Protéger les salariés mais aussi les chefs d’entreprise au titre de leur responsabilité pénale et réduire le montant des cotisations. Ces trois objectifs ont été atteints grâce au projet initié et porté par Mickaël Goalec, directeur des ressources humaines et techniques du groupe Les Routiers Bretons et président du Comité régional de la formation professionnelle du transport et de la logistique. En 2013, le DRH interpelle la Carsat Bretagne sur un double constat : d’un côté, la caisse d’assurance ne parvenait pas à rencontrer les entreprises de transport ; de l’autre, le TRM se trouvait classé comme secteur « sinistrogène », générant des cotisations très élevées pour les entreprises. Le dossier, né de rencontres à la Carsat et à l’AFT, mène à la définition d’un projet de prévention spécifique dans le transport par la prévention et trois catégories de formations. La première, indispensable selon le DRH, s’adresse aux dirigeants afin de les inciter à s’engager dans une politique de sécurité, notamment par des investissements. La deuxième formation concerne les agents (conducteurs, mécaniciens et personnels logistique) et, pour un meilleur fonctionnement, une troisième est destinée à former des animateurs internes pour les plus grandes entreprises. Dans le cas d’entreprises plus petites, le projet prévoit la formation d’un chargé de mission régional.
L’initiative, menée en partenariat avec la Carsat Bretagne, l’AFT et l’INRS, est alors développée l’année suivante au sein du groupe Les Routiers Bretons, engagé depuis plusieurs années dans une politique de performance sociale et de sécurité. Sept personnes suivent ainsi les formations – deux dirigeants, un animateur et trois salariés. Les premiers résultats se perçoivent déjà, indique Mickaël Goalec. L’ensemble des catégories de salariés échangent sur les risques, « dans un dialogue structuré puisqu’ils savent expliquer pourquoi une manipulation peut s’avérer dangereuse. » Un autre effet des formations se traduit par une accélération des prises de décision. « Le risque dans le transport routier apparaît bien identifié puisque la chute et la manutention représentent plus de deux tiers des accidents, indique Mickaël Goalec. Lorsque le chef d’entreprise en est conscient, les axes de travail se précisent. » Ainsi, Les Routiers Bretons ont remplacé les transpalettes manuels par des transpalettes assistés ou électro-manuels. Avec pour résultat qu’ils n’ont plus enregistré d’accident de manutention. Si le risque de chute subsiste, des installations qui permettent d’effectuer les accrochages/décrochages sans monter sur la plateforme arrière du tracteur doivent les réduire.
Cinq entreprises ont rapidement suivi Les Routiers Bretons dans cette démarche, puis une vingtaine. « Ce projet constituait un vrai pari, souligne Mickaël Goalec. Nous devions convaincre les dirigeants. Je me suis rendu compte que parler des coûts qu’engendre une absence de prévention s’avérait efficace. Nous devions aussi démystifier la cause de l’accident. Beaucoup de transporteurs considèrent le risque de la circulation comme le principal danger professionnel. Or, 9 accidents sur 10 ont lieu alors que le véhicule est à l’arrêt ! » Le projet entendait par ailleurs lutter contre l’idée automatique que la responsabilité de l’accident incombe au conducteur qui n’a pas fait attention. « La plupart du temps, l’accident est multifactoriel. Parfois même, le conducteur se trouvait dans une situation à risque », soutient le DRH.
Une fois les formations validées, l’offre de formation a couvert l’ensemble de la région, puis une deuxième, l’Occitanie, avant d’être étendue au niveau national. Les entreprises peuvent appliquer le dispositif de différentes manières. Par exemple, tous les chefs d’agence sont formés au niveau dirigeant et un animateur par grande région. L’ambition de la démarche apparaît toutefois plus large puisqu’elle prévoit, à terme, une formation pour chaque personne qui entre dans le secteur du transport. « Nous devons par conséquent toucher la formation initiale avec, par exemple, l’intégration de la formation d’agent préventeur au niveau bac pro, d’animateur au bac + 2 et, au-delà, une formation de prévention dirigeant, souligne Mickaël Goalec. Les premiers enseignants commencent à être formés en Bretagne. »