Du Havre à Marseille, le blocage des ports pèse sur l'économie française

Le blocage des ports de commerce par des syndicalistes de la CGT opposés à la réforme des retraites inquiète de nombreux acteurs du monde portuaire et au-delà, comme au Havre où l'action "ports morts" était très suivie encore mercredi.
Tôt le matin des manifestants de la CGT ont envahi le siège du Grand Port maritime du Havre et ont formé un "CGT" avec les lumières des bureaux. "Ces coups de force, dégradations de biens et intimidations doivent cesser", a réagi Baptiste Maurand, directeur général du port, sur Twitter.
Plus loin dans la zone industrielle portuaire plusieurs dizaines de manifestants ont bloqué dans la matinée un accès au port en brûlant des palettes, immobilisant plusieurs camions.

Débloquer les ports

Selon Philippe Bonneau, secrétaire général Normandie OTRE, Le Havre "est le port le plus touché" par le conflit. "Vous avez des transporteurs qui sont littéralement en train de crever, car 90 % des entreprises de transport routier sont des TPE et des PME. Ils sont dans une situation impossible, il n'y a jamais eu de conflit social aussi long et aussi dur !". Il réclame une intervention de l'État pour débloquer les ports et organiser à l'avenir un "service minimum" afin d'éviter "qu'une minorité d’individus bloque l'économie française".
"On ne remet pas en cause les grèves mais les blocages qui vont avoir un impact grave sur l'image du port, le premier port à conteneurs de France, et l'emploi. Nous n'allons pas nous laisser mourir à petit feu", a commenté Léa Lassarat, présidente de la CCI Seine Estuaire, annonçant des actions "dès la semaine prochaine".
Pour Alain Adam, président du Medef Seine Estuaire, "25 % des escales (prévues initialement au Havre) ont été détournées vers Anvers en décembre, et entre 30 à 40 % sont annulées en janvier" et réorientées vers Anvers ou Rotterdam.
Entre les dockers et les remorqueurs, "ce sont des grèves les unes derrière les autres mais qui paralysent le trafic de marchandises" et qui ont "un impact en aval sur toutes les autres activités", a ajouté Alain Adam.
Haropa (Le Havre, Rouen et Paris) évoque ainsi 227 escales retardées ou annulées depuis le début de l'opération "Ports morts" et "en appelle à la responsabilité collective de chacun pour que l'ensemble de la chaîne logistique portuaire redevienne rapidement opérationnelle et que les efforts de développement opérés depuis ces dernières années ne soient pas remis en cause".

Course aux conteneurs

Ailleurs, comme aux port de Nantes/Saint-Nazaire et à Marseille, où plusieurs accès étaient encore bloqués mercredi, la situation est inquiétante. Le président de la CCI Nantes-Saint-Nazaire, Yann Trichard, estime les pertes liées aux opérations "Ports morts" "à plusieurs millions d'euros" et à Marseille la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) évalue ces pertes à près de 100 millions d'euros. Mercredi, plusieurs entrées de ces deux ports étaient à nouveau bloquées.
À Marseille, Pascal Galéoté, secrétaire général CGT du Grand Port maritime, se dit "conscient" des "impacts économiques" mais considère toutefois que "c’est le seul moyen aujourd’hui de faire en sorte que le gouvernement revienne sur sa décision avec ce projet de réforme des retraites".
Résultat de cette mobilisation : "Moins 40 % d'activité sur Fos-Marseille, le double estimé au Havre, la quasi-totalité des ports de l'Hexagone est touchée", souligne l'association France Logistique. Et ce alors que 75 % du commerce extérieur français s'effectue par voie maritime, rappelle Armateurs de France.
Depuis le début de la grève, "on ne sait pas où les navires vont faire escale, où les marchandises vont arriver", commente Camille Contamine, déléguée aux affaires maritimes chez TLF Overseas. "C'est une course au conteneur, il faut déterminer si le navire va faire escale dans un port français ou décharger ailleurs". "Dunkerque a fonctionné depuis le début du mouvement, ce qui a permis de détourner pas mal de flux mais pas la totalité", a-t-elle précisé.
Armateurs de France redoute l'impact de la grève sur le long terme pour l'attractivité des ports de l'Hexagone. "Un client insatisfait sera beaucoup plus difficile à convaincre par la suite", souligne l'organisation professionnelle.

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