L’optimisation de l’escale portuaire en débat au Havre

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Club logistique du Havre

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Face au dérèglement des services maritimes et à la désorganisation des flux, les acteurs portuaires et logistiques plaident pour la régularité, élément clé de la fiabilité et de la fluidité de la chaîne logistique.

Logique de concentration des armements, intégration verticale continue, dérèglement des services maritimes, impact sur la chaîne logistique. Tels ont été les sujets abordés le 16 juin lors de la deuxième édition de la Journée maritime et logistique du Havre co-organisée par le Propeller Club et le Club logistique du Havre et animée par Yann Alix de la fondation Sefacil, en présence d’une centaine d’experts et acteurs du territoire havrais.

Quand trois grandes alliances mondiales dans le secteur du transport du conteneur assurent près de 85 % du trafic maritime sur les principales routes et contrôlent 40 % des terminaux, directement ou par des filiales interposées, "nous sommes face à des géants qui ont acquis un pouvoir économique très fort", a rappelé Philippe Corruble, enseignant-chercheur à l’EM Normandie. Et "ces acteurs maritimes intégrés verticalement ont des contraintes liées à la rentabilisation d’énormes investissements".

Or, le trafic maritime global affiche un taux d’annulation d’escales important. Il était de 9 %,
selon Drewry, entre les semaines 10 (6 mars-12 mars) et 14 (3 avril-9 avril) 2023 sur un total de 675 voyages programmés. "64 % des trajets maritimes avant les fêtes de Noël ont été affectés par des annulations de lignes ou d’escales", a précisé Pierre Cariou, professeur en économie maritime à la Kedge Business School.

Les raisons de ce phénomène sont diverses : une demande d’import ou d’export plus faible que prévu ou bien des raisons plus opérationnelles comme un phénomène de congestion, une grève portuaire, les conditions météorologique, ou encore un comportement stratégique, quand l’annulation de l’escale entraîne la réduction de l’offre pour créer la rareté ou réduire la vitesse, ce qui joue sur les prix et impacte lourdement les acteurs des places portuaires concernées.

Seuls les États-Unis régulent

Avec quel impact pour les chargeurs ? "Cela ajoute de l’incertitude à l’incertitude, a développé Pierre Cariou. Rajouter du temps de trajet augmente les coûts d’immobilisation du stock et les coûts du stock de sécurité. L’incertitude rajoute aussi des pertes d'opportunités de ventes."

Un phénomène né fin 2019 : "Si l’on regarde les rapports de l’OCDE des dernières années, on voit poindre une augmentation des retards, des annulations et des sauts d’escales avant la pandémie", a relevé Philippe Corruble.

"Face à ces décisions d’escales prises par ces alliances qui ajustent en permanence leurs services, nous sommes dans un environnement réglementaire fragile", a insisté Philippe Corruble. Seuls les États-Unis, qui n’ont aucun armement national impliqué dans ces logiques de concentration, jouent le rôle de régulateurs.

L’enseignant-chercheur a rappelé la sanction de 2,6 millions de dollars prise le 23 mai la Federal Maritime Commission contre One pour frais de détention excessifs et frais de retour de conteneurs vides excessivement collectés par la compagnie.

En juin 2022, Hapag-Lloyd a été condamné à 2 millions de dollars d’amende pour ses frais de détention. "Ce n’est que le début d’une longue série, assure Philippe Corruble. Il y a une centaine d’affaires en instruction à Washington sur cette thématique".

Modifier l'organisation du travail ?

Au Havre, les réponses se veulent communautaires. Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président du Cluster maritime français a insisté : "Il faut faire vivre la Charte d’engagement des acteurs de la chaîne logistique française signée en octobre 2020 pour restaurer l’attractivité et la capacité de nos ports".

Car "si c’est le marché qui détermine les services maritimes avant tout, a insisté Louis Jonquière, président de l’Unim, nous devons, manutentionnaires, être agiles le plus possible, en fonction de nos capacités, pour accueillir les navires au fur et à mesure qu’ils se présentent Et, pourquoi pas, aller vers une nouvelle organisation et durée du travail sur toute la chaîne".

Avec un enjeu capital : la fluidité logistique, qui nécessite aussi une évacuation rapide des conteneurs par le report modal. Au Havre, 85 % des conteneurs sont acheminés par la route contre 50 % dans les ports du Nord.

Optimiste, Louis Jonquière assure que "plus les armateurs se concentrent de manière verticale, plus ils sont attentifs à ce que dit la marchandise". Avec un constat : leurs efforts pour revenir aux rendez-vous hebdomadaires réguliers et fiables.

Autre tendance, "les chargeurs inscrivent de plus en plus des clauses dans les contrats avec des bonus ou malus". En tout cas, tous sont d’accord pour rappeler les enjeux de la numérisation, de l’intelligence artificielle et de l’adaptabilité permanente dans une vraie logique communautaire.

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