Le 25 octobre dernier, Alain Stéphane Oberson, des transports éponymes dans le Jura, et Damien Faure, directeur commercial France de MAN, se sont retrouvés pour une symbolique « remise de clef », dans le garage du groupe Morel, concessionnaire Man, à Courlaoux (39). Le transporteur de Moirans-en-Montagne (39), spécialiste du groupage, lot complet et des transports volumineux, a acquis cette année trente véhicules Euro VI de la marque allemande, essentiellement des 44 t, ce qui représente la moitié du parc de l’entreprise. « Notre flotte sera à 90 % chez Man, indique le gérant. Nous renforçons aussi notre partenariat par l’accompagnement de nos conducteurs, et l’externalisation du suivi de notre matériel. »
Le dirigeant a ainsi souscrit auprès du constructeur des options d’entretien à 100 % (MAN service care(r)) mais également de formation et de suivi des conducteurs (Pofit drive(r)), dont il espère beaucoup. « Nous anticiperons mieux les pannes et améliorerons ainsi l’outil de production, note-t-il. Et, en déployant Profit drive, nous allons former nos chauffeurs lors de la prise en mains des véhicules, puis les accompagner sur route pour optimiser la conduite. C’est une véritable industrialisation des achats. »
Ce souci de rationaliser systématiquement l’activité s’est imposé à l’actuel dirigeant après les difficultés financières qui ont conduit la PME, créée par son père, son oncle et son grand-père en 1978, à une mise en redressement judiciaire en 2006. Alain-Stéphane Oberson est entré en 1996 dans l’entreprise, après une formation et une première expérience dans le transport. En cinq-six ans, les Transports Oberson passent alors de 12 à 50 salariés, évolue de la sous-traitance vers le transport en propre et la commission de transport… « Nous avons connu un fort développement, mais avec une tendance à faire du volume pour du volume, analyse-t-il. Ces difficultés ont déclenché une nécessité de retrouver de la rentabilité et de nous réorganiser sur une stratégie industrielle et ciblée, à la place de l’ultra développement. »
Après la crise, dans le cadre du plan d’apurement de 2006-2015 notamment, l’entreprise a abandonné l’international pour se recentrer sur une activité régionale dans une quinzaine de départements de Franche Comté et d’Auvergne-Rhône-Alpes. À partir de ces régions, elle s’est appuyée au plan national sur une stratégie massive de lignes « pour trouver des flux montants et des contre flux », depuis la Franche-Comté et Rhône-Alpes vers Paca et les Pays de la Loire/Normandie, mais également vers la Picardie ou la région parisienne. En Ile-de-France, la société jurassienne maintient aujourd’hui un vivier d’une dizaine de conducteurs déportés (après avoir détenu une agence) et compte trois sites : à Moirans-en-Montagne (39), Bellignat (01) et Bohas-Meyriat-Rignat, près de Bourg-en-Bresse (01). Parallèlement à ce recentrage géographique, doublé d’un contrôle de gestion affiné et d’une concentration sur des activités de groupage de lots partiels et lots complets, de transports volumineux, les Transports Oberson ont rejoint Tred Union en 2009 puis, en septembre 2016, Pole, le réseau palettes du groupement. Le transport à la demande, un temps mis en veilleuse, a en outre été relancé au plan national. Du côté des secteurs d’activités, la diversité reste de mise, avec une présence dans les traditionnels secteurs de la plasturgie et des jouets (28 %), dans le papier emballage et cartons (20 %), les produits d’hygiène et de santé (16 %), la construction de bois et dérivés (15 %), l’alimentaire (7 %) ou le déchet industriel. La PME compte quelque 200 clients, dont le principal pèse 7-8 %. « Nous travaillons à la fois avec des leaders mondiaux comme le groupe Saint Gobain ou Carrefour, souligne Alain-Stéphane Oberson, ou des régionaux comme Smoby ou la petite société d’à côté ».
Résultat : l’entreprise a « reconstruit une part de rentabilité ». Décrochant l’Étoile de la PME du transport en juillet 2015, elle n’a cessé de croître passant, de 2007 à 2016, de 3 M€ à 9,3 M€ de chiffre d’affaires. Elle table même sur un revenu de 15 M€ (90 salariés) cette année. Depuis l’acquisition des Transports du Revermont (dix salariés), en avril dernier, les Transports Oberson disposent d’une surface de stockage supplémentaire de 4 500 m2, ce qui porte le parc logistique à 7 000 m2. « Nous allons mener un développement dans ce secteur en 2018, explique le transporteur. Dans le cadre du groupement Tred Union, nous sommes actionnaires de Tred e-log, qui propose une réponse e-commerce en France et en Europe. Dans ce marché qui se sectorise, nous apportons des solutions dans l’Ain ou le Jura ». En 2017, l’entreprise a également démarré le transport en ADR, essentiellement pour acheminer des déchets dangereux en local.
La PME, qui proposait déjà une plateforme ASClinkeo pour mettre les documents à la disposition des clients, crée un service dédié (voir encadré). Et elle peaufine son industrialisation tout en cultivant une fibre humaine, locale, vertueuse. « Notre taille favorise les échanges, permet de s’appeler pour trouver des solutions, souligne Coralie Auger, assistante de direction et responsable RH. Nous progressons vraiment sur le plan environnemental. Tous les conducteurs se sont formés à l’écoconduite. Et, après la charte Ademe – Les Transporteurs s’engagent, nous programmons d’obtenir le label CO2 en 2019 ». Le dirigeant ajoute : « Nous devrions probablement investir dans les motorisations électriques ».
Par ailleurs, Alain-Stéphane Oberson, très sensible au facteur local, soutient des associations telles l’USO Oyonnax Rugby, le Jura Sud Handball ou le festival de musique du Haut Jura… Il tente de privilégier les achats locaux. « Cet effort est capital, souligne-t-il. C’est pourquoi nous nous sommes engagés, il y a quatre ans, avec Biom attitude, une société nantaise qui calcule l’impact des entreprises sur leurs territoires. Et depuis, nous sommes passés de 22 à 25 % de consommation dans le Jura et l’Ain. Pour que nous allions mieux, il faut aussi que nos régions aillent mieux ».
Et la suite ? « Nous restons à l’écoute des opportunités externes, glisse Alain-Stéphane Oberson, mais nous allons d’abord stabiliser notre situation sur six mois au moins avant, peut-être, de nous intéresser à des entreprises dans notre périmètre régional ».
« Transports Oberson, Amandine, bonjour ! » A 8 h 30, dans le hall d’entrée des Transports Oberson à Moirans-en-Montagne, Amandine Mancassola enchaîne les appels, sans les passer aux exploitants. « Depuis le 25 septembre, c’est moi qui gère les commandes, par mail et téléphone, depuis leur saisie jusqu’à la livraison, explique la jeune chargée de clientèle. Je vérifie avec l’exploitation si tout se déroule bien ; j’informe le client s’il y a un retard sur un chargement… »
Sur le site de Bellignat, une salariée vient aussi d’être recrutée pour gérer les relations clients. Une autre devrait renforcer l’équipe, sur l’agence de Bohas-Meyriat-Rignat. « Nous créons un service à l’interface entre le client et la production, dédié au client, explique Alain-Stéphane Oberson. Cette nouvelle organisation du travail s’inscrit dans le processus d’industrialisation ».
Il s’agit, en effet, de décharger les exploitants pour les recentrer sur la production, en lien avec les conducteurs. Amandine Mancassola se dit « impressionnée » par « la technicité et l’engagement des exploitants dans l’optimisation des tournées ».
• CA 2017 : 15 M€
• Effectif : 90 salariés, dont 65 conducteurs
• Parc : 65 moteurs, 140 cartes grises
• Activités : plasturgie et jouets, papiers emballage et cartons, hygiène et santé, automobile, construction bois et dérivés, produits alimentaires, transport de déchets industriels