de 300 000 euros de chiffre d’affaires en 2008 à 1,7 M€ l’an dernier. Car, s’il reconnaît ne pas être « un fils de… »dans le transport de marchandises, Jérémy a accompli toute sa carrière dans le métier qu’il a choisi. Après un BTS Transport à Etiic Formation, à Lorette (42), il est notamment passé, de 2000 à 2008, chez les Ferrapie Transport, Vialon, puis chez Easydis, où il gérait le parc locatif de 200 camions – « belle expérience chez un chargeur » – , sauf qu’il préfère piloter sa propre structure…
Aujourd’hui, il est le principal actionnaire, gérant majoritaire de TDS Transports, où son père artisan a aussi quelques parts et dont Stéphane Bonnet, exploitant qui l’accompagne depuis le début, compte environ 10 % des parts. « Il a beaucoup œuvré au développement de TDS, constate le chef d’entreprise. Nous travaillons vraiment ensemble pour la faire vivre au quotidien. » Les 22 autres salariés, dont 19 « roulants », sont partie intégrante de la réussite de l’entreprise pour Jérémy, qui défend une culture partagée, avec de bonnes conditions de travail.
Il soigne le recrutement, souvent de personnes expérimentées ou d’un certain âge – comme cette année, deux personnes en reconversion recrutées via Pôle emploi. Il estime « important de laisser aux gens un peu de champ d’action »– comme la possibilité, pour les conducteurs qui en ont envie, de décorer leur camion à leur goût (voir photo). L’intégration de chaque nouveau conducteur donne lieu à un temps d’adaptation en compagnie de l’un des deux référents dans l’entreprise. « Les chauffeurs nous représentent auprès de nos clients, véhiculent notre image, ajoute le pilote du club 3D à la FNTR 42, qui a suivi l’an dernier un formation à la « Stratégie ». Nous avons tous les mêmes camions, parfois des clients en commun. C’est notre manière d’être et d’exercer notre métier qui nous différencie. »
La manière de travailler ? Jérémy Grandouiller n’hésite pas à entretenir le sens du service et à éviter la sous-traitance. « Si on utilise les bourses de fret pour optimiser certains retours, on ne fait pas d’affrètement sauvage », précise-t-il. Il veut répondre de la manière la plus réactive possible… TDS Transports assure des transports régionaux et interrégionaux, du « grand régional », préfère Jérémy, dans une zone qui va de Dijon à Grenoble, d’Avignon à Clermont-Ferrand ou Montluçon, à environ 200 kilomètres autour du siège de Savigneux, près de Montbrison et en étant, note le chef d’entreprise, « de plus en plus présent en Côte-d’Or et dans le Dijonnais ». La PME travaille à 24/48 heures. « Nous avons de la récurrence chez nos clients, assure le gérant. Nous savons qu’il y aura des départs tous les jours, mais sans toujours connaître les destinations plus de quarante-huit heures à l’avance. Il faut s’organiser, mais j’ai toujours travaillé comme ça. Et cela s’est accentué, car les stocks sont moins importants qu’auparavant. On nous demande beaucoup d’urgences. Il faut juste trouver les solutions et bien organiser les retours. »
Grâce à ses 17 (bientôt 19) véhicules en 44 tonnes, 15 semis et deux porteurs 19 tonnes, TDS assure les livraisons de clients issus à 25 % de la grande distribution – dont Casino, à 20 % dans le commerce de gros indépendant et, surtout, pour la moitié dans l’industrie – notamment le recyclage de plastique… « Nous avons quelques gros clients, mais je préfère limiter leur importance pour ne pas devenir trop dépendant, indique le dirigeant. Nous établissons une centaine de factures par mois. J’ai fait assez peu de commercial jusqu’ici. Notre développement s’est surtout appuyé sur nos contacts, notre réseau. » Parallèlement à son opération de croissance externe, l’entrepreneur compte améliorer son outil de production. Côté véhicules, il ne dispose plus que de deux PL en location (contre 100 % au départ) et améliore petit à petit son parc, Euro V et VI, géolocalisable. Il se tournera volontiers vers le gaz, si la station annoncée dans le Montbrisonnais voit le jour en 2020-2021. « Il nous faut un avitaillement à proximité de notre centre névralgique », note le transporteur. Le « centre névralgique », justement, s’apprête à connaître une petite révolution. L’entreprise n’occupait jusqu’ici qu’une partie de sa parcelle sur la zone industrielle du Champ-de-Mars, à Savigneux. Jérémy Grandouiller investit 1,4 M€ dans l’aménagement de 4 500 m2 de parking et dans la construction d’un bâtiment paysager avec des bureaux et 2 000 m2 de stockage. Ses yeux en pétillent à l’avance : « Cela fait deux ans que je prépare ce projet ! Nous allons enfin optimiser et sécuriser nos passages à quai, être plus réactifs et nous organiser pour répondre à nos clients. » Le parking sera prêt fin juin, le bâtiment opérationnel fin 2019.
• Siège : Savigneux (42)
• CA : 1,7 M€ (au 30/9/2018)
• Effectif : 22 salariés (dont 18 conducteurs)
• Parc : 19 véhicules
• Activités : industrie, grande distribution, commerce de gros indépendant
« Grâce à la formation à la stratégie PME, menée en 2017-2018 avec la FNTR, j’ai pris du recul pour cerner mes priorités. C’était très approfondi. Après un travail collectif, j’ai été accompagné par le conseiller Éric Blache. J’ai mieux peaufiné mes projets de construction, structuré mon plan d’investissement. Le dirigeant est souvent seul. Cette démarche permet d’échanger entre pairs, d’être épaulé par un expert, puis de mieux travailler en équipe en interne, en acceptant que les choses soient autrement qu’à ma manière… TDS, c’est vraiment une équipe ! »
