«Nous avons constaté une chute des trafics de viande de boeuf découpée de 30 % depuis le 20 octobre », annonce Jacques Wolf, directeur général de Maine Denrées (72), filiale du groupe Stef-TFE. Ce type de trafics, entre les abattoirs et les plates-formes de la grande distribution, représente 15 % du chiffre d'affaires de cette entreprise spécialisée dans le transport frigorifique. Les Transports Jouan (29) acheminent, une fois par semaine, de la viande pendue de l'abattoir de Quimper chez un grossiste d'Agen (47). Leur P-dg, Hélène Jouan, constate : « Depuis trois semaines, nous n'avons plus de départs ». Pour compenser ces manques à gagner, Maine Denrées s'est lancé dans le transport de plats préparés tandis que Jouan s'est tourné vers les primeurs.
Difficile de compenser. En revanche, la société Ayrault (79), spécialisée dans le transport d'animaux vivants, ne parvient pas à faire face à la baisse de 40 % de ses trafics depuis trois semaines. « Il est difficile de rentabiliser le matériel spécifique que nous utilisons. Avec plusieurs véhicules immobilisés, une partie de nos conducteurs sont en vacances ou en récupération », explique Alain Ayrault, P-dg de l'entreprise des Deux-Sèvres. Avec un chiffre d'affaires de 13 MF et 19 bétaillères, celle-ci approvisionne les abattoirs et effectue des transferts d'animaux maigres pour l'élevage. Cette dernière activité est quasiment stoppée, les éleveurs ne sachant pas quelles quantités acheter. « Certains de mes confrères ont perdu 60 à 70 % de leurs trafics depuis le début de la crise », déplore François Lechat, P-dg des transports Lechat (44) et président du groupement de transports d'animaux (onze adhérents pour une soixantaine de bétaillères). Avec 5 salariés et 4 véhicules, l'entreprise de Loire-Atlantique accuse, pour sa part, une diminution de 15 à 20 % de son chiffre d'affaires depuis une semaine (CA total de 7 MF). Spécialisée dans le transport de boeufs, mais aussi de veaux et de moutons, elle n'avait pas vraiment ressenti la crise jusque là. Toutefois, François Lechat s'inquiète pour l'avenir des transporteurs concernés, en particulier si la crise se prolonge. Lors de sa prochaine assemblée générale, le groupement des transports d'animaux étudiera l'éventualité de déposer une plainte contre X. Et ce même si les espoirs d'aboutir semblent assez minces.
Les difficultés des transporteurs résultent de la baisse de la consommation bovine de 20 à 40 %, du 24 octobre au 7 novembre. Une situation provoquée par le nouvel épisode de la crise de la vache folle, qui s'est déclenché le 10 octobre dernier. Un négociant de l'Eure a livré à l'abattoir Soviba (filiale de la Coopérative agricole de la Noëlle Ancenis) de Villers-Bocage (14) un lot de 36 vaches. L'une d'entre elles a été déclarée positive au test de dépistage de l'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine). Elle provenait d'un élevage de dix-huit bovins, dont onze avaient déjà été vendus au groupe Carrefour. Par précaution, la viande a donc été retirée de 39 magasins de l'enseigne. C'est suite à cette affaire mais aussi à l'augmentation des cas d'ESB en France (86 depuis le début de l'année) que la Hongrie, la Pologne et la Russie ont interdit les exportations de viande française. Par ailleurs, 207 magasins Buffalo Grill ne serviront plus, jusqu'à nouvel ordre, de côtes de boeuf. De nombreuses cantines scolaires ont également supprimé la viande de boeuf de leurs menus.