Publiée le 21 juillet au Journal Officiel, la circulaire Aubry-Gayssot sur les aides à la réduction du temps de travail dans le transport routier de marchandises complète le texte ministériel du 23 mars dernier (L'OT 2071). Elle détaille les dispositifs d'aides applicables aux personnels roulants, leurs modes de calcul, les conditions d'éligibilité ainsi que la procédure à suivre. Elle ouvre droit à deux régimes non cumulables : la réduction de cotisations de sécurité sociale (autrement dit la « ristourne dégressive sur les bas salaires ») et l'allégement de cotisations sociales prévu par la loi Aubry II.
La réduction de cotisations
Ce dispositif, mis en place par le décret du 12 mai 1997 pour les entreprises qui respectaient l'accord social de novembre 1994, est pérennisé. Attention, il n'est applicable qu'aux seuls conducteurs « grands routiers ». Pour en bénéficier, l'employeur devra appliquer les dispositions du décret du 27 janvier 2000 : durées maximales de temps de service (56 heures en semaine isolée, 50 heures en moyenne par semaine ou 220 heures par mois), calcul de la durée du travail (par accord d'entreprise ou autorisation de l'inspection du travail), paiement des heures supplémentaires et attribution des repos récupérateurs ou compensateurs. Il est en outre tenu de respecter les règles en vigueur sur la transparence des heures travaillées et des rémunérations prévues par le décret 83-40.
L'entreprise sollicitant le bénéfice de la réduction doit avoir respecté l'ensemble de ces dispositions depuis au moins un mois avant sa demande. Dans le cas où le transporteur bénéficiait de ce régime d'aides avant la mise en place du décret, il doit prouver qu'il applique bien la RTT pour pouvoir continuer à bénéficier de la ristourne. Dans le cas contraire, la réduction sera suspendue pour l'ensemble de ses conducteurs « grands routiers ».
- Montant de la réduction
La réduction est dégressive en fonction de la rémunération mensuelle du salarié. La rémunération prise en compte est la rémunération brute versée au salarié au cours du mois civil et soumise à cotisations de sécurité sociale (art. L 242-1 du code de la sécurité sociale). Le mode de calcul reste inchangé. Le plafond de salaire ouvrant droit à la réduction est calculé sur la base de 230 fois le Smic, majoré de 30 %, soit 12 563,98 F depuis le 1er juillet 2000. Pour les salaires supérieurs à 169 fois le Smic, la réduction mensuelle est calculé comme suit : 12 563,98-salaire x 0,237. Pour les ceux inférieurs à 169 le Smic (inférieurs à 7 101,38 F), le calcul repose sur la formule suivante : salaire x 0,182 x prorata (nombre d'heures payées/169 heures ou durée conventionnelle si elle est inférieure).
- Date d'application
Pour 2000, la réduction de cotisations sociales est applicable aux cotisations dues au titre des gains et rémunérations des personnels « grands routiers » versées à compter du premier jour du mois suivant la date à laquelle les dispositions du décret du 27 janvier 2000 et les règles de transparence des temps sont respectées depuis au moins un mois. La mesure ne s'applique pas aux salaires correspondant au mois de janvier 2000. L'employeur n'applique la réduction qu'après acceptation de sa demande, adressée à la Direction régionale de l'Equipement (DRE) avant le 1er janvier 2001.
L'allégement de cotisations
Les entreprises employant des salariés « grands routiers » et « courtes distances » peuvent bénéficier de l'allégement de cotisations sociales (loi Aubry II). Elles doivent signer un accord d'entreprise ou d'établissement (cf. encadré) prévoyant pour les « grands routiers » une durée maximale de temps de service de 48 heures par semaine ou 208 heures par mois ; pour les « courtes distances » de 37 heures par semaine ou 160 heures par mois (voir tableau).
- Pour les « grands routiers »
L'allégement ne peut être cumulé avec la réduction de cotisations sociales. Le mode de calcul est adapté « afin de prendre en compte les durées de temps de service plus élevées des personnels roulants grands routiers ». Ainsi, lorsque l'accord prévoit une durée de temps de service comprise entre 35 heures et 48 heures par semaine (ou 152 heures et 208 heures par mois), la formule de l'allégement sur un mois est la suivante : (42 102 F x 8 592,57 F/rémunération - 20 290 F)/12. Le montant de l'allégement ne peut dépasser 1 817,67 F par salarié et par mois. Le montant minimum de l'allégement, par salarié et par mois, ne peut être inférieur à 338,17 F (pour les rémunérations supérieures ou égales à 14 858 F). En cas d'accord RTT fixant la durée du service des « grands routiers » à 35 heures par semaine, il est prévu en sus une majoration annuelle de 3 551 F par salarié.
