Conduite économique ou rationnelle ? La question a été posée au cours de la table ronde consacrée à l’écoconduite. En tout état de cause, chacun a bien voulu admettre que le but recherché était identique. Et que les voies pour y parvenir pouvaient être diverses. Chez Ramette, un formateur interne a mis en place un dispositif de notation à l’appui des systèmes proposés par les constructeurs, peu avares d’analyses en tous genres. « Cet outil est très bien perçu par les meilleurs de nos conducteurs. Il a instauré une émulation », indique Antoine Ramette. Le formateur interne, au centre du dispositif, est loué par certains, comme Antoine Ramette ou Quentin Baralle, et peu reconnu par d’autres, comme Franck Augustin : « Nul n’est prophète en son pays. Être formateur en interne, ce n’est pas la panacée car il me semble difficile d’avoir du crédit auprès des conducteurs quand on ne roule plus. » Cyril Gardien pense, pour sa part, que « c’est sur les opérations intermédiaires qu’il fait gagner du temps, pas sur la route ». Quant à Gaëtan Maurel, il estime qu’« un formateur extérieur a plus de crédit pour sensibiliser les chauffeurs car il transmet une analyse extérieure ». Pierre Larue pense, lui, que les centres de formation « valent “peanuts” car on donne un permis de conduire à des gens qui ne sont pas investis ».
La question du e-coaching a, bien entendu, été évoquée. « Avant, l’écoconduite, ce n’était que de la formation présentielle. Nous sommes passés à des formations à distance grâce au recours aux nouvelles technologies », souligne Samuel Cablant, directeur des ventes chez DAF Trucks France. Une « maison » qui défend l’idée que l’écoconduite, c’est un savant mélange qui associe technologie, data et humain. Il s’agit, notamment au moyen de ce GPS installé sur la boîte de vitesse, de « voir la route à 2,5 km », ce qui permet de placer le véhicule en inertie (roue libre) pendant plusieurs kilomètres lorsque la route le permet. Allusion également à ce coaching à distance, sur une journée, opéré lors de la prise en main du camion. Samuel Cablant a également fait la promotion à l’assistance du Driver performance assistance (DPA), sorte de « coach embarqué » chargé de livrer au conducteur les informations qui lui permettront d’anticiper sa conduite. « Il donne un score au conducteur », glisse Samuel Cablant, qui fait également référence, sur le sujet, à l’outil DAF Connect. De son côté, s’il loue les qualités de la formation CGI qui « fonctionne bien surtout sur les conducteurs déjà formés », Gaëtan Maurel estime qu’« on ne peut pas se passer de la dimension humaine ».
Pour beaucoup, le jeu de la « carotte » est le plus indiqué car, comme le fait remarquer Quentin Baralle, « quand le formateur est présent, le conducteur se montre vigilant mais, dès que ce dernier s’éloigne, il se relâche ». Alors, la « carotte » montre les plus grandes vertus. Systèmes de notation comme chez Ramette Transport ou Pierre Transports, challenges ou jeu via Facebook comme chez Trans Natural (Jeremy Ageron), ou alors ce classement affiché chez CLS. La dimension sociale de l’entreprise peut-elle constituer un élément du bon investissement du conducteur dans sa conduite ? « Oui, un conducteur bien encadré et considéré peut être meilleur en écoconduite », pense Marie-Laure Vidil.
Aux yeux de Jonathan Delisle, il n’y aurait pas d’outils miracles. « Le sujet est obsessionnel car on ne parvient pas à trouver. Il faut un suivi car les chauffeurs vont à un moment lever le pied. Les moins bons restent moins bons. » Ce à quoi Samuel Cablant rétorque qu’« avec la technologie, le moins bon peut devenir moyen ». À ce sujet, Jean-Claude Plâ pointe du doigt « les chauffeurs qui se croient meilleurs que le système ». Et de préconiser l’installation dans les cabines d’un système de rappel vocal plutôt que des messages ou des données chiffrées. Cyril Gardien se dit, pour sa part, favorable aux « retours d’infos constructeurs plutôt qu’à la seule informatique embarquée ». Le dirigeant nordiste croit savoir que « l’écoconduite n’engage pas seulement le chauffeur mais toute l’entreprise ». Quant à Kevin Novelli, il pense que « la manière dont le conducteur sera reçu chez le client pèse sur sa conduite ». Caroline Combeau trouve judicieux de « faire sortir les conducteurs de leur zone de confort ». On a aussi parlé de règlement général sur la protection des données (RGPD) et de géolocalisation pendant cette table ronde. Guillaume Antoine estime « qu’il faut faire très attention avec les conducteurs dans ce domaine ». Le transporteur francilien trouve « difficile d’analyser les performances des conducteurs d’une marque à l’autre ». Une certitude, selon Samuel Cablant : « L’utilisation du régulateur est essentielle. »