L’écotaxe ressuscitera-t-elle un jour par la grâce du Conseil d’État ? L’association France Nature Environnement (FNE) y croit dur comme fer. Pour preuve, la fédération régionale, Alsace Nature, affiliée à France Nature Environnement a déposé auprès de la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, et du ministre de l’Économie et des Finances, Michel Sapin, une injonction de mise en œuvre du dispositif technique de collecte de l’écotaxe poids lourd. Face au refus des ministres, l’association a déposé un recours auprès du Conseil d’État. Lors de son audience le 9 novembre, le rapporteur public a donné raison à la fédération régionale alsacienne. Ses conclusions tendent à soutenir la thèse d’Alsace Nature puisqu’elles font un premier pas en direction du déploiement de véritables solutions aux problèmes de qualité de l’air. Le rapporteur public pointe aussi les congestions routières observées dans de nombreuses agglomérations, où de trop nombreux et archaïques projets d’aménagements routiers sont privilégiés. En conséquence, il enjoint aux ministres de prendre un arrêté fixant les modalités techniques de la loi sous six mois.
La révolte des « bonnets rouges » en 2013 et l’entrée de Ségolène Royal dans le gouvernement de Manuel Valls avait conduit l’exécutif et le directeur général des infrastructures, Daniel Bursaux, a élaboré un dispositif de bric et de broc, baptisé « péage de transit ». C’est sur la base de ce système abscons et ingérable pour les transporteurs que Ségolène Royal a choisi de suspendre l’écotaxe sine die. « La taxe carbone ne compense pas l’abandon de l’écotaxe en 2014 parce qu’elle ne sert pas les mêmes objectifs en matière de financement de modes alternatifs à la route, affirme Benoît Hartmann, le porte-parole de FNE. Nous avons chiffré le manque à gagner à 2,6 Md€. Cela représente l’indemnisation d’Ecomouv’ pour rupture du contrat de partenariat et le manque à gagner de ce que devait rapporter l’écotaxe chaque mois. En réalité, la TICPE n’est pas fléchée pour financer les transports alternatifs à la route. » Les fédérations professionnelles du TRM ont aussitôt réagi à l’offensive de FNE. « Le transport routier de marchandises paie l’écotaxe par l’augmentation de la TICPE (hausse de 4 centimes par litre) depuis le 1er janvier 2015, font remarquer la FNTR/TLF/Unostra et la CSD dans un communiqué commun. C’est d’ailleurs à ce prix et pour solde de tout compte que le Gouvernement avait reporté sine die l’écotaxe « portique ». » Elles rappellent, au passage, que les transporteurs contribuent déjà à hauteur de 5 Md€ par an au financement des infrastructures de transport. L’OTRE estime de son côté que FNE « prouve à nouveau son dogme anti-camions en énonçant des contre-vérités, avec pour but de faire pression sur les juges. En effet, l’association laisse croire que l’écotaxe serait une mesure favorable à l’amélioration de la qualité de l’air […]. FNE oublie de mentionner que l’écotaxe était une taxe sur la circulation, et non une taxe environnementale. La loi sur la transition énergétique a posé comme objectif l’amélioration de la qualité de l’air en milieu urbain, là où sont concentrées les émissions polluantes nuisibles à la santé. » Mise en délibéré, la décision du Conseil d’État devrait être rendue sous deux à trois semaines. Reste à savoir si l’avis du rapporteur public sera suivi par le Conseil d’État.