Soumis à la conclusion d'un accord RTT sur la base d'un temps de service de 208 heures par mois et à des obligations en matière d'emploi, le régime de l'allègement est par nature plus incitatif que celui de la réduction. Ainsi, pour un salaire mensuel de 10 000 F, la réduction est égale à 607,66 F (12 563,98 - 10 000 x 0,237) alors que l'allégement s'affiche à 1 323,86 F (42 102 x 8 592,57/10 000 - 20 290/12).
- Pour les « courtes distances »
Une période transitoire est aménagée jusqu'au 1er janvier 2002, pendant laquelle les accords pourront prévoir des temps de service au plus égaux à 41 h 30 par semaine ou 180 heures par mois. Dans ce cas, la circulaire précise que l'allégement sera accordé pour une période limitée à cinq ans et non pour une durée illimitée.
Selon les modalités fixées par la loi Aubry II, l'allégement est, dans la limite d'un maximum et d'un minimum, calculé chaque mois selon la formule suivante : (42 102 F x 6 981,46 F/rémunération - 20 290 F)/12. Le montant de l'allégement ne peut dépasser 1 817,67 F par salarié et par mois. Le montant minimum de l'allégement, par salarié et par mois, ne peut être inférieur à 338,17 F par mois (pour les rémunérations supérieures ou égales à 12 072 F). Ces personnels peuvent, en outre, ouvrir droit, comme les chauffeurs « grands routiers », à une majoration de 3 551 F par salarié et par an en cas d'accord fixant la durée du temps de service à 35 heures.
- Date d'application
Pour l'année 200, l'allégement pourra être rétroactivement appliqué aux rémunérations versées à compter du premier jour du mois suivant la date d'entrée en vigueur des durées de temps de travail et de temps service prévues par l'accord d'entreprise ou d'établissement. Toutefois, la rétroactivité ne pourra pas concerner le mois de janvier 2000.
Conformément à la loi Aubry II, les accords, pour ouvrir droit à l'allégement, devront indiquer l'engagement pris par l'entreprise ou l'établissement quant au nombre d'emplois créés ou préservés du fait de la réduction du temps de travail. L'entreprise doit bien entendu respecter les dispositions du décret du 27 janvier 2000 ainsi que les règles de transparence définies par le décret 83-40. Lorsque l'allégement lui a été accordé, l'employeur s'engage à respecter les dispositions de l'accord pour les conducteurs de son entreprise ou de son établissement. La circulaire prévoit les cas de suppression ou de suspension de l'allégement de cotisations.
- Cas particuliers
Les entreprises qui bénéficient déjà d'aides incitatives Aubry I (pour des accords conclus avant le 1er février 2000) peuvent les cumuler avec l'allégement de cotisations sociales. L'aide va à son terme sous réserve que l'entreprise respecte les dispositions du décret du 27 janvier 2000 (paiement des heures supplémentaires, repos compensateurs ou récupérateurs...). Dans ce cas, l'allégement subit une minoration mensuelle égale à 1/12e de 4 000 F.
Les entreprises ayant conclu un accord de RTT avant le 1er février 2000 mais qui ne l'ont pas nécessairement mis en oeuvre avant cette date peuvent bénéficier de l'allégement sous réserve qu'elles en remplissent les conditions (durée de temps de service, heures supplémentaires...).
Les entreprises créées après le 31 janvier 2000 peuvent bénéficier de l'aide incitative prévue par la loi du 13 juin 1998 cumulée à l'allégement de cotisations sociales si elles concluent un accord de RTT y ouvrant droit ou si la durée stipulée au contrat de travail des salariés n'excède pas les limites fixées. Dans ce cas, l'entreprise a deux ans à compter de la première embauche pour fixer cette durée par accord. Le montant de l'aide incitative correspond à celui applicable pour une réduction du temps de travail de 10 % augmenté d'une majoration de 1 000 F Les salariés doivent bénéficier d'une rémunération au moins égale à 169 fois le SMIC en vigueur à la date de la première embauche.
La procédure
Dans tous les cas, l'employeur n'applique les allégements ou réductions de cotisations qu'après acceptation de sa demande par l'administration. Une procédure similaire est mise en place pour les deux aides qui s'appuient néanmoins sur des formulaires distincts (réduction et allégement). Ils sont à retirer auprès de la DRE, de l'inspection du travail des transports ou sur le site internet du ministère (http://www.equipement.gouv.fr, rubrique « transports » puis « circulaire »). Ils doivent être retournés à la DRE du siège de l'entreprise ou de l'établissement remplis et accompagnés de documents justificatifs. A la demande de réduction, seront ainsi joints l'engagement signé par l'employeur de respecter la réglementation en vigueur sur la durée du travail et la transparence, l'avis du comité d'entreprise (ou à défaut des délégués du personnel s'il en existe) auquel la demande aura préalablement été soumise, un récapitulatif mensuel des heures travaillées se rapportant au dernier mois précédant la demande (photocopies des bulletins de salaires ou relevés mensuels d'activité). Le formulaire « allégement » s'accompagnera pour sa part de la copie de l'accord de RTT, du récépissé de son dépôt à la Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) - procédure qui aura été effectuée au préalable - et de l'engagement à le respecter.
Les entreprises qui bénéficient déjà de la réduction au titre des exercices 1997, 1998 ou 1999 ou de l'aide incitative Aubry I n'ont pas à déposer de nouvelle demande. Un courrier administratif les informera des dispositions réglementaires à respecter pour continuer à en bénéficier. Elles auront alors deux mois pour retourner les formulaires joints et pièces justificatives.
> Réduction de cotisations sociales : instaurée par le décret du 12 mai 1997, cette « ristourne dégressive sur les bas salaires » est adaptée et pérennisée. Son bénéfice ne nécessite pas la conclusion d'un accord de RTT. Elle ne s'applique qu'aux seuls « grands routiers » respectant les durées de temps de service fixées par le décret du 27 janvier 2000.
> Allégement de cotisations sociales : prévu par la loi du 19 janvier 2000, il remplace depuis le 1er février 2000 l'aide incitative Aubry I. Il s'adresse aux entreprises qui :
- concluent un accord de RTT prévoyant une durée maximale de temps de service (48 heures par semaine ou 208 heures par mois pour les « grands routiers », 37 heures par semaine ou 160 heures par mois (41 h 30 par semaine ou 180 heures par mois jusqu'au 1er janvier 2002 à titre transitoire) pour les « courtes distances »;
- respectent les durées de temps de service fixées par le décret du 27 janvier 2000 ;
- garantissent le passage aux 35 heures de leur personnel sédentaire ;
- s'engagent à créer des emplois ou à en préserver.
Les entreprises ou établissements qui souhaitent bénéficier de l'allégement de cotisations sociales pour leur personnel roulant doivent appliquer à leur personnel sédentaire non concerné par les dispositions du décret du 27 janvier 2000 un accord fixant la durée du travail à 35 heures ou 1 600 heures par an au plus. Ce qui ouvre droit, pour cette dernière catégorie de personnel, à un allégement de cotisations de droit commun défini par la circulaire du 3 mars 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail. La déclaration est à adresser à la DRE en même temps que la demande d'allégement relative aux personnels roulants.
Pour ouvrir droit à l'allégement de cotisations, l'accord de RTT doit être signé par une ou des organisations syndicales représentatives de l'entreprise qui ont recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles. S'il est conclu avec une ou des organisations syndicales représentatives non majoritaires dans l'entreprise ou des salariés mandatés, il est nécessaire de le soumettre à la consultation des salariés et recueillir la majorité des suffrages exprimés. S'il est paraphé par des délégués du personnel, il doit en outre être validé par une commission paritaire ad hoc. L'accord, qui doit prendre en compte les trois catégories de personnels (« grands routiers », « courte distance » et personnels sédentaires), précisera obligatoirement :
- la ou les durées de travail ou de temps de service applicables,
- la ou les catégories de salariés auxquelles ces durées s'appliquent,
- les incidences sur la rémunération de la RTT,
- les engagements de l'entreprise relatifs à l'emploi,
- éventuellement les modalités de consultation du personnel,
- les mesures visant à favoriser le temps partiel choisi,
- les mesures destinées à favoriser l'égalité professionnelle entre hommes et femmes,
- ses modalités de suivi (bilan annuel sur incidences de l'accord et objectifs pour l'année suivante),
- pour les personnels roulants : les conditions permettant d'assurer la transparence des heures travaillées et des rémunérations, le mode d'organisation du travail pour appliquer la RTT, le mode de décompte pour le calcul du temps de service.