PHILIPPE BONNEAU : Nous sommes inquiets car le canal Seine Nord Europe, tel qu’il est constitué, va favoriser les flux vers Anvers et Rotterdam, au détriment du port du Havre en général et du transport routier de marchandises en particulier. Nous estimons que le canal Seine Nord constitue un véritable désastre financier, car il va coûter 4,5 Md€ alors que le barreau ferroviaire prévu (contournement de Paris par Amiens qui permettait un transit des marchandises vers le centre de l’Europe) était bien moins cher (180 M€). Le déséquilibre est déjà important avec les autres ports du nord de l’Europe : Rotterdam traite déjà 400 millions de tonnes annuelles de marchandises, Anvers 164 millions alors qu’au Havre on est sur un chiffre proche de 70 millions de tonnes. Nous opérons 2 200 containers jour et nous avions l’ambition de monter à 4 000/jour. Comment allons-nous faire ?
P. B. : Oui. Sur le port du Havre, premier port français, 85 % des marchandises sont acheminées par camion. Pour chaque convoi qui transitera par le canal Seine Nord Europe, on estime à 180 le nombre de camions auxquels échappera le fret. Au-delà du préjudice économique, il y a le préjudice environnemental avec ces 2 000 ha de terre sacrifiés et ces millions de m3 d’eau qui vont être détournés.
P. B. : Sur son blog, l’économiste Jacques Attali estime qu’« on a choisi, sans en débattre, le projet de Canal Seine qui détruit Le Havre au bénéfice d’Anvers et Rotterdam. On a choisi le nord contre la Normandie en prétendant que l’on peut favoriser les deux ». Nous nous sommes mobilisés contre ce projet : l’OTRE Normandie a été auditionnée mais nous n’en avons trouvé aucune trace dans le rapport. Le port du Havre n’arrive qu’au 68e rang des principaux ports mondiaux. La dégringolade va se poursuivre alors que nous nous battons pour que Le Havre reste une porte de l’Europe.