« Il nous faudra demain encore plus qu’aujourd’hui jouer des coudes pour ne pas être oubliés et garder les spécificités qui font la richesse de notre métier, a soutenu Thierry Gros, président de la CSD, au cours du congrès de la fédération. Notre profession doit évoluer mais garder ce qui constitue son ADN. » Composé de quelque 1 200 entreprises, principalement des TPE et PME, dont la moitié sont adhérentes à la fédération, le secteur du déménagement s’interroge sur la place qui lui restera alors que la tendance est au regroupement, d’abord au sein du TRM, lui-même uni avec d’autres secteurs dans l’Opco Mobilités. Faire entendre la voix de ses adhérentes implique pour la fédération une mobilisation sans faille. Et les efforts paient. Dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage, la mesure sur les bonus-malus concernant les contrats courts prévoyait notamment une taxation de 10 euros sur les contrats journaliers, pourtant inhérents à l’activité du déménagement. La CSD a annoncé l’abrogation de cette taxe pour le secteur. « L’amendement, déposé le 2 novembre, doit encore être validé, précise Laurence Lechaptois, déléguée générale de la CSD, qui souligne que son obtention est néanmoins « sûre à 90 % ». De manière générale, les entreprises présentes au congrès espéraient une stabilité des charges sociales et fiscales. Le point de crispation demeurait la baisse de la ristourne sur la TICPE. « La CSD a été exclue des discussions alors que le secteur est concerné par cette mesure », regrette Thierry Gros. De son côté, Paul Weick, sous-directeur des transports routiers à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) a précisé que la hausse générée serait indiquée en pied de facture afin que les dirigeants du secteur puissent la répercuter sur leurs prix. « Cette taxe sera bel et bien affectée à l’Afitf », a-t-il assuré.
Les difficultés de recrutement se situent en tête des préoccupations des chefs d’entreprise. De plus en plus de sociétés renoncent désormais à se développer. « L’image qui colle au métier de déménageur est celle d’une personne qui a raté ses études, déplore Laurence Lechaptois. Pourtant, c’est une belle profession, avec des valeurs, mais personne ne le sait… » La CSD a annoncé un partenariat spécifique avec Pôle Emploi afin de faire connaître le secteur auprès des prescripteurs. Un groupe de travail sera mis en place au sein de la CSD. Toutefois, commente Thierry Gros, « une réforme de l’assurance chômage, qui permettrait de ne pas gagner plus à ne rien faire, serait plus efficace ». Le congrès a été l’occasion de donner des clés aux chefs d’entreprise pour se démarquer et attirer davantage de collaborateurs. Afin de séduire les candidats, les entreprises ne doivent pas hésiter à communiquer sur les atouts de la profession, comme le sens du métier, les primes et le salaire – s’il se situe au-dessus de la grille conventionnelle –, l’entreprise à taille humaine, le contact avec le client, etc. Autre argument de taille : les nouvelles classifications obtenues dans le secteur, qui entreront en vigueur le 1er décembre, sont un moyen de valoriser la profession « en offrant un itinéraire professionnel aux salariés », rappelle Laurence Lechaptois. Les résultats du dialogue social dans le déménagement, la plupart du temps fructueux, ont abouti à de nombreuses avancées favorables pour le secteur. La profession craint que cette tendance positive soit freinée dans l’éventualité où les syndicats boycotteraient des négociations pour protester contre l’absence d’extension de l’accord sur le dialogue social, ou encore pour réclamer la mise en place d’un treizième mois conventionnel.
Le congrès s’est aussi penché sur la problématique de la concurrence déloyale, parfois étrangère, avec l’apparition de plateformes. « Il faut veiller à une saine concurrence, à ce que les obligations et les règles de déontologie soient les mêmes pour tous, et à lutter contre la propagation des offres de déménagement sur Internet », a insisté Thierry Gros. C’est dans ce cadre que la profession a demandé au Comité national routier (CNR) une étude sur les prix pratiqués dans le secteur. Les résultats ont été présentés au cours du congrès et sont disponibles sur le site du CNR. Beaucoup d’entreprises peuvent constater qu’elles pratiquent des prix en dessous du marché. « La plupart proposent aussi des services comme du stockage », souligne Alexis Giret, directeur du CNR. Ces niches leur permettent de baisser les prix tout en maintenant leur activité. « L’étude CNR doit être un outil pour aider chacun à se vendre sur le marché des particuliers comme du transfert d’entreprises, soutient Thierry Gros. Elle permet à l’entreprise de s’évaluer sur le marché mais aussi de justifier ses prix. C’est ainsi que nous pouvons combattre le travail illégal. »
La CSD se donne pour objectif de rassembler davantage d’entreprises du secteur. Elle va s’ouvrir aux self-stockeurs « qui ont toute leur place au sein du secteur de conservation des biens de la CSD », a annoncé Thierry Gros. Le congrès a été l’occasion de présenter le nouveau site public de la fédération. D’ici quelques jours, demenager-pratique.com deviendra stocker-demenager-pratique.com. Il regroupera deux annuaires, l’un recensant les déménageurs par département ou par ville et l’autre consacré aux self-stockeurs. Chaque entreprise adhérente sera présentée avec les services qu’elles proposent mais aussi d’autres informations, comme ses certifications ISO, une demande de plus en plus fréquente des clients. Afin de mieux répondre aux aspirations des jeunes dirigeants du déménagement, une commission du développement durable sera créée au sein de la CSD. Le congrès a en outre été l’occasion de passer en revue la législation sociale, comme la prime Macron qui sera renouvelée en 2020. Il a donné des pistes aux chefs d’entreprise pour prévenir ou gérer les conduites addictives de salariés.
Une commission des jeunes déménageurs a été créée en 2017 au sein de la CSD, dans l’idée d’impulser un mouvement innovant et une nouvelle méthodologie dans le secteur du déménagement. Les jeunes dirigeants travaillent sur divers sujets, particulièrement sur l’environnement. Une charte de bonnes pratiques a été mise en place. La trentaine d’adhérents participent également à des ateliers de travail, par exemple sur les contrats de travail, avec des intervenants experts. « Cette commission nous permet d’exister sans nos parents, indique Marion Prudent, dirigeante des Déménagements Prudent et présidente de la commission des jeunes déménageurs, rappelant l’esprit familial prédominant dans le secteur, alors qu’une majorité d’adhérents vont reprendre, ou ont déjà repris, l’activité de leurs parents. On a des idées différentes et on échange entre nous sur nos expériences et les nouveautés dans le secteur. »