Ils ont géré les dossiers transport et logistique au quotidien durant le quinquennat de François Hollande, en tant que ministre délégué ou secrétaire d'État. Que reste-t-il de l'action de Frédéric Cuvillier et d'Alain Vidalies, qui ont exercé leurs fonctions sous la tutelle successive de Nicole Bricq, Delphine Batho, Philippe Martin et Ségolène Royal ? Au lendemain de la passation de pouvoir entre François Hollande et Emmanuel Macron et à l'heure où une nouvelle équipe gouvernementale va se mettre au travail, nous avons choisi de revenir sur cinq dossiers qui ont marqué le dernier quinquennat en matière de transport.
La déroute de l’écotaxe
Si la création de l’écotaxe est née d’une volonté politique unanime lors du mandat de Nicolas Sarkozy, sa suspension sine die reste la décision la plus retentissante du quinquennat. Prise le 29 octobre 2013 "dans la précipitation pour tenter de répondre à une situation d’urgence" selon la Cour des comptes, elle débouche sur une perte de recettes nette de 9,822 Md€ sur la période d’exploitation du contrat (2014-2024). À cela s’ajoutent 957 M€ d’indemnisations directes versées par l’État à Ecomouv’ et 70 M€ de dépenses engagées par les administrations chargées de la mise en œuvre opérationnelle de cette taxe.
Au final, "le dossier a occupé la profession pendant 7 ans masquant les problèmes du transport et de la logistique. La fin de l'écotaxe a été concrétisée à l'automne dernier par un amendement au projet de loi de finances 2017", résume Florence Berthelot, déléguée générale de la FNTR.
La question du financement pérenne des infrastructures, auquel devait contribuer cette taxe, reste un vrai enjeu pour la nouvelle équipe gouvernementale.
Un smic pour tous
La loi Macron publié 6 août 2015 a jeté un pavé dans la mare dans le transport routier avec l’application d’un salaire minimum au cabotage et à l’ensemble des opérations de transport international (sauf le transit). Un volet de la loi qui n’a pas manqué de s’attirer les foudres de Bruxelles. Par extension, le décret n° 2016/418 dit "décret Macron" est allé plus loin en intégrant les opérateurs, les donneurs d’ordre et les destinataires dans la boucle.
De façon générale, la France se veut moteur dans la lutte contre le dumping social et la fraude, comme en témoigne également son rôle dans la constitution de "l'Alliance du routier". On peut raisonnablement imaginer une continuité politique sur ce plan entre les deux quinquennats. Mais il s'agit d'un vrai combat qui est loin d'être achevé...et gagné.
La logistique élevée au rang de priorité nationale
Grande première lors du quinquennat Hollande. La logistique acquiert en quelque sorte ses lettres de noblesse politique en apparaissant dans un texte de loi en 2013. Présentée en mars 2016, la stratégie France Logistique 2025 repose sur 5 axes : encourager une dynamique logistique sur tout le territoire, faciliter la lisibilité de l’organisation logistique, faire de la transition numérique un vecteur de performance, utiliser la logistique comme un levier de transformation des politiques industrielles et de transition énergétique, et instaurer une gouvernance intégrée. Afin d’assurer la mise en œuvre de cette stratégie, un conseil d’orientation et de suivi a été installé en mars 2017.
François-Michel Lambert, député des Bouches-du-Rhône et président des travaux de la conférence logistique, a rallié le mouvement En Marche d'Emmanuel Macron. Les relations sur ce dossier devraient donc être fluides.
L’économie bleue fer de lance du maritime
Adoptée par les députés le 3 février 2016 puis par le Sénat le 24 mars 2016, la loi pour l’économie bleue est finalement publiée au Journal Officiel du 21 juin 2016. Si la majeure partie des modifications vise le code des transports, ce texte concerne également la gouvernance des ports français.
Parmi les mesures fiscales de ce texte ayant le plus impacté le secteur : l’autoliquidation de la TVA. Cette dernière permet d’imputer la TVA due sur les marchandises importées des pays tiers sur le compte mensuel de TVA à recevoir. "Du coup, il n’y a pas d’importantes avances de trésorerie à provisionner", rappelle Jean-Marc Roué, président d’Armateurs de France.
Là encore, l'action du nouveau président devrait s'inscrire dans la continuité. La loi sur l'économie bleue a en effet portée par un député devenu depuis un porte-parole d'Emmanuel Macron : Arnaud Leroy.
Le cluster maritime français a d'ailleurs accueilli très favorablement l'élection du nouveau président, en appelant à poursuivre les travaux.
Avec Emmanuel Macron, la France en marche vers la croissance bleue! #économie #maritime; CP @ClusterMaritime : https://t.co/p7fuVy6WwQ
— Cluster Maritime FR (@ClusterMaritime) 8 mai 2017
La réforme ferroviaire sur les rails
L'ouverture du fret ferroviaire à la concurrence a montré les faiblesses de l'opérateur historique. Alors que se profile le même mouvement côté passagers, c'est tout le système ferroviaire français qui est à revoir. Le quiquinnat Hollande s'y est attaqué. La loi portant réforme ferroviaire a été publiée le 4 août 2014, avec une mise en place qui s’est étalée sur toute la durée du quinquennat en 3 étapes :
- la création du gestionnaire d’infrastructure unifié et la constitution d’un groupe public ferroviaire ;
- l’adoption d’un nouveau cadre social ;
- la signature des contrats de performance entre l’État et les établissements du groupe public.
Le dossier est cependant loin d'être clos, et sera sans aucun doute sur le dessus de la pile pour le prochain ministre en charge des Transports.
Le fret fluvial à l'heure de la loi Macron
Si le quinquennat qui vient de se terminer a initié un (énième) plan national pour le fret fluvial en septembre 2016, c'est surtout l'une des dispositions de la loi Macron qui semble retenu l'attention des professionnels du secteur.
En effet, pour les transporteurs fluviaux cette disposition rend obligatoire la confirmation de transport fluvial entre les partenaires économiques et instaure une interdiction de recourir à la location transfrontalière.
"Jusque là les transporteurs fluviaux étrangers appliquaient des tarifs plus compétitifs que les opérateurs français car ils ne payaient pas les mêmes cotisations sociales du fait de la location d’équipages transfrontaliers. La loi Macron a mit fin à cette pratique", se réjouit Michel Dourlent, président du conseil d’administration de la Chambre nationale de la batellerie artisanale (CNBA) et coprésident de Transporteurs fluviaux de France (TFF).