FLORENCE BERTHELOT : Il a pour objectif de porter les revendications du TRM à l’attention des candidats aux élections présidentielle et législatives. Il s’agit de les alerter sur la nécessité de bâtir une véritable politique des transports. Notre secteur n’est souvent appréhendé que sous le prisme du développement durable, des infrastructures ou du report modal, rarement dans une approche de secteur économique. Il est important pour nous que l’ensemble des revendications remontent du terrain. Nous les avons synthétisées et regroupées par thème.
F. B. : Un premier travail avait été déjà élaboré avant notre dernier congrès. Nous avions fait remonter les sujets dont les transporteurs débattaient dans le réseau, les conseils d’administration et les instances nationales. À l’issue de tout cela, nous avons regroupé à l’intérieur ces propositions et revendications sous 3 grandes thématiques : la compétitivité, la transition énergétique et écologique, la révolution numérique et technologique. Il s’agit pour nous, à la fois, de porter ces revendications à destination des candidats mais aussi de leur donner une meilleure connaissance et une meilleure image des entreprises du secteur.
F. B. : Nous engagerons cette action dans la foulée de l’élection présidentielle. On sait d’ores et déjà qu’un certain nombre d’entre eux va se représenter. Ce qui est aussi important pour nous, c’est l’échelon local, la proximité de l’entreprise de transport avec le terrain. Il est nécessaire de nourrir les échanges avec les politiques locaux qui relaieront au niveau de l’Assemblée nationale la connaissance qu’ils ont du transport. Ce travail sera complété par des opérations de portes ouvertes dans les entreprises. Car les politiques ont tendance à voir le camion mais pas l’entreprise : ils n’imaginent pas la sophistication que réclament une organisation de transport et le professionnalisme inhérent à nos métiers.
F. B. : Ce qui vient de suite sur la table, c’est : « pas d’écotaxe ». Elle figure à ce titre dans tous les programmes des candidats à la Présidentielle, comme on a pu le découvrir lors de la soirée de TDIE avec les représentants transports des candidats. Seul le représentant d’Emmanuel Macron est resté dans le flou sur ce sujet.
Pendant 7 ans, on a parlé que d’écotaxe ce qui a complètement occulté les problèmes – la compétitivité des entreprises à l’international s’est aggravée, tout comme la charge fiscale. Tout le monde a bien compris que l’on payait cette écotaxe au travers de l’augmentation de la fiscalité du carburant.
F. B. : La FNTR adresse un avertissement aux candidats. Nous les informons qu’il n’y aura pas de discussion possible sur ce sujet. Si le but consiste à trouver de l’argent pour le financement des infrastructures, il faudrait déjà que soit mieux géré l’argent que les PL apportent (5 Md€ hors péage). Où va l’argent ? Ce que l’on sait, c’est que sur les 24 Md€ de TICPE collectés par l’État, tous véhicules confondus, 12 Md€ doivent être affectés aux régions et aux départements pour les infrastructures. Cet argent n’arrive pas, en fait, aux infrastructures. Il faut donc revoir l’utilisation qui en est faite, étant entendu que nous contribuons suffisamment.
J’ajouterais que nous serons attentifs à ce que la hausse de la TICPE soit toujours accompagnée d’une augmentation de la ristourne. Pour autant, nous sommes conscients, qu’au niveau de remboursement où nous sommes (12 cts d’€/l), cela risque de ne pas être tenable de manière pérenne.
F. B. : L’Europe est à la croisée des chemins en matière de politique des transports. Il existe aujourd’hui un fossé entre les pays de l’Ouest et ceux de l’Est. C’est une revendication forte : la France doit reprendre le leadership sur les questions européennes. Il faut agir sur plusieurs leviers à la fois. Le premier concerne – nous sommes assez isolés sur ce point en Europe – la réduction de la période de cabotage de 7 à 3 jours et de 3 opérations de transport à 1. Nous estimons en effet que ce délai de 7 jours permet aux transporteurs étrangers d’optimiser des opérations de cabotage non postérieures à un transport international. Cette question est très importante et nous demandons une période de carence entre 2 périodes de cabotage. Aujourd’hui, il suffit de refaire un transport international, même de quelques kilomètres, pour réactiver une période de 7 jours. Il faut absolument clarifier cette situation.
F. B. : Oui, il est partisan du statu quo à 7 jours, ainsi que les autres fédérations européennes. Nous continuerons, à Bruxelles, de convaincre nos homologues européens.
Une partie des Initiatives routes va sortir à la fin du mois de mai. Certains documents, échappés de la Commission européenne, sont plutôt inquiétants.
F. B. : Il serait prévu de réduire la période de cabotage de 7 à 5 jours, mais avec un nombre d’opérations illimitées. Cela reviendrait à une forme de libéralisation de fait. Or, c’est la ligne rouge pour nous.
Si le statu quo devait être maintenu, il faudra qu’il y ait un renforcement des contrôles sur le cabotage, du moins des procédures et des croisements d’informations entre les États.
F. B. : Il ne fait aucun doute, à nos yeux, que le détachement s’applique en matière de cabotage. Nous pensons que, sur le transport international, il est nécessaire de revoir les règles d’application du détachement. Il faudra voir ce que la Commission va mettre sur la table. Elle risque d’être gênée aux entournures car elle ne sait pas trop quoi faire sur la question du détachement. Cette question est aujourd’hui la plus clivante qui soit en Europe, entre l’Est et l’Ouest.
F. B. : Nos entreprises veulent conserver le dispositif. Elles ne souhaitent pas le voir évoluer vers un système d’allégement de charges. Elles considèrent que le CICE leur a permis de conserver la tête hors de l’eau.
F. B. : Il est très probable que le CFA figure parmi les premiers dossiers qui seront sur le bureau du nouveau gouvernement. En ce qui concerne le Fongecfa, ce qui est important, c’est que les fonds propres soient reconstitués. Or, si le projet de taxation voit le jour, on les reconstituera beaucoup plus tard. Il va falloir passer à autre chose, le faire évoluer vers quelque chose de différent.
La FNTR veut, par ailleurs, démontrer que notre secteur recrute et forme. Il est urgent que les candidats prennent conscience que nous sommes un secteur sous tension, avec des entreprises qui rencontrent des difficultés pour le recrutement de conducteurs mais également d’exploitants. Nous voulons réunir autour de nous, tant au niveau régional que national, tous les acteurs concernés par la question de la formation. Car chacun fait bien, mais seul, de son côté. Nous devons, en outre, orchestrer des campagnes de promotion vers la filière mais également vers l’extérieur. Il nous faut, en outre, anticiper les nouveaux métiers liés à la digitalisation des process.
F. B. : Nous demandons une fiscalité différenciée pour le GNV à usage utilitaire. Pour favoriser la mutation du diesel vers le gaz, il faut des mesures incitatives (prime à l’achat, crédit d’impôt, suramortissement). Le GNV est un véritable carburant alternatif – certes émetteur de CO2 – mais il va surtout permettre d’aller vers le bioGNV, plus vertueux. Très peu de politiques sont au fait des problématiques du gaz ; très peu savent ce qu’est le GNV.
Quand on nous impose des contraintes à « 0 diesel », nous disons « d’accord ». Mais attention, il nous faut, outre les mesures incitatives, des stations d’avitaillement.
Nous devons également mobiliser autour du mix-énergétique (électrique, hybride…).
F. B. : Nous voulons également attirer l’attention sur la place du TRM au cœur des territoires. Nous faisons, entre autres, référence aux interdictions de circuler, qui nous obligent à des contournements absurdes en termes de coûts et de développement durable. On ne sait même pas, en termes d’études d’impact, si c’est aussi efficace qu’on le pense pour améliorer la qualité de l’air. Nous souhaitons également que soient pris en compte les abus sur les tarifs de dépannage. Il faut un meilleur encadrement des pratiques.
Nous avons aussi de solides revendications concernant les tarifs autoroutiers, qui augmentent en dépit de la hausse de l’inflation. Nous voudrions aussi que le Comité national des usagers ait plus qu’un rôle consultatif.
Au chapitre de la sécurité routière, les entreprises sont excédées par l’obligation qui leur est faite de dénoncer les conducteurs. Il y a nécessité de reconnaître que le permis de conduire constitue un outil professionnel et que, si on leur retire, ils perdent le droit de travailler. Nous demandons à ce qu’il soit reconnu comme tel afin que, pour les infractions mineures, le conducteur routier puisse récupérer ses points plus rapidement. Qu’il puisse le faire aussi dans le cadre des FCO.
F. B. : Pour nous, il ne peut se limiter au seul rail-route. Cela peut-être aussi le mer-route, etc. De nombreux transporteurs nous ont fait savoir que nous devions remettre sur la table la question des temps d’attente (récurrente) sur les terminaux. Ils demandent aussi que le transport combiné continue de profiter de la fameuse aide au coup de pince et que le prix des sillons ne flambe pas.
F. B. : Nous voulons faire savoir – peu d’élus le savent – que le TRM est au cœur de la révolution numérique. Ils sont au fait des plateformes qui se sont créées sur le transport de personnes mais ignorent tout de ce qui existe dans la marchandise. Il faut absolument que les hommes politiques intègrent cette révolution numérique dans la politique des transports. Que ferons-nous, demain, lorsque des géants américains débarqueront dans le TRM comme ils l’ont fait dans le secteur du voyageur ? Aujourd’hui, la question des plateformes d’intermédiation est hypersensible. Nous considérons qu’elles doivent disposer du statut de commissionnaire de transport et recourir à des transporteurs inscrits.
Nous avons déjà alerté le secrétariat d’État aux Transports. Les Dreal commencent doucement à effectuer des contrôles. Le transport ne doit pas être banalisé. C’est, entre autres, la raison pour laquelle nous demandons un ministère des Transports de plein exercice, qui intègre le numérique. Cela permettrait à l’État d’avoir une vision globale de la digitalisation. Il est indispensable de mettre en œuvre une politique des transports qui intègre cette révolution numérique. Si l’on ne fait rien – ce qui s’est passé pour les taxis – on passera à côté et on se retrouvera, d’une part, avec une profession réglementée, et d’autre part, avec un transport réalisé par des non professionnels…