Si 85 % des personnes interrogées par Les Échos Études reconnaissent que la performance logistique est un levier clé de la compétitivité de leur entreprise, elles ne sont plus qu’un tiers à la considérer comme un investissement prioritaire, loin derrière les systèmes d’information et la R&D. Un paradoxe tempéré par Marie-Christine Lombard, présidente du directoire de Geodis : « La logistique est une fonction transverse et couvre un champ très large. De nombreux investissements consacrés aux systèmes d’information, à la R&D ou aux ressources humaines servent à améliorer la performance de la supply chain sans être identifiés comme tel. » L’étude note néanmoins que l’un des enjeux de ces prochaines années pour les entreprises « sera d’accélérer leurs investissements notamment dans la transformation digitale ». Ce constat s’appuie sur les 12 % des sondés seulement qui déclarent être à un stade avancé dans ce processus contre 46 % en développement. Plus d’une entreprise sur quatre n’aurait pas encore amorcé sa transformation ou serait encore à un stade exploratoire.
Sur un panel de 252 entreprises de toutes tailles issues du monde des chargeurs pour l’essentiel, l’enquête soulève un autre décalage entre les discours et les actes. Il concerne la logistique durable. « Si ces enjeux semblent aujourd’hui intégrés au sein des directions logistiques, la démarche est davantage dictée par des contraintes externes que la recherche de performance. » Ainsi, la première motivation à l’origine d’une démarche de logistique durable est la nécessité de se conformer à l’environnement réglementaire et législatif. À peine 30 % de ces approches visent à rechercher un avantage concurrentiel ou des gisements d’économie de coûts.
Qu’ils soient environnementaux, digitaux ou liés à l’optimisation de la compétitivité, pour relever ces défis les entreprises comptent sur l’expertise externe de leurs prestataires transporteurs et logisticiens. Un autre enseignement tiré de l’enquête où sur l’échantillon sondé, les trois quarts confient tout ou partie de leur logistique à un prestataire externe. Sur ce volume, 38 % des entreprises s’adressent à des opérateurs globaux de type 4PL, 3PL ou intégrateurs de services capables de piloter l’ensemble des flux de la supply chain. À titre de comparaison, 35 % font le choix d’un spécialiste sectoriel et 24 % optent pour des prestataires locaux.
S’agissant des fonctions externalisées, elles se concentrent sur les tâches opérationnelles, prioritairement le transport amont externalisé à 87 % et aval à hauteur de 72 %. L’entreposage est externalisé à 42 % tandis qu’un quart des entreprises confie à l’extérieur les activités de conseil en optimisation de supply chain et de logistique industrielle. Le besoin d’accompagnement est plus marqué à l’international, avec pour objectif d’aider les entreprises à mieux maîtriser les environnements locaux. Les fonctions externalisées dans ce cadre couvrent l’ensemble des procédures douanières et réglementaires d’importation et d’exportation.
Les résultats de l’enquête croisent les conclusions du rapport Hémar-Daher sur la compétitivité de la chaîne logistique remis le 16 septembre. Ils confirment que « si la logistique a longtemps été vue comme un centre de coûts, elle est aujourd’hui perçue comme une composante essentielle de la réussite des entreprises ». Cette reconnaissance se traduit par la capacité « à livrer le bon produit au bon moment » présentée comme le deuxième facteur de réussite d’une entreprise dans la promesse client derrière l’innovation. Les priorités actuelles des directions logistiques ciblent l’amélioration de l’expérience client. « L’atteinte d’une meilleure qualité de service est un enjeu pour 91 % des sondés et la recherche d’une plus grande flexibilité de la chaîne d’approvisionnement arrive en deuxième position. » En troisième place, la réduction des coûts reste un sujet majeur devant la traçabilité des flux en temps réel. Rebouclant avec la nécessité d’accélérer les investissements numériques, ces priorités renvoient au déploiement d’outils digitaux avec pour premier objectif la fiabilisation. Il est suivi par la réduction des coûts, une meilleure planification et l’automatisation accrue des process.
Après avoir listé les attentes et défis des directions logistiques des chargeurs, l’enquête s’est interrogée sur les critères de sélection des transporteurs et logisticiens. Sans parler de paradoxe au vu du cahier des charges présenté plus haut, la compétitivité prix demeure le premier critère de choix. Il devance la capacité à fournir une information fiable et en temps réel, la connaissance et la maîtrise de spécificités sectorielles puis la capacité à fournir des solutions sur mesure.
La présentation des résultats de l’enquête logistique des Échos Études a été l’occasion pour Marie-Christine Lombard de préciser les axes du plan stratégique 2019-2023 de Geodis. Premier enseignement, le groupe va poursuivre ses investissements dans ses cinq métiers : la distribution et l’express en France, le transport routier de lots et en complet avec un focus sur les marchés industriels, la logistique contractuelle avec un développement dans le e-commerce, la commission de transport international et l’optimisation de la supply chain en qualité de 4PL. Au sein de ces activités, la logistique contractuelle est présentée comme le « moteur » des autres métiers avec de possibles renforcements sur des zones géographiques ciblées par croissance externe, en Asie du Sud-Est par exemple. Confirmant la volonté de croître en logistique contractuelle et dans le secteur du e-commerce, Marie-Christine Lombard annonce le lancement l’an prochain d’un nouveau service. Baptisé « e-logistics », il vise à fournir des prestations mutualisées à différents distributeurs multicanaux au moyen d’entrepôts hautement mécanisés.
E. D